En juillet dernier, après dix-sept ans d'enquête, les juges chargés de l'instruction décidaient d'un non-lieu dans le procès au pénal sur la maladie de la vache folle. Cet empoisonnement qui a causé vingt-sept décès en France n'aura donc pas de coupables. C'était le thème majeur de l'assemblée générale du collectif Vérité ESB. Cette association d'éleveurs, victimes de la maladie sur leur troupeau, s'est créée en 2000 au pic des cas de vaches folles en France, à l'initiative d'un producteur de lait vendéen : Paul Vieille.
Alors qu'une certaine omerta régnait dans les campagnes, tous voulaient comprendre pourquoi leurs animaux avaient été empoisonnés. Avec le soutien d'un scientifique indépendant, le docteur Jean-Louis Thillier, immunopathologiste, spécialiste des maladies à prion, le collectif avait réussi en 2002 à obtenir l'arrêt de l'abattage total, un véritable gâchis dans la gestion de cette crise par les autorités sanitaires. Quinze ans plus tard, la crise de la vache folle est presque oubliée. Elle n'intéresse plus les grands médias. Mais ceux qui l'ont vécue dans leur troupeau en gardent un souvenir douloureux. Pressions, fausses accusations ont créé des traumatismes que le déni de justice réveille aujourd'hui. « Impossible d'établir un lien de causalité entre les victimes de l'ESB et la consommation de viande », ont estimé les juges d'instruction.
Les aliments pour veaux étaient responsables
« Ce procès n'a pas eu lieu car une accumulation de dissimulations et de contrevérités, véhiculées par certains conseillers scientifiques, l'en a empêché, affirme Jean-Louis Thillier. Les juges ont persisté à chercher des boucs émissaires au lieu de mener leur instruction du côté des véritables décideurs : l'État français et les gouvernements à l'origine des directives. » Ainsi les enquêtes ont porté sur l'importation frauduleuse de farines animales ou de viandes anglaises alors qu'il est démontré que les farines utilisées dans les aliments pour laitières n'ont jamais transmis l'ESB et la viande bovine n'est pas contaminée par le prion. Ce sont les corps gras, utilisés comme liants dans les granulés pour veaux et dans les lactoremplaceurs, qui empoisonnaient les jeunes ruminants entre 0 et 8 mois, seule période de sensibilité au prion par voie alimentaire. Qu'aurait-on appris d'un procès ? « Que l'état des connaissances permettait dès 1991, premier cas d'ESB en France, de prendre toutes les mesures pour protéger les consommateurs », assure Jean-Louis Thillier.
Il a fallu attendre le 10 août 2001 pour interdire les graisses animales utilisées dans les aliments pour jeunes bovins et les viandes séparées mécaniquement à partir d'os (pour la fabrication des saucisses) susceptibles d'être contaminées. Les « experts » de l'époque se sont enfermés dans de fausses hypothèses, comme la contamination croisée entre aliments pour bovins, porcs ou volailles. Des arguments qui servent encore à pointer le rôle de l'éleveur, alors que c'était bien le recyclage par l'équarrissage des matériaux à risques qui empoisonnait les jeunes veaux.
« On n'en a pas fini avec les maladies à prion. Un Britannique sur 2 000 est en incubation. Les formes sporadiques d'ESB existent toujours et le risque de transmission d'une maladie neurogénératrice à l'homme pour les tremblantes du mouton est hautement probable », assure Jean-Louis Thillier.
DOMINIQUE GRÉMY
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