Dossier Article 2 / 6

Méthanisation, des bénéfices agronomiques et agro-écologiques

©P. Le Cann

Méthanisation, des bénéfices agronomiques et agro-écologiques

Pour lutter contre le changement climatique et améliorer la souveraineté énergétique, la production de biogaz est appelée à se développer. Et les méthaniseurs se multiplient.

« Nous maîtrisons mieux le cycle de l’azote »

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Romain Marqué est l’un des huit apporteurs de la SARL Biogaz de la Vilaine comptant quatre éleveurs laitiers dont un en bio.
Romain Marqué est l’un des huit apporteurs de la SARL Biogaz de la Vilaine, comptant quatre éleveurs laitiers dont un en bio. (© N.Tiers)

La méthanisation, mais aussi l’analyse des effluents d’élevage et des digestats, la couverture des fosses de stockage, et l’acquisition collective d’un matériel d’épandage avec enfouissement, permettent à la SARL Biogaz de la Vilaine de mieux valoriser l’azote à disposition et de réduire son empreinte carbone.

L’élevage de Romain Marqué est implanté à moins de dix kilomètres de Rennes. Si cette situation présente un atout pour trouver un renfort de main-d’œuvre, elle est plus contraignante en matière de gestion des effluents d’élevage.

« À mon installation en 2018, j’ai déposé un permis de construire pour une fosse à lisier car je manquais de capacité de stockage, raconte le jeune éleveur de 37 ans. Il a été accepté mais contesté par des riverains craignant les nuisances olfactives. L’une d’entre eux m’ayant suggéré d’opter plutôt pour la méthanisation, j’ai étudié cette piste en raccrochant des collègues de la Cuma de Chavagne. »

80 % de réduction des achats d’engrais azotés

C’est ainsi que le méthaniseur collectif Biogaz de la Vilaine entre en service en 2021 avec l’aval de la mairie et du voisinage, pour une capacité d’injection de 70 Nm3 au départ (170 Nm3 aujourd’hui). Chaque jour, 72 tonnes de matières y sont incorporées, composées à 85 % d’effluents d’élevage (lisier, fumier), 4 % de maïs, 6 % de Cive et 5 % de déchets extérieurs (tri de céréales, déchets agroalimentaires). Parmi les huit agriculteurs apporteurs (dont quatre associés), quatre sont laitiers (dont un en bio), un est éleveur de génisses, un autre de porcs, et deux sont producteurs de viande bovine et volailles.

L’unité de méthanisation compte une fosse de stockage du digestat couverte de 9 000 m3 et bientôt une seconde fosse couverte de 4 000 m3. Ceci permet de réduire la volatilisation
L’unité de méthanisation compte une fosse de stockage du digestat couverte de 9 000 m3, et bientôt une seconde fosse couverte de 4 000 m3. (© N.Tiers)

L’unité de méthanisation basée à Chavagne comprend une fosse de stockage du digestat couverte d’une capacité de 9 000 m3. Elle est complétée par plusieurs fosses déportées dans les fermes, pas toutes bâchées (la durée de stockage étant alors limitée). La production de digestat brut s’élève à 25 000 m3 par an. « Nous avons mis en place une banque d’azote, explique Romain Marqué. Les effluents entrants sont pesés et analysés plusieurs fois par an, ainsi que les digestats sortants. Chacun récupère l’équivalent de ses apports et un surplus issu des apports extérieurs. Le plan d’épandage global s’élève à 950 ha. Certains éleveurs ont pu alléger leur charge en effluents tandis que d’autres ont réduit jusqu’à 80 % leurs achats d’engrais azotés. La méthanisation a donc un effet vertueux. Les diagnostics Cap’2ER réalisés dans nos fermes montrent des baisses importantes d’empreinte carbone liées à la moindre dépendance aux engrais. »

automoteur d’épandage Avec ses pneus larges d’un mètre en basse pression l’automoteur d’épandage est ravitaillé au champ par des tonnes à lisier achetées d’occasion. Les sols sont davantage préservés du tassement.
Avec ses pneus larges d’un mètre en basse pression, l’automoteur d’épandage est ravitaillé au champ par des tonnes à lisier achetées d’occasion. Les sols sont davantage préservés du tassement. (© Gaec Dyna’Milk)

