La FNPL prête pour un monde nouveau

Se sentir pousser des ailes, quoi de plus normal quand la conjoncture est bonne, les prix orientés à la hausse ? C'est donc une FNPL décomplexée qui s'est présentée à Pontarlier (Doubs) pour son 70e congrès. « Nous quitterons les quotas laitiers sans regrets », a osé le président Thierry Roquefeuil. Il développera dans son discours de clôture : « Et si la fin des quotas était une chance pour l'Europe... Nous sommes prêts à entrer dans ce nouveau monde. Nous voyons nous aussi les perspectives qu'offre un marché mondial en expansion. »

Il est vrai que l'économie laitière mondiale a changé avec de nouveaux marchés sur les pays émergents qui donnent le tournis. L'Océanie n'est plus un concurrent inaccessible et les régions compétitives d'Europe du Nord axent leur développement sur ce grand export. Ce serait même du pain béni pour les zones plus fragiles : « Avec cette stratégie, la pression concurrentielle entre les bassins de production va se desserrer sur le marché intérieur », analysent les économistes. Un vent d'optimisme donc, où les questions de régulation de marché n'ont pas vraiment fait débat. Thierry Roquefeuil a bien rappelé que la FNPL portait un dispositif anticrise (aides aux éleveurs qui baissent leur production).

Mais face à l'opposition farouche de l'Europe du Nord, qui peut encore y croire ? « Nous avons quelques incertitudes pour 2015-2016, mais nous parlons ici de volatilité, pas de crise. Sur le long terme, nous sommes très optimistes », a rappelé l'invité néerlandais. « C'est de l'économie d'entreprise de savoir gérer les hauts et les bas du marché », a rassuré Katrine Lecornu, présidente d'European Dairy Farmer (EDF). Dont acte !

Une contractualisation mal ficelée

Ce dont auraient besoin les producteurs de lait français, c'est d'un peu plus de confiance et d'information de la part des transformateurs, d'ambition aussi. Comme le vivent leurs homologues allemands, danois ou néerlandais où, il est vrai, le modèle coopératif domine.

C'est loin d'être le cas en France et à Pontarlier. L'absence des transformateurs dans les débats en dit long. « En tant que productrice, si je ne crois pas dans ma filière, je ne prends aucun risque, je ne relève pas les défis de demain », avertit Katrine Lecornu. La filière française se trouve aujourd'hui empêtrée dans une contractualisation mal ficelée où il est difficile d'imaginer quels pouvoirs auront les producteurs pour parler prix et volumes dans leurs OP verticales. « Mon ambition est de provoquer la mobilité des producteurs face à leurs entreprises. Remettre de la concurrence à l'amont en s'appuyant sur des OP territoriales », a lancé Thierry Roquefeuil.

Début avril, la FNPL propose un rassemblement des OP, « une sorte d'états généraux » pour parler projet mais aussi complémentarité avec le syndicalisme. Quelles ambitions émergeront ? Certains acteurs estiment qu'il faut aller jusqu'au bout et s'engager dans des OP commerciales, seules capables de redonner du pouvoir à l'amont. La présence du congrès dans le pays du comté, filière vertueuse s'il en est, grâce à l'engagement économique des producteurs, sera peut-être de bon augure.