« Une transmission réussie en dehors du cadre familial »

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Benoît Rozière et Caroline Carette, associés au sein du Gaec de la Borie Alte, élèvent 49 laitières sur 75 ha à Saint-Amans-des-Cots, dans l'Aveyron. Ils produisent de l'AOP Laguiole fermier et livrent la coopérative Jeune montagne de Laguiole. (© F.Ehrhard)

Benoît Rozière et Caroline Carette ont repris une petite exploitation en AOP laguiole, optimisé le pâturage et augmenté les volumes transformés à la ferme. Et, pour se diversifier, ils ont planté des pommiers en agroforesterie.

«S’installer en dehors du cadre familial, c’est possible avec du lait bien rémunéré, une petite structure qui reste transmissible et des cédants bienveillants qui ont à cœur de faciliter la transition ! », relèvent Benoît Rozière et Caroline Carette, qui ont pris le relais en deux étapes de François et Isabelle Maynier, en Gaec à Saint-Amans-des-Cots, dans l’Aveyron.

Agroforesterie :pour se diversifier,les jeunes éleveursont planté despommiers sur2 hectares de pré-verger (au fond). (© F. Ehrhard)

Après avoir travaillé au suivi qualité dans une coopérative puis appris le métier de fromager chez un producteur de saint-nectaire fermier, Benoît avait envie de revenir dans l’Aveyron et de s’installer. Le système herbager de l’appellation laguiole l’intéressait. « J’ai contacté la coopérative Jeune Montagne, qui nous a mis en relation avec François et Isabelle. Nous les avons rencontrés pour la première fois en 2013. Puis, en 2015, j’ai effectué un an de parrainage avant de m’installer en Gaec avec Isabelle, François ayant pris sa retraite », raconte Benoît. Caroline l’a rejoint en 2020 sur l’exploitation, comme salariée d’abord puis en tant qu’associée en 2023. Isabelle, elle, a pris sa retraite en 2021.

Les génisses derenouvellement dontdeux jeunes aubracs,sont logées dans uneancienne étable. (© F.Ehrhard)

Les deux jeunes éleveurs bénéficient d’un fermage pour les terres et les bâtiments. Chacun d’eux a investi 100 000 € pour acquérir des parts du Gaec, correspondant à la reprise du cheptel, du matériel et du stock de fromages. « C’est un investissement qui reste accessible pour une exploitation en ordre de marche, avec des débouchés assurés au sein d’une coopérative solide. Tout cela a rassuré la banque, qui nous a accordé sans problème des prêts », observent-ils.

Plus de lait transformé

La ferme était équipée d’un séchage en grange pour sécuriser la qualité du foin. Dans la conduite du pâturage, en revanche, il y avait une petite marge de progrès. En introduisant le pâturage tournant dynamique, Benoît et Caroline ont réussi à améliorer la qualité de l’herbe et à diminuer le concentré (voir l'encadré).

Le séchage dans la grange permet de sécuriser la qualité du foin, quifournit la base de la ration. (© F.Ehrhard)

François et Isabelle s’étaient déjà lancés dans la transformation d’une partie du lait en laguiole AOP fermier. En 2015, ils livraient 170 000 l à Jeune Montagne et transformaient 90 000 l dans un atelier de 15 m². « Aujourd’hui, nous transformons 150 000 l et nous ne livrons plus que 120 000 l », détaille Caroline. Pour augmenter les volumes tout en améliorant les conditions de travail, ils ont fait construire en 2020 une nouvelle fromagerie de 80 m², complétée par un espace d’accueil avec coin cuisine et point de vente. « Nous avons investi plus de 250 000 €, dont 90 000 € d’aides », précise Benoît. Ils produisent des fourmes de 35 kg en laguiole AOP fermier, ainsi que des fourmettes de la Viadène de 5 kg en complément. « Ce petit format convient bien aux crémiers qui ont peu de débit. Cela nous a aidés à élargir notre clientèle », relève le jeune éleveur. Les volumes ont augmenté grâce au bouche-à-oreille sans qu’ils aient à prospecter. « Le laguiole fermier est recherché par les fromagers qui veulent se différencier des supermarchés », constate-t-il.

Dans la salle de pressagedu caillé : Benoît et Caroline produisent des fourmes de 35 kg en laguiole AOPfermier, ainsi quedes fourmettes dela Viadène de 5 kg. (© F.Ehrhard)

L’affinage se fait dans une cave naturelle que François et Isabelle utilisaient déjà. « Nous avons des fromages affinés de quatre à six mois, et des fromages plus mûrs de neuf à quatorze mois. Il y en a ainsi pour tous les goûts », souligne Caroline. 30 % de ces fromages sont vendus à la ferme et sur les marchés, 60 % à des épiceries et crémeries de l’Aveyron et 10 % à des crémeries hors département. En direct, ils vendent leurs fromages entre 14,90 et 17,50 €/kg, en fonction de la taille et de la durée d’affinage. « Pour faire face à la hausse des coûts, nous avons augmenté nos prix de 10 % en un an, en deux fois. Nos clients l’ont bien accepté », relève l’éleveuse. La coopérative, elle, a rémunéré leur lait, hors ristournes, 542 €/1 000 l en 2021 et 546 €/1 000 l en 2022 . « Les prix augmentent un peu tous les ans, c’est rassurant », note Benoît.

Une bonne équipe

Du côté des dépenses, le poste principal reste celui des salaires et charges. Afin de garder du temps libre pour leurs trois enfants de 4, 6 et 8 ans, Benoît et Caroline font appel à cinq personnes pour les aider. Guillaume travaille à temps plein sur les cultures, la traite et les soins aux animaux avec Benoît. Il assure également des remplacements pour des week-ends ou des vacances. Rémi, lui, aide Benoît et Caroline à la transformation deux jours par semaine. Sankoun, l’apprenti, participe aux soins des animaux et à la traite. Évelyne, la mère de Benoît, assure le marché hebdomadaire de Rodez. Et Anthony, employé en groupement, intervient deux jours par mois. « Nous avons constitué une bonne équipe », relèvent les deux éleveurs. En 2021-2022, l’EBE a atteint 88 000 €. « En 2022-2023, nos achats de foin ont doublé du fait de la sécheresse. Mais l’installation de Caroline, qui n’est donc plus salariée, va alléger les charges salariales. Et nous allons également récupérer une part Pac de 10 000 € », note Benoît. Avec ces bons résultats économiques, les voyants sont au vert. La qualité de leurs fromages est reconnue. « Nous venons d’obtenir une médaille d’argent au Concours général de Paris pour notre laguiole fermier », se félicite Caroline. Et la demande se maintient bien à la ferme, sur le marché de Rodez comme chez les crémiers.

Pour la vente directe, les éveveurs ont investi dans une nouvelle fromagerie et un espace d’accueil et de dégustation. (© F.Ehrhard)

Pour se diversifier sans avoir à s’agrandir, les deux éleveurs ont opté pour l’agroforesterie. « Début 2020, nous avons planté 140 pommiers sur deux hectares de pâture », indique Benoît. Ils prévoient de faire presser leurs pommes en prestation, pour ne pas rajouter de travail. « Nous vendrons ainsi des jus en complément de nos fromages », relève Caroline. Ils envisagent également d’investir dans un bâtiment de stockage plus grand, couvert de panneaux photovoltaïques afin de produire de l’électricité. « Ce serait une autre façon de partager les risques et de compléter le revenu. »

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

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