Dossier Article 3 / 5

Mieux gérer la santé de la mamelle

©C. Faimali

Mieux gérer la santé de la mamelle

Améliorer la compréhension et l'origine des sources d'infections de la mamelle permet de réduire l'usage des antibiotiques, de garder plus longtemps ses vaches et de renforcer l'efficacité des traitements.

« Des bactériologies à la ferme pour ne plus traiter à l’aveugle »

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Laurent Lux. « Nous n’utilisons plus d’antibiotiques à l’aveugle, tant que le résultat de l'analyse bactériologique n’est pas arrivé. " (©Jérôme Pezon)

Face à une mammite clinique peu sévère, l’EARL Lux a choisi l’analyse bactériologique systématique. Malgré un manque de recul pour parler d’économie de traitement, l’outil Mastatest a permis d’identifier des pistes de progrès.

À la suite d’une réunion d’information organisée localement en Alsace par le BTPL, les membres de l’EARL Lux (Bas-Rhin) ont décidé d’installer l’outil Mastatest, de la société Vétoquinol, conçu pour réaliser des analyses bactériologiques et des antibiogrammes directement à la ferme. « Historiquement, le troupeau a été confronté à une dérive des comptages cellulaires qui nous a sensibilisés à ce problème. Lorsqu’on nous a proposé de participer à un essai sur le traitement ciblé pendant un an, nous avons été séduits par le fait d’utiliser le bon traitement, afin d’être le plus efficace possible tout en réduisant l’utilisation des antibiotiques », expliquent Céline et Laurent.

Prévenir l’échauffement d’une litière à risque

Ici, les 150 vaches sont conduites en zéro pâturage, dans le contexte d’une forte pression foncière et d’une SAU limitée à 35 ha. Le système fourrager est donc complété par l’achat annuel de maïs grain et d’une centaine d’hectares d’herbe sur pied. Ainsi, la ration de base du troupeau VHP se compose de près de 70 % d’ensilage d’herbe, du maïs ensilage et du Pollen, un mélange de coproduits humides ensilés (voir L’Éleveur laitier d’octobre 2018). Datant de 2009, la stabulation est ouverte sur les deux pans principaux, avec des filets brise-vent amovibles, et équipée de brasseurs d’air. Un environnement bien ventilé, pensé pour optimiser l’ambiance vis-à-vis du stress thermique, mais qui doit aussi contribuer à la santé de la mamelle en prévenant la montée en température de la litière : les logettes creuses sont rechargées avec la phase sèche du lisier issu du séparateur de phases. « Avec ce mode de couchage, il s’agit d’être très vigilant par temps humide, en surveillant que cette litière ne chauffe pas. » En salle de traite (TPA 2 x 10 postes), le protocole d’hygiène à deux trayeurs est le suivant : pré-trempage des trayons avec un produit moussant ; lavettes individuelles mises à tremper dans une eau tiède savonneuse et passées à la machine à laver après chaque traite ; tirage des premiers jets systématique ; post-trempage avec une solution iodée. Ex-salariée du contrôle de performance, Céline a aussi mis en place, en salle de traite, un pistolet pour pulvériser du peroxyde d’hydrogène dans les manchons trayeurs entre chaque vache, y compris saines. Un équipement prévu pour réduire les risques de contaminations croisées, à savoir les infections liées au contact des équipements de traite d’une vache à une autre.

