Jusqu'alors, cette coopérative de collecte vendait une partie de ses laits de vache et de brebis à des laiteries locales, françaises et espagnoles, en vertu de quelques accords. Le reste partait sur le marché Spot. Soumis à la volatilité de ces marchés et ses clients annonçant une baisse de leurs achats, les cent trente associés coopérateurs ont décidé d'écrire eux-mêmes leur avenir. Une augmentation de capital de 24 % a permis à la coopérative d'investir, en 2013, dans une laiterie de 4,8 millions d'euros. Le soutien de la communauté de communes a financé le bâtiment (1,1 million d'euros). Les adhérents ont également accepté un différé de paie de quatre mois pour faciliter sa trésorerie. « Alors que la collecte de lait se délocalise en plaine, nous avons fait le chemin inverse », ironise Jean Mollon, vice-président et éleveur vacher. En effet, la laiterie est installée à la frontière espagnole, dans la vallée des Aldudes, alors qu'aucune de ses fermes ne s'y trouve. « Nous avons privilégié les synergies plutôt que la bataille concurrentielle », ajoute-t-il.
Dans cette vallée, la pisciculture et l'élevage en plein air de porcs kintoa sont en développement. Les éleveurs porcins se fournissent ainsi gratuitement en petit-lait. Thierry Bamas, champion du monde de desserts glacés, a des vues sur le terrain d'à côté. Des pâtissiers ont sollicité la coopérative pour la fabrication d'un beurre local, qui leur faisait défaut. Bref, une vallée certes excentrée, mais dynamique du point de vue gastronomique, avec une identité basque distinctive sur laquelle ils savent jouer. Bien que le lait de brebis soit en AOP (ossau-iraty) et le lait de vache certifié Bleu-Blanc-Coeur, le marché des fromages à pâte pressée s'annonçait trop concurrentiel pour un nouvel opérateur. L'étude de marché a révélé une demande insatisfaite en fromage lactique. Ils ont donc investi dans deux lignes de production : l'une en pâte pressée et l'autre lactique.
Ces fabrications, testées depuis janvier, ont reçu un très bon accueil, notamment auprès des restaurateurs, depuis leur mise sur le marché en juin. En huit mois, pour 130 t de pâte molle lactique, 50 t de pâte pressée sont déjà sorties de la fromagerie. Quant au lait demi-écrémé, coproduit du beurre, il est embouteillé à l'extérieur pour être vendu en grande distribution.
À court terme, pas de nouveaux adhérents possibles
Autant de synergies qui, ils l'espèrent, leur permettront de transformer, dans deux ans, l'intégralité de leur lait de brebis (2,6 millions de litres) et d'ici à trois ans, de vache (5,5 millions de litres). « Nous avons préféré prendre les devants pour assurer la pérennité de nos exploitations laitières », conclut Jean Mollon.
À court terme, la coopérative ne pourra pas se permettre d'accueillir de nouveaux adhérents, mais si elle peut déjà maintenir un tarif intéressant et son volume, les associés seront fiers de leur indépendance.
NADIA SAVIN
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