Menu

Finalistes de Graines d’agriculteurs 2023Environnement, bien-être animal, territoire : engagés ces jeunes éleveurs bovins !

Concours Graines d'agriculteurs
Parmi les 10 finalistes, cinq jeunes éleveurs et éleveuses de bovins viande et vaches laitières. (©Graines d'agriculteurs)

Parmi les 10 jeunes finalistes de Graines d'agriculteurs, dédié en 2023 aux pratiques innovantes en élevage : quatre éleveurs et éleveuses de bovins viande et une productrice laitière, tous fortement impliqués pour préserver l'environnement, le bien-être animal et leur territoire. Découvrez les actions qu'ils mènent dans cet objectif et qui expliquent leur sélection en finale de ce concours.

Les 10 finalistes de Graines d’agriculteurs 2023 ont été dévoilés mi-août. Tous sont de jeunes éleveurs car cette 13e édition, lancée au Salon de l’agriculture, est consacrée aux pratiques innovantes en élevage.

Le fonds de dotation de Jeunes Agriculteurs Terres Innovantes, qui organise ce concours depuis 2016, souhaite montrer que ce secteur est « attractif, riche en innovations et permet de lutter contre le changement climatique ».

Il espère derrière redorer l’image de l’élevage auprès du grand public et susciter des vocations pour le métier d’éleveur. À noter : pour participer, il fallait s’être installé entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2020.

Pendant un mois, jusqu'au 31 août, le public a pu voter en ligne pour son jeune agriculteur préféré. Les lauréats ont été sélectionnés, début septembre, à partir de ce vote et après réunion d'un jury. Leurs noms seront dévoilés ce week-end lors de la remise des prix à Cambrai aux Terres de Jim, l'événement annuel du syndicat à destination du grand public. Ils recevront une dotation de 3 000 € pour les aider dans leurs projets.

Océane, bovins viande (Yonne) : « Modifier l’alimentation des animaux »

Océane Abry a repris la ferme familiale à Leugny, d'abord avec son père avant de s'associer avec sa sœur. Depuis trois ans, les Limousines sont engraissées exclusivement à l’herbe, avec paille, foin et luzerne à volonté et seulement une cure annuelle de sels et minéraux. Les deux femmes ont donc repensé leur système, en le simplifiant, et fait évoluer l’assolement, pour diminuer les surfaces de cultures de vente au profit de la luzerne.

La qualité de la viande s’en ressent et les clients sont satisfaits : cet engraissement, plus lent puisqu'il dure quatre ans, apporte « de la tendreté, du persillé et un caractère particulier, lié au territoire », estime la productrice. La luzerne est également une bonne tête d’assolement et améliore la production céréalière. Autre point positif : les coûts de production ont baissé. Mais ces bons résultats ne sont pas arrivés tout de suite. « La première année, les animaux étaient moins beaux », se souvient Océane.

L’élevage vertueux pour l’environnement et le bien manger.

De plus, elle a dû apprendre à ramasser la luzerne sans l’effeuiller pour conserver toute sa valeur. « Il a fallu trouver le moment idéal pour couper, faner, andainer, presser. Soit tôt le matin ou tard le soir, quand il y a un peu d’humidité permettant aux feuilles de rester collées », témoigne la jeune éleveuse. Elle insiste, par ailleurs, sur la complémentarité entre productions bovine et ovine : « Les animaux se servent eux-mêmes. Les refus des brebis sont donnés aux vaches et nous n’avons pas de gâchis. Nous gagnons aussi du temps car nous réapprovisionnons seulement un jour sur deux. »

Vaches allaitantes et brebis laitières sont aussi complémentaires niveau débouchés puisque la viande provenant des deux ateliers et les produits issus de la transformation laitière sont vendus en direct, la clientèle appréciant cette gamme assez large. À travers sa participation à Graines d'agriculteurs, comme au quotidien, Océane veut prouver que « l’élevage peut être vertueux pour l’environnement et le bien manger ». 