La gestion collective des effluents a aussi permis aux éleveurs d’accéder à un matériel d’épandage plus performant, avec un impact positif sur la qualité de l’air et le tassement des sols. Avant le démarrage du méthaniseur, la Cuma de Chavagne avait transféré son activité épandage à l’intercuma des Trois Rivières, qui avait alors investi dans une tonne à lisier avec rampe à pendillards et enfouisseur à dents. Ce matériel transportant déjà 30 000 m3 de lisier par an, il fallait un deuxième ensemble. « Nous utilisions ponctuellement l’automoteur d’épandage Vervaet d’une ETA voisine, et nous y voyions plusieurs avantages, indique Romain Marqué. Grâce aux pneus à basse pression larges d’un mètre et à la marche en crabe sur une largeur de quatre mètres, il n’y a pas de tassement des sols et les fenêtres météo sont plus larges. De plus, on peut fertiliser les céréales en sortie d’hiver sans les endommager. Nous avons donc proposé cette option. »

« On économise un passage de travail du sol »

L’intercuma des Trois Rivières investit alors 450 000 € dans un automoteur d’épandage Vredo d’une capacité de 20 m3, auquel elle ajoute un enfouisseur à disques pour prairies (60 000 €) et deux taxis de ravitaillement (60 000 €). Ce sont d’anciennes tonnes à lisier allégées au maximum pour le transport du digestat jusqu’en bord de champ. L’investissement global est similaire à un nouvel ensemble tonne à lisier et tracteur.

Avec l’enfouisseur à disques, le digestat est épandu sous la prairie dans un sillon : il y a donc très peu ou pas de volatilisation d’ammoniac (qualité de l’air), une meilleure valorisation de l’azote (gain de rendement ou économie d’azote), et suppression de la problématique d’appétence de l’herbe pour les vaches au pâturage. Pour les cultures, les cumistes ont acquis un enfouisseur à disques déchaumeurs (Lemken Heliodor). « C’est un peu comme un cover-crop, précise Romain Marqué. Le sol est travaillé de façon superficielle sur huit-dix centimètres, et donc mélangé au digestat épandu. Là non plus il n’y a pas de volatilisation, mais une meilleure valorisation de l’azote, et aussi une valorisation de la puissance de l’automoteur pour déchaumer. On économise un passage de travail du sol. On peut semer directement derrière le Vredo avec notre semoir Sky. » Ces nouveaux équipements ont incité l’éleveur à revoir son assolement : il a remplacé ses mélanges fourragers ray-grass d’Italie-trèfle par des méteils d’hiver, ces derniers pouvant être détruits par un travail simplifié du sol contrairement au ray-grass. Il économise ainsi du gasoil et/ou du glyphosate.

Avec l’enfouisseur à disques pour prairies, le digestat est déposé dans un sillon creusé sous la prairie : la volatilisation de l’ammoniac est fortement limitée et l’azote est mieux valorisé. (© Gaec Dyna’Milk)

L’unité de méthanisation Biogaz de la Vilaine sera bientôt équipée d’une fosse de stockage couverte supplémentaire de 4 000 m3 et d’un séparateur de phase. « Pour stocker du digestat en phase liquide, contrairement au digestat brut, on peut se passer d’agitateurs et des coûts en électricité et en entretien associés, déclare Romain Marqué. Avec cet argent, nous investissons dans un séparateur de phases : on gagne ainsi en volume de stockage au niveau de la fosse. Mais surtout, nous faisons ce choix pour son intérêt agronomique. Car en fonction de nos besoins, nous pourrons utiliser du digestat brut, du digestat liquide pour la fertilisation ou du digestat solide pour les amendements. Nous irons donc encore plus loin dans la maîtrise du cycle de l’azote. »

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,3 €/kg net +0,07
Vaches, charolaises, R= France 7,11 €/kg net +0,05
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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Lait Spot

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