Autonomie fourragère, optimisation des intrants, production d’électricité, transformation fromagère… la Soloitza Farm cherche à être aussi indépendante que possible. Son ambition : transformer l’intégralité du lait produit sur la ferme pour ne plus dépendre des industriels.
Au nord de l’Espagne, Ziortza Lopez et Eurigue Urruela travaillent à se détacher progressivement du modèle d’élevage espagnol dominant. Leur maître mot : l’autonomie. Créée en 2001, la structure comptait environ 120 vaches laitières. Au fil des ans, le couple a diminué en chargement pour faire coïncider le cheptel avec la capacité de production fourragère de la ferme. La pratique n’a pas de quoi étonner un éleveur français, mais elle détonne dans une région où les exploitants ont coutume d’acheter de l’aliment. « Aujourd’hui, j’ai entre 90 et 100 vaches. J’ai une trentaine de places libres dans la stabulation, mais ça me permet de ne plus acheter de fourrage à l’extérieur », résume Eurigue.
Rompre les liens avec l’industrie laitière
L’autonomie ne se limite pas à la production fourragère. L’exploitation est dotée d’un séparateur de phases, pour valoriser autant que possible la matière organique produite sur la ferme, et mise sur la production d’énergie solaire. Mais la construction, en 2021, d’une fromagerie est certainement la cerise sur le gâteau. Capable de valoriser l’intégralité de la production de l’étable, l’atelier vise à déconnecter l’exploitation de l’industrie laitière. « On a vendu notre lait aux industriels pendant 20 ans, on en vend encore aujourd’hui, et on se rend compte que la plus-value se fait essentiellement autour de la transformation », constate Eurigue.
Actuellement, 120 000 l de lait sont transformés via la fromagerie, soit 10 à 12 % de la production de l’étable. À terme, les éleveurs espèrent valoriser tout leur lait, soit plus d’un million de litres.
Mais se passer des industriels n’est pas chose aisée. Il aura tout d’abord fallu investir. Un million d’euros a été dédié à la construction de la fromagerie et l’acquisition du matériel. « C’est beaucoup, mais le bâtiment aurait pu coûter encore plus cher avec la hausse du prix des matériaux post-covid », souffle Ziortza. Les subventions de l’Union européenne et du gouvernement basque, à hauteur de 40 %, ont également aidé le bâtiment à sortir de terre.
Au-delà de l’investissement, le désengagement vis-à-vis de la laiterie prend du temps. « À chaque fois que l’on passe un palier de production, il faut trouver un nouvel équilibre économique », explique l’éleveur. D’autant que le couple mise essentiellement sur la vente directe pour écouler ses produits. « Nous aimerions autant que possible nous passer des grandes surfaces. C’est important pour nous de faire comprendre aux enfants que le lait ne sort pas tout droit du supermarché ».
5 personnes sur la fromagerie
Avec quatre autres personnes de sa famille, Ziortza chapeaute la fromagerie. Leur spécificité : le travail nocturne. Une particularité qui s’explique par la production d’un fromage frais local, distribué sans conservateur. Chaque soir, Eurigue ramène du lait à la fromagerie. Son épouse transforme. « On travaille entre minuit et 7 h du matin », explique l’éleveuse. « Ca peut paraître contraignant, mais ça permet d’emmener les enfants le matin à l’école, de les retrouver le soir, et surtout, de faire du fromage naturel, sans conservateurs ».
La gamme de produits est complétée par un fromage bleu, dont les éleveurs tiennent la recette secrète, ainsi que des yaourts.
Des vaches laitières hautes productrices
S’il est un aspect que l’exploitation partage avec les autres fermes espagnoles, c’est la productivité. Chez Eurigue, les vaches sont en moyenne à 40 kg de lait. Le troupeau avoisine les 12 000 litres par vache sur 305 jours de lactation. Compter alors 25 kg d’herbe, 8 kg de pulpe et 8 kg de concentré (+/- 1 kg selon le niveau de production). « On est dans les 300 g de concentré par litre de lait produit », précise Eurigue. En bref, la fromagerie a encore de très belles perspectives de croissance devant elle !
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