Apolline, bovins lait (Ille-et-Vilaine) : «Montrer notre impact positif sur le territoire»

L’élevage laitier d’Apolline Martel, à Colomel, est à la fois situé près de la ville de Redon et en zone de marais classée Natura 2000, sur 20 % de la SAU. Une situation géographique, dont la jeune éleveuse entend tirer parti. Deux à trois jours par semaine, elle reçoit de jeunes enfants avec leurs assistantes maternelles ou leurs centres de loisirs pour des visites de ferme,et/ou des élèves du lycée agricole d'à côté pour leurs travaux pratiques. Elle communique aussi activement sur les réseaux sociaux.

« Notre ambition est de faire reconnaître notre impact bénéfique sur notre territoire. Sans nous, les éleveurs, il y aurait à la place du marais une friche inaccessible et sujette aux incendies. L’élevage est le seul moyen de valoriser ces espaces non constructibles tout comme de préserver l'écosystème », développe-t-elle avant de poursuivre : « Dans notre système, le marais a une importance capitale : il assure l'autosuffisance fourragère. » De 8 à 24 mois, les bêtes sont exclusivement élevées à l’herbe, pâturée ou sous forme de foin.

L’élevage est le seul moyen de valoriser ces espaces.

Ces prairies sont inondées, donc impraticables, l'hiver. L'avantage : elles restent vertes le reste de l'année, quelle que soit la météo. Pour autant, elles ne constituent pas un fourrage adapté à tous les animaux. Apolline explique : « La charge parasitaire est élevée et particulière parce qu'il y a beaucoup de fossés. D'où un risque pour la production et la qualité du lait, si les vaches y pâturaient. »

En revanche, cette herbe est appétante et sa valeur nutritionnelle idéale pour la croissance des jeunes animaux, donc pour le pâturage des génisses, d’avril à octobre. « Entretenir les marais de Redon présente certaines contraintes mais surtout de nombreux intérêts, pour l'exploitation et au-delà : cela maintient le paysage ouvert, pour le tourisme et les activités telle que la randonnée, et bénéficie à la qualité de l'eau », répère la jeune exploitante.

Jordy, bovins viande (Vendée) : « Développer le stockage de carbone »

Jordy Bouancheau, sur la commune Les Lucs sur Boulogne, a choisi l’agriculture de conservation des sols, avec des itinéraires techniques simplifiés. Pour lui, grâce à ses trois ateliers (bovins viande, cultures, poulets de chair), « l’exploitation est un écosystème qui s’intègre parfaitement dans son époque et son territoire ». Autrement dit, il veut « se positionner face aux enjeux environnementaux, au changement climatique notamment, pas subir ».

« Nous, les éleveurs, nous pouvons limiter notre impact. Celui-ci peut même devenir positif pour la biodiversité et la captation de CO2 », enchaîne-t-il. Concrètement, le jeune homme s'est penché sur le bilan carbonede son exploitation, via la méthode Cap'2ER, afin d'établir « une cartographie de son empreinte environnementale ».

L'élevage capte plus de CO2 qu'il n'en émet.

Il envisage de vendre le surplus de CO2 – « mon élevage en capte plus qu’il n’en émet, dans les prairies permanentes entre autres », assure-t-il – via France Carbone Agri. Véritable outil de communication auprès de la société, ce type de démarche lui permet également de mieux mesurer, au fur et à mesure, les conséquences de ses décisions.

Par ailleurs, il utilise le guidage par satellites afin d'appliquer « la bonne dose au bon moment ». À la clé : « un gain de temps, de carburant et d’intrants. » Ainsi, il a diminué le nombre de passages sur ses parcelles et baissé de 30 % la fertilisation chimique sur les prairies naturelles, grâce à « une meilleure valorisation des effluents d’élevage ». Pour être plus autonome en protéines, et ne plus acheter de soja, il a augmenté la part de légumineuses. Enfin, la diminution du délai entre le dernier vêlage et le départ pour l’abattoir « réduit le nombre de vaches improductives sur la ferme ».