Couchage. Logettes creuses. Elles sont rechargées deux fois par semaine à l'aide d'un godet désileur avec la phase sèche du lisier du jour et ébousées manuellement matin et soir. (© JP)

Grâce à ce souci du détail, l’exploitation s’affiche, cette année encore, au palmarès du challenge qualité du lait de sa coopérative : soit une moyenne de 210 000 cellules au contrôle laitier et de 200 germes butyriques. « L’investissement dans le pistolet à peroxyde a largement contribué à améliorer la situation cellulaire. Concernant la prise en charge des mammites peu sévères, l’injection en première intention d’un antibiotique à large spectre s’accompagnait de bons taux de guérison, mais nous avions la volonté d’aller plus loin en ciblant mieux les traitements. » Ainsi, l’analyseur Mastatest est en route depuis le mois de septembre. Dans la pratique, face au constat d’une mammite clinique peu sévère, les éleveurs font désormais un prélèvement pour analyses systématique : « C’est-à-dire en présence de grumeaux dans le lait, d’un quartier un peu enflé ou rougi. Nous prenons aussi toujours la température de la vache. Si elle a de la fièvre, c’est alors le signe d’une mammite sévère et nous sollicitons au plus vite le passage du vétérinaire. Mais, dans tous les cas, nous faisons une injection d’un anti-inflammatoire (Tolfine) dans l’attente de sa venue ou des résultats d’analyse. »

Moins de cinq minutes par vache

L’échantillon est prélevé sur le quartier concerné, voire sur plusieurs en cas de doute, mais sans les mélanger. Pour ne pas contaminer l’échantillon, les trayeurs suivent des règles d’hygiène strictes : bien se laver les mains, laver les trayons avec une lingette, et ensuite insister sur le nettoyage du sphincter avec une lingette désinfectante ; le tube à essai lors du prélèvement est bien penché, presque à l’horizontal, de manière à faire entrer le lait en évitant de faire tomber des souillures dedans. Il est ensuite mis au réfrigérateur, après avoir renseigné au marqueur sur le tube le numéro de la vache et le quartier concerné. « L’opération ne prend pas plus de cinq minutes par vache, pas plus que de poser un intramammaire. Nous profitons d’avoir un frigo dans la laiterie, mais ce n’est pas indispensable, puisque nous lançons l’analyse dès la fin de la traite. »

Les résultats d’analyse bactériologique et d’antibiogramme sont transmis par courrier électronique aux éleveurs et au vétérinaire en moins de vingt-quatre heures. Dès réception, leur vétérinaire transmet par message aux éleveurs le protocole de soins adapté à la bactérie en cause (voir l’encadré ci-contre). « Nous avons la chance d’avoir un cabinet vétérinaire très impliqué et réactif. Depuis la mise en route de l’appareil, nous n’avons eu qu’un seul résultat inexploitable, en raison de la présence de sang et une autre fois un lait trop grumeleux pour pouvoir faire un échantillon. »

Connexion. L’analyseur est un boîtier fermé, conçu pour les élevages qui n’ont pas les mêmes conditions stériles qu’un laboratoire. Il est installé à l’abri au domicile des éleveurs, « car il faut une bonne connexion internet ». Après la traite, l’échantillon est placé dans une cartouche (17 €/cartouche) et le test est lancé. Quatre tests peuvent être lancés. simultanément. Les résultats sont transmis par courrier électronique aux éleveurs et au praticien. (© JP)

Après quatre mois d’utilisation, la connaissance des agents pathogènes permet de mieux connaître le profil infectieux du troupeau : mixte à dominante environnementale. Ces observations ont d’ores et déjà amené à prendre des mesures préventives : intégrer de la chaux éteinte à la litière des logettes pour hygiéniser le couchage ; en salle de traite, pour casser la dynamique des cellules, alterner les produits de post-trempage avec une solution moussante à base de dioxyde de chlore lors de périodes plus à risque par temps humide ; mais aussi soutenir l’immunité des animaux lors des phases de transitions par des apports complémentaires en oligo-éléments et vitamines. « Il est encore trop tôt pour parler de réduction de l’usage des antibiotiques, d’autant plus qu’entretemps il a fallu faire face à la FCO. Mais l’analyse systématique nous aide à progresser en nous amenant à ne plus traiter à l’aveugle dans l’optique de mieux faire vieillir les vaches. »

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Vaches, charolaises, U= France 7,3 €/kg net +0,07
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