N
ous sommes au bout du bout du supportable », annonce d'entrée Jean-Pierre Fleury, président de la FNB, lorsqu'il évoque les revenus des producteurs de viande bovine. La dégradation de leur situation économique s'est encore accélérée en 2014. Le revenu par actif a été mesuré à 14 500 , soit 40 % en deçà de la moyenne avec, à la clé, des difficultés de trésorerie importantes. À tel point que le ministère de l'Agriculture a lancé un audit pour jauger la gravité de la situation. En cause, une rémunération insuffisante du produit. Les chiffres sont sans appel : en vingt ans, les prix à la production ont progressé de 12 % quand les prix à la consommation augmentaient de 62 %. Durant cette même période, les coûts intermédiaires des producteurs se renchérissent de 50 %. Ceux-ci ont pourtant amélioré leur productivité de 2,5 % par an en moyenne. « Le contexte est sérieux, c'est la rentabilité de notre secteur qui est en jeu. »
La baisse des cours de gros bovins, initiée en 2013, s'est amplifiée en 2014. Pour la FNB, cette baisse généralisée est avant tout le résultat d'une pression délibérée de l'aval, entraîné dans une course aux prix bas qui déstabilisent l'ensemble du secteur. Bien sûr, la grande distribution avec ses promotions aberrantes est montrée du doigt.
« Personne ne respecte notre produit »
« Cette guerre des prix n'a aucun sens. Elle nous amène dans une spirale déflationniste sans qu'il se vende un kilo de viande de plus. » Avec une baisse de consommation de 3 % sur les viandes de découpe, la FNB propose d'enclencher une reconquête du marché intérieur avec comme stratégie l'amélioration de la qualité. « Aujourd'hui, personne ne respecte notre produit. Les opérateurs appellent cela du minerai. Les durées de maturation ne sont pas respectées. Il faut que l'aval engage un sursaut qualitatif dans le process des viandes. Une segmentation avec des gammes mieux identifiées peut être une solution pour sortir de la guerre des prix, mais c'est la qualité du produit de base qui doit d'abord s'élever », insiste Jean-Pierre Fleury.
La mise en avant des viandes françaises dans la restauration hors domicile est un autre combat. Le constat est sans appel : la viande bovine servie hors domicile est entre 70 et 90 % d'origine étrangère, dans les cantines ou en restauration commerciale. Un travail positif a été engagé par les pouvoirs publics pour tenter d'inverser la tendance. Comme pour le lait, toutes les expertises confirment que la demande mondiale de viande bovine sera en forte croissance ces prochaines années, notamment dans les pays émergents. Comment la filière française pourrait-elle profiter de ces marchés dont certains sont à nos portes (pourtour méditerranéen) ? Sans vouloir concurrencer les segments les plus bas, nos jeunes bovins de races allaitantes pourraient trouver des créneaux en valorisant leurs spécificités. La FNB attend donc une structuration de la filière pour ce grand export de façon à faire émerger des flux commerciaux. « Aujourd'hui, les pays tiers sont une part minoritaire de nos débouchés. Mais ils peuvent constituer progressivement un relais de croissance dont la filière française a bien besoin pour compenser l'érosion des exportations dans l'UE », note la FNB.
DOMINIQUE GRÉMY
L’Europe cède sa place à l’Amérique du Sud sur le marché des broutards au Maghreb
« J’ai opté pour un système très simple car c’est rentable »
Réformer ou garder ? 26 éleveurs dévoilent leur stratégie de renouvellement
Le vêlage 2 ans n’impacte pas la productivité de carrière des vaches laitières
FCO : le Grand Ouest en première ligne
« Pas d’agriculture sans rentabilité ! », rappelle la FNSEA
Quelles implications environnementales de la proposition de l’UE pour la Pac ?
L’agriculture biologique, marginalisée d’ici 2040 ?
Pourquoi la proposition de budget de l’UE inquiète le monde agricole
Matériel, charges, prix... Dix agriculteurs parlent machinisme sans tabou