Cyril, bovins viande (Hautes-Pyrénées) : «S'engager pour son territoire» 

Cyril Bibes, à Bénac, s'est lancé dans l'élevage de la race lourdaise, connue avant la Seconde Guerre Mondiale mais aujourd'hui menacée : il y a peu, le troupeau français ne comptait plus de 17 vaches et un taureau ! Or, « elle est particulièrement bien adaptée au territoire : elle valorise bien l’herbe de nos montagnes et des zones humides ».

« Un véritable atout face au changement climatique », met-il en avant. Dans le contexte actuel de hausse des charges, « elle produit de la viande à pas cher », complète le jeune installé. C'est pourquoi la sauvegarde de cette race, dont l'effectif de femelles est déjà remonté à 250, lui tient à cœur.

Pérenniser l'élevage, en sécurisant le revenu des éleveurs.

Autant que de pérenniser l'élevage dans la région en préservant le revenu des éleveurs. Avec une douzaine d’agriculteurs, il s'est engagé dans une initiative collective en créant la marque Pic Steak. « Les débouchés en viande bio sont rares : les bêtes de Hautes-Pyrénées partent souvent en maigre et ne sont pas bien payées », précise Cyril.

Deux vaches sont abattues chaque semaine, la moitié commercialisée en steaks hachés et l'autre en demi-carcasse. Un an plus tard, le collectif regroupe une vingtaine de producteurs et aimerait, à moyen terme, étendre sa zone de vente sur Toulouse. « Perpétuer la tradition et installer des jeunes en race lourdaise, qui puissent vivre dignement du métier d'éleveur, c'est inscrire dans l’avenir cette race du passé », conclut le jeune homme.

Pierre, bovins viande (Vienne) : « Prendre soin des bêtes autrement »

« Dans la famille, on est éleveur depuis quatre générations. C'était évident que je m'installerais », indique Pierre Nauleau. Alors il a profité que des terres se llibèrent à Charroux près de la ferme familiale, en attendant de rejoindre le Gaec. Dès son installation, il s'est converti à l'agriculture bio. Pour poursuivre sur cette lancée, il cherche à recourir le moins possible aux antibiotiques en associant l’acupuncture aux huiles essentielles tout au long de la vie des bovins, en préventif et curatif.

« Vêlages, démarrage des veaux, problème de gros nombrils récurrent dans l'élevage, maladies, etc. il a des points d'acupuncture pour toutes les situations. Grâce aux aiguilles et aux huiles essentielles, j'améliore la santé globale de mon troupeau etje ne sens tellement plus proches de mes bêtes, avec lesquels j'ai davantage d'interactions. Du bien-être pour les animaux, apaisés, et l'éleveur », souligne-t-il.

Du bien-être au sein de l'élevage, et pour l'éleveur aussi !

Il s'est formé à « soigner autrement » auprès de sa tante et de vétérinaires. « Dès la naissance des veaux, on stimule le "triangle de l'immunité", c'est-à-dire la rate, les reins et le foie, reprend-il. Ainsi, leur prise de poids est plus rapide. Je leur propose des plaquettes de bois imbibées d'huiles essentielles qu'ils vont lécher ou mâchouiller en fonction de leurs besoins. »

« Sur les boiteries, l'acupuncture donne de bons résultats. Et pour les différents types de diarrhées, c'est une combinaison des deux méthodes qui fonctionne le mieux », témoigne l'éleveur, content des effets observés. Car elles sont complémentaires même si « la plupart du temps, les aiguilles suffisent ». « On les pose sur des endroits précis et elles tombent toutes seules dès qu'elles ont agi », relate Pierre. Autre bonne nouvelle : des frais vétos moindres.

Réagir à cet article

Sur le même sujet