Dans la Manche, premier département laitier français, les exploitations laitières spécialisées continuent de se développer. Elles ont augmenté les livraisons de près de 17 000 l en 2013. Elles progressent encore de 38 000 l dans les 1 053 clôtures comptables compilées en 2014 par CERFrance Manche. « À surface et main-d'oeuvre équivalentes, le troupeau s'est accru de 3 vaches pour atteindre 71 laitières et le niveau de production de 200 litres, obtenus par une consommation supplémentaire de concentrés de 100 kg/vache, ce qui ne représente pas une économie d'échelle importante », détaille Karine Marie, directrice du conseil de CERFrance Manche. Cela a un effet sur les charges opérationnelles de + 6 000 €, dont + 4 000 € d'aliments et + 1 000 € de frais vétérinaires et d'élevage. Parallèlement, avec un prix du lait en hausse de 45 €/1 000 l, le produit lait augmente de 30 000 €. « Deux tiers sont imputables à l'effet volume, un tiers à l'effet prix. » Cette conjoncture très favorable est amoindrie par la baisse du produit viande et du montant des DPU de 4 000 € chacun. Malgré tout, l'EBE s'améliore de 20 000 €, de quoi, une fois n'est pas coutume, avoir un prix d'équilibre inférieur au prix du lait : 379 €/1 000 l contre 392 €/1 000 l. Autre bonne nouvelle : le nombre de situations saines s'améliore de 4 % (47 %), celui des situations fragiles recule de 5 % (30 %).
Avoir trois mois d'avance
Mais « derrière cette bonne année 2014 se cache un problème de fond sur la trésorerie », alerte Karine Marie. La marge de sécurité positive 2014 (ci-contre) ne renfloue pas celles négatives de 2013 et 2012. Elle s'inquiète tout particulièrement pour les exploitations les moins performantes. Les clôtures comptables de décembre 2014 la donnent à - 7 000 €. « Pour ces exploitations, mais aussi pour celles dans la moyenne, la baisse actuelle du prix du lait est compliquée à gérer, d'autant plus que les banques n'accordent pas facilement d'ouverture de crédit. » La baisse du montant des DPU de 2 000 à 3 000 € accentuera les choses. « Il faut encore améliorer la technicité pour consommer moins d'intrants et surtout viser au moins trois mois d'avance de trésorerie pour faire face aux fluctuations des marchés, insiste Karine Marie. La moyenne est aujourd'hui à deux mois. »
Selon elle, la tendance à autofinancer l'augmentation de la production sans conserver une épargne pour les coups durs contribue à cette fragilisation.
CLAIRE HUE
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