Les conseils d’un taupier pour venir à bout des taupes

Taupinières de taupes sur prairie
Les taupes constituent généralement une galerie principale, qui entoure les parcelles. Il n'est pas rare de la retrouver directement sous la clôture de la prairie. (©Jozef)

Pour Jérôme Dormion, taupier chez Taup'Green, le piégeage est le meilleur moyen de se débarrasser des taupes sur les prairies. Mais encore faut-il trouver les galeries ! L’expert nous donne quelques astuces pour ne pas rentrer bredouille.

Le piégeage des taupes est un art en perdition. Tel est le constat dressé par Jérôme Dormion, taupier de profession. « Autrefois, il y avait un vieux qui s’y collait dans tous les villages » raconte l’expert. « Au sortir de la guerre, le taupier était payé 1 franc la taupe. Ce n’était pas grand-chose, mais il pouvait garder la fourrure ». Car à l’époque, la taupe avait la cote ! « C’est l’un des rares animaux à avoir une implantation du poil « droit » ». Une particularité qui lui permet de parcourir les galeries à rebrousse-poil sans se décoiffer ! Cette originalité la rendait très recherchée pour sa fourrure, particulièrement douce sous toutes les coutures. Et comme il fallait pas moins de 900 taupes pour faire un manteau, l’on y mettait du cœur à l’ouvrage !

Aujourd’hui, la mode est passée mais les dégâts restent. « Nous sommes à une époque où l’on commence à se réintéresser à la vie des sols, avec de plus en plus de vers de terre. Mais le revers de la médaille, c’est que les taupes aussi aiment les vers de terre ». D’autant que les renards et autres rapaces, qui sont ses prédateurs naturels, se font de plus en plus rares.

Le piège, remède infaillible

Pour le taupier, il n’y a pas débat : le piège est le remède le plus efficace. « C’est naturel, pas cher et surtout, on voit ce qu’on fait ».

Mais encore faut-il savoir où les positionner. Pour bien faire, mieux vaut s’attarder quelques minutes sur le mode de vie de l’animal. « Une galerie de taupe, c’est un peu comme une toile d’araignée » résume Jérôme. « Elle se constitue un nid, autour duquel sont organisées des galeries principales, qui donnent accès à des ramifications secondaires où elles cherchent des vers de terre ». Incapable de faire des réserves, la taupe alterne les périodes de sommeil (environ 4 h au nid) et d’alimentation (4 h également dans les galeries). On estime donc que la taupe passe près de 7 fois par jour dans les galeries principales pour rejoindre son terrain de chasse.

Il faut repérer les galeries principales

Pour les repérer, le taupier conseille tout d’abord de faire le tour des clôtures. Cette technique permet de placer les pièges dans la galerie principale. « Dans une pâture, elles quadrillent généralement la parcelle. Si vous êtes infesté, donnez un coup de bêche entre deux piquets de clôture et il y a de fortes chances pour que vous tombiez sur une galerie à 20 centimètres de profondeur ». La taupe profite alors du sol plus meuble en périphérie de parcelle pour creuser ses galeries. « Les anciens disent qu’elles sentaient les ondes des barbelés sous terre et les suivaient pour creuser ».

Une fois le tour de garde de la taupe repéré, reste à poser les pièges. « J’en mets un tous les 50 m environ » précise le taupier. Mais pas n’importe quel type de piège ! Jérôme opte pour les putanges. « C’est un piège que l’on utilisait déjà à Versailles sous Louis XIV ». Cette sorte de pince en cuivre s’écarte à l’aide d’un anneau avant d’être mise en terre. Elle se refermera alors sur la taupe lors de son passage. Attention toutefois « la taupe est myope, mais a un odorat très développé ». Mieux vaut donc mettre des gants pour partir à la chasse. « J’essaie également d’éviter l’odeur du neuf. Si le piège est rouillé, qu’il sent la terre, c’est encore mieux ». Pour faire illusion, le taupier a pris pour habitude de laisser trois mois ses pièges en terre avant de les utiliser !

