La réponse de Max est malheureusement révélatrice des difficultés que connaît l'élevage bovin laitier et du ras-le-bol des producteurs. Alors qu'il « vient de s'installer en vaches laitières », il le « regrette déjà » ! « Dès le départ », il y a eu « la sécheresse » et « le prix du lait trop bas ».
Si cela ne s'améliore pas, il « ne voit pas comment » il « va pouvoir payer » ses factures. « Il faudrait un lait à 500 € les 1 000 l pour percevoir un petit salaire », poursuit-il, regrettant que « tout le monde pousse à l'investissement et qu'une fois ceux-ci réalisés, il n'y ait plus personne ».
Je viens de m'installer, et le regrette déjà !
« Même les gros arrêtent »
Thierry constate pourtant que « de nombreux robots de traite sont en projet pour 2023-2024 ». Il pense donc que « la production laitière va repartir en trombe car les éleveurs devront rembourser leurs investissements ». « Ils n'auront pas le choix : augmenter les volumes pour saturer les robots. »
Des étables avec des panneaux solaires, au lieu des vaches...
Gibbs ne croit pas que cela « compensera les cessations laitières » parce que « le lait va repasser sous la barre des 400 €/1 000 l et que les charges, elles, ne baisseront pas d'un centime ». Il doute d'ailleurs que « ces hypothétiques projets voient le jour ». « Chez nous, il n'y en a pas, ce sont plutôt des abandons de la production laitière et des méthaniseurs... »
Mieux vaut en effet utiliser les stabulations pour « mettre des panneaux solaires », plutôt que des vaches, et fabriquer de l'électricité, selon Perlin Pinpin.
« Dans mon département, ça a commencé il y a 10 ans, témoigne Karl. Mais, on nous a dit que ce n'était pas grave car les producteurs, qui resteraient et qui avaient déjà de grosses références laitières, produiraient plus. Maintenant, ce sont eux qui arrêtent. »
« Encore des installations en lait »...
Denis rejoint @Thierry. Il n'évoque pas les robots mais « les installations en élevage laitier qui se font avec de gros troupeaux et qui contrebalanceraient les arrêts ».
« Faut déjà trouver des banques pour le financement », nuance Olivier.
« Et surtout des volontaires pour s'installer en lait... », ajoute Yannick.
« Il en existe, ce sont les terres qui manquent », maintient Denis, chiffres à l'appui : « Sur 89 nouveaux agriculteurs en 2022 dans mon département, la moitié produisent du lait. »
Jérôme est étonné : « Ah oui, c'est dynamique ! » « Quel département ? », demande-t-il.
« La Haute-Loire », répond Denis.
Et Jérôme d'enchaîner : « Et combien d'arrêts ? »
« Le quadruple sans doute, reconnaît Denis. En nombre de bêtes cependant, ça ne doit pas bouger car les plus de 65 ans ont de petits cheptels. »
Jérôme demeure surpris : « Ah oui ... »
... Mais « ne compensant pas les cessations »
Denis cite alors le dernier recensement agricole de 2020/2021, qui « dénombrait 3 950 exploitations, très majoritairement de petite taille, en Haute-Loire ». « Au niveau départemental, on compte 150 à 200 départs en retraite d'agriculteurs en 2021 pour 84 installations ». Et il en convient : « C'était une bonne année. »
« Voilà ! Quand on tire trop sur la corde, ça casse !!, lance Aurélien. Perso, je fais partie des producteurs qui cessent la production laitière. Marre d'être pris pour des couillons. Dès qu'on demande une augmentation du prix du lait, on met une éternité à l'obtenir et 2-3 mois après, les laiteries ont toujours une excuse pour le rebaisser. »
Plusieurs lecteurs parlent d'arrêter le lait.
Aurélien projette de réorienter sa ferme vers les cultures. Il donne quelques détails : « Mon dernier associé part à la retraite en fin d'année, et je n'ai pas trouvé de salarié polyvalent. Les équipements de mon atelier laitier ont 20 ans et sont vieillissants. Malgré cela et surtout la conjoncture laitière aléatoire, j'ai un pincement au cœur car j'aime cette production et j'ai de bons résultats techniques. »
Alex et Olivier envisagent aussi d'arrêter les vaches laitières.
« Plus petits, mieux lotis ? »
Gérard, dans « un gros Gaec », juge qu'il est « impossible » de remplacer son départ par une installation. Alors, il s'achemine également vers « une cessation ».
Florian les encouragent dans cette voie : « Faut pas continuer à se faire ch... si ça n'en vaut pas la peine ! »
Et André d'appuyer : « Avec leurs enfants quittant l'élevage et le prix du lait non rémunérateur, les producteurs qui vieillissent cessent de produire du lait. Fini la contrainte des 14 traites par semaine toute l'année ! »
Des lecteurs sont toutefois contents d'être éleveurs laitiers comme Scea des vallées, installé avec sa femme « sur une ferme de 50 ha, 35 VL, en bio tout herbe avec 185 000 l produits/an ». Les structures de grande dimension ne sont pas forcément celles qui s'en sortent le mieux, fait-il remarquer : « J'ai des voisins qui ont 500 ha, 1,5 million de litres de lait, des porcs, des céréales, de la méthanisation, avec 10 emplois sur l'exploitation. Si je calcule bien, proportionnellement, il devrait y en avoir 20 et presque autant de tracteurs, ce qui n'est pas le cas bien sûr ! » « Plus qu'une question de taille, l'essentiel est d'abord d'être bien dans ses bottes », conclut-il.