Broutards vaccinés : jusqu’à 300 € d’écart avec les animaux de zone indemne

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Engraissement de broutards charolais et aubrac
La logistique autour des mouvements d'animaux issus des anciennes zones réglementées complexifie les échanges. (©Terre-net Média)

Laurent Bonier, éleveur et négociant de bestiaux sur l’ancienne zone réglementée des deux Savoies reprend timidement le commerce de vif dans la zone. Si les échanges sont de nouveau possibles avec l’Italie, les broutards vaccinés contre la DNC sont dévalués par rapport aux animaux de zone indemne. Même constat pour les veaux issus de mère vaccinée, qui affichent un écart de 150 € avec ceux du reste du pays.

Le 8 décembre, l’Italie a ouvert ses portes aux bovins issus des zones vaccinales DNC des deux Savoies. Après cinq mois d’arrêt, l’activité commerciale reprend timidement pour Laurent Bonier, éleveur et négociant de bestiaux. Spécialisé dans la repousse de broutard, il gardait pas moins de 200 broutards en ferme depuis le 29 juin. Si le marchand entrevoit le bout du tunnel, le marché reste complexe. « Un premier camion de 47 têtes est parti la semaine dernière. Mais c’est très compliqué », souffle-t-il.

La priorité : faire partir les plus gros animaux pour avoir de la place pour les veaux de l’année. Car dans l’étable, les broutards sont plus que repoussés : « on est sur des animaux de plus de 600 kg ».

Une logistique complexe

La manœuvre reste complexe. Sur le plan réglementaire d’abord : « il faut réaliser des PCR sur les lots et envoyer les numéros des animaux à la DDTT ». Mais la subtilité réside dans les délais, « le PCR est valable 5 jours, la DDTT doit être prévenue dans les 48 h. Reste à trouver une bétaillère de dispo sur ces créneaux », résume Laurent. Vient ensuite l’aspect financier : « le prix du broutard vacciné s’est effondré », regrette le négociant. Compter 250 € de moins qu’un animal équivalent hors zone vaccinale. « À ce prix-là, on couvre à peine les frais d’élevage », tranche-t-il. « Les Italiens les achètent parce qu’ils ont besoin de marchandise, mais au fond, ils ont peur ». Acheter un bovin de zone vaccinale n’est pas une sinécure. Parmi les contraintes, l’acheteur s’engage à réaliser une quarantaine de 28 jours.

Les gabarits ne sont pas non plus dans les standards de la repousse. En zone vaccinale, les veaux de printemps cohabitent avec les veaux de l’automne dernier. « Il y a une très grande hétérogénéité dans la marchandise. On voit parfois des broutards d’un an assez légers, quand les éleveurs n’avaient pas de quoi les repousser davantage. D’autres ne sont plus très loin de la finition… ». Un marché anarchique qui ne colle pas forcément aux besoins des engraisseurs.

On parle de prix sans savoir comment seront écoulés les animaux

Les premiers départs permettent toutefois à la machine de se dégripper. Mais la visibilité reste toute relative. « Je ne sais pas si je vais continuer la repousse », lance Laurent. En toile de fond : la peur de se retrouver de nouveau coincé avec des broutards. « Pour l’instant, les animaux sont vaccinés, mais on ne sait pas trop comment ça va se passer au printemps. S’il faudra revacciner, ou même s’il y aura une reprise de la maladie ». Sans repousse, c’est toute la filière qui est déstabilisée. « Dans les Savoies, les fermes sont de taille moyenne. La repousse est une phase essentielle pour créer des lots homogènes pour l’export ». Difficile de remplir des bétaillères complètes au sortir des fermes.

Sur le terrain, les jeunes broutards vaccinés (300 kg vif) se vendent environ 300 € moins chers que les broutards de zone indemne. « C’est très difficile de s’engager sur des prix », insiste le négociant, qui regrette la naissance d’un marché à deux vitesses. « On parle de prix sans savoir comment seront écoulés les animaux. Le plus simple est de privilégier l’engraissement en France, mais il faut trouver les débouchés ». Dans la zone, la plupart des places de marché sont fermées. Impossible pour les éleveurs de confronter l’offre à la demande.

Le veau laitier dévalué

Le marché des veaux laitiers est également déboussolé. La voie traditionnelle de l’export vers l’Espagne est fermée sans perspective de réouverture, et « il n’y a plus de place en zone vaccinale », poursuit le marchand. La seule solution reste d’envoyer les veaux en zone indemne.

Encore une fois, la logistique est complexe. « Un laissez-passer de la DDT doit attester qu’il s’agit de veaux issus de mère vaccinée ». Une contrainte qui demande beaucoup d’organisation pour les marchands comme les éleveurs.

Reste ensuite à trouver les partenaires. Et là, « personne ne se presse ». Les engraisseurs ont peur de la maladie. « Pour faire partir des veaux, il faut faire des concessions sur les prix ou avoir des relations historiques avec son marchand ». Côté prix, compter 150 € de moins que pour un veau de zone indemne.

Au-delà des prix, de nombreuses questions de protocole restent en suspens. « Actuellement, on ne peut commercialiser que les veaux issus de mère vaccinés. Mais la vaccination de la mère n’est valable que six mois pour la vente des veaux ». L’échéance va vite arriver : revacciner les mères, vacciner les veaux ? Le marchand est en attente des nouvelles directives sanitaires.

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Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,53 €/kg net =
Vaches, charolaises, R= France 7,34 €/kg net =
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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