Théo Joyeux, 20 ans, a découvert l'agriculture au collège, au contact d'un copain dont le père était céréalier. À l'époque, il sait déjà qu'il préfère les métiers manuels, où « on ne reste pas assis toute la journée sur une chaise ». Et qu'il aime les animaux. Mais entre maçon, vétérinaire rural et éleveur, il ne sait pas quelle voie choisir. Qu'importe, il ne fera pas qu'un stage de 3e, mais trois ! Celui dans un élevage laitier du Gâtinais sera « le déclic » qu'il attendait pour se décider.
« Les longues études pour devenir véto, ainsi que le fait de voir toute la journée des bêtes malades et les difficultés de certains agriculteurs, me faisaient un peu peur », confie le jeune homme qui se souvient que son attrait pour l'agriculture pourrait remonter plus loin que l'adolescence, la mère lui ayant raconté qu'il jouait souvent "au fermier" étant enfant, même s'il n'en côtoyait pas en vrai. Des week-ends et des vacances à la ferme, il commencera à en passer après avoir rencontré son maître de stage de Bac pro.
Ne pas rester toute la journée assis sur une chaise.
« Avoir un bagage suffisant pour pouvoir rebondir »
Avant de rentrer au lycée, parce qu'il ne connaît pas le milieu agricole, Théo se renseigne alors sur les différentes formations possibles pour devenir agriculteur, éleveur plus précisément. « Pour avoir un bagage suffisant et rebondir, