LES FROMAGES BAS-NORMANDS SOUS AOP SE CHERCHENT ENCORE

Benoît Duval, 41 ans, est président depuis 2009 de l'Union des associations de producteurs pour la défense des AOP camembert de Normandie, pont-l'évêque et livarot (650 producteurs). Les trois AOP ont révisé leur cahier des charges en 2007, 2008 et 2010, basé sur l'herbe et, en 2017, sur 50 % de vaches normandes en AOP camembert et pont-l'évêque et 100 % en livarot. Avec ses trois associés, Benoît Duval conduit 120 normandes sur 55 ha pâturés et 25 ha de maïs. Il est aussi président de l'OP Gill
Benoît Duval, 41 ans, est président depuis 2009 de l'Union des associations de producteurs pour la défense des AOP camembert de Normandie, pont-l'évêque et livarot (650 producteurs). Les trois AOP ont révisé leur cahier des charges en 2007, 2008 et 2010, basé sur l'herbe et, en 2017, sur 50 % de vaches normandes en AOP camembert et pont-l'évêque et 100 % en livarot. Avec ses trois associés, Benoît Duval conduit 120 normandes sur 55 ha pâturés et 25 ha de maïs. Il est aussi président de l'OP Gill (©)

Les producteurs sous AOP camembert, pont-l'évêque et livarot veulent une véritable valorisation de leurs efforts. Ils défendent un prix du lait déconnecté des aléas des marchés, associé à une maîtrise des volumes.

En quoi les trois AOP fromagères bas-normandes sont-elles bousculées par la suppression des quotas ?

Benoît Duval : Un fossé risque de se creuser entre les producteurs sous appellation et ceux qui ne le sont pas. Jusqu'en mars, les six cent cinquante de la filière camembert de Normandie, pont-l'évêque et livarot bénéficiaient des mêmes conditions d'accès à des surplus de volumes. Les choses changent. Leurs collègues non AOP ont aujourd'hui des volumes supplémentaires pour satisfaire les marchés mondiaux. Les trois AOP ont un positionnement différent. Elles ne souhaitent pas une course aux volumes. Elles rayonnent sur le marché national en offrant aux consommateurs un produit de qualité, lié au terroir. Nous voulons produire en fonction de notre marché. Si les producteurs sous AOP jugent leurs efforts pas assez rémunérés et si, parallèlement, ils constatent qu'ils n'ont pas - ou moins - de volumes en plus, une partie jettera l'éponge.

Justement, votre union des producteurs AOP vise une prime de 50 €/1 000 l en 2017. Où en êtes-vous ?

B.D. : Effectivement, en contrepartie d'une maîtrise des volumes, nous demandons une évolution progressive de la prime, à raison de 5 €/1 000 l chaque année. En 2014, elle est passée à 35 €. Cette année, seul Lactalis joue le jeu avec 40 €. Ils sont ajoutés au prix de base calculé classiquement à partir des indicateurs de marchés. Il faut aller plus loin en déconnectant le prix du lait AOP du prix conventionnel. Créons nos propres indicateurs qui nous libéreront de la volatilité des marchés mondiaux. Le Comité national des appellations d'origine y travaille. Dans l'Orne, l'initiative de la fromagerie Gillot peut alimenter cette réflexion. En accord avec l'OP Gillot AOP pour apporter de la stabilité, un prix de base annuel minimum de 340 €/1 000 l, garanti sur quatre ans, est appliqué depuis le 1er janvier. Il compte pour 50 % dans le calcul du prix de base mensuel. Les 50 % autres sont obtenus à partir des indices Cniel.

Vous prônez la maîtrise des volumes mais est-elle véritablement en place ?

B.D. : C'est l'autre enjeu de notre filière qui n'est pas assez structurée. Quatre OP ont été créées en 2013 liées aux principales entreprises (Réaux, Graindorge, Gillot et Lactalis), mais en moyenne, 65 % des producteurs y sont adhérents. Leur création ne s'est pas accompagnée de la signature de contrats-cadres permettant la gestion des volumes. Certes, les entreprises informent les OP de leurs besoins mais elles ne les associent pas à l'attribution des nouveaux volumes. En fait, via l'union, depuis plus de dix ans, les producteurs essaient d'avoir une négociation collective avec elles. Ils n'y arrivent pas. La seule solution est une association d'OP (Asop). Elle permettra un contrat-cadre pour la filière, signé entre l'Asop et les fromagers. La réglementation le permet. Je comprends la réticence de certains producteurs qui craignent une relation moins privilégiée avec leur laiterie. Soyons solidaires. Jouons la carte du collectif. Nous pourrons mieux affirmer nos convictions.

La plainte de camembert de Normandie est annulée pour vice de forme. Une autre sera-t-elle déposée ?

B.D. : L'organisme de défense et de gestion a déposé une plainte en 2012 pour usurpation de notoriété contre les entreprises qui vendent des camemberts avec la mention « fabriqué en Normandie ». Il s'est fait débouter fin 2014 pour une erreur de signature. Le « fabriqué en » empêche l'AOP de se développer (5 100 t en 2014 ). Déposer une nouvelle plainte est donc sur la table. L'autre solution serait une indication géographique protégée pour cette filière. Cela ne sera pas possible sans un minimum d'herbe et de normandes dans les troupeaux. Aux éleveurs normands d'être fiers de leur travail. La réflexion débute.

PROPOS RECUEILLIS PAR CLAIRE HUE

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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