Une fois glissé dans la galerie, reste à refermer le trou et mettre un marquage pour venir le relever. « Je relève mes pièges chaque semaine, mais dans 90 % des cas, elle est prise dès le lendemain ».

Il y a généralement deux taupes pour 1 000 ou 2 000 m²

Le taupier compte une vingtaine de pièges pour une parcelle d’un hectare. « Si on les place bien, on arrive à prendre 90 % des taupes ». Car si les dégâts peuvent être impressionnants, ils ne sont pas forcément synonymes d’une grande population de nuisibles. « Un individu peut faire entre 50 et 100 taupinières » détaille Jérôme. « Chez un particulier, sur 1 000 ou 2 000 m², il y a deux taupes en général ». Car les taupes sont des individus solitaires. « Elles se retrouvent généralement une fois par an pour se reproduire et font quatre ou cinq petits ». Avec ce cycle biologique, une chasse bien menée peut rapidement permettre d’éradiquer les taupes d’une parcelle.

Les autres méthodes de régulation

Si le piégeage a tant de grâce aux yeux du taupier, c’est que les alternatives se font rares. Le poison a eu son heure de gloire, avant d’être interdit sur le marché. Parmi eux, la strychnine, autorisée jusqu’en 2000. L’alphachloralose a un temps pris le relais, avant d’être interdite en 2010. « Ça reste de toute manière de produits dangereux. Avec une petite cuillère de strychnine, on pouvait tuer une vache » rappelle Jérôme. Sans parler de l’impact de ces produits sur la biodiversité.

A défaut de poison, les gammes de répulsifs se développent. Généralement olfactifs, sous forme de gaz ou granulés, ils visent à rendre les galeries malodorantes. « Et c’est vrai que la taupe a un odorat très développé » constate le taupier. Mais elle aura vite fait de fermer les galeries malodorantes, et d’en réaliser de nouvelles.

L’utilisation d’explosifs reste également possible. Une méthode que Jérôme juge dangereuse : « Si un chien, un chat ou un enfant passe, il peut se faire mal ».

Les ultrasons sont prisés des particuliers. « Ça peut fonctionner, mais ça repousse le problème de quelques mètres ». D’autant que selon Jérôme, les ultrasons auraient tendance à attirer les vers de terre qui constituent le principal repas des taupes… « Les ondes font venir les vers, un peu comme l’impact de la pluie sur le sol, qui les appelle à remonter ». Leur effet peut dont être contradictoire.

Attention au campagnol ou rat taupier

« Si les taupes sont facilement gérables, les rats taupiers sont beaucoup plus coriaces » poursuit l’expert. En cause, un cycle de reproduction beaucoup plus rapide. Avec une durée de gestation de 22 jours, et une maturité sexuelle atteinte au bout de 5 semaines, la situation peut vite virer à l’infestation. D’autant qu’une femelle peut avoir jusqu’à quatre portées par an de quatre ou cinq jeunes chacune.

Si vous avez un doute sur l’animal à l’origine des dégâts, regardez l’état des taupinières. « Elles sont beaucoup plus petites, et plus regroupées. La cheminée d’une galerie de taupe est verticale, alors que celle du campagnol est en diagonale ».

La logique de piégeage reste toutefois la même. « Ils sont moins organisés que les taupes, notamment sur la hiérarchisation des galeries, mais ils finissent par passer sur les pièges. De toute manière, ils vont partout ». Mais leur nombre peut rapidement être décourageant. « Il faut piéger tous les jours si l’on veut en venir à bout, et si l’on est vraiment infesté, difficile de se passer de poison ».

Mais une lutte efficace contre les rats taupiers commence peut être par éviter d’avoir trop de galeries de taupes sur ses parcelles. « Généralement, ils s’installent dans des anciennes galeries inoccupées » conclu Jérôme. Ainsi, même si la fourrure de taupe est moins recherchée qu’autrefois, mieux vaut rester vigilent, ne serait-ce que pour éviter à terme une invasion de campagnols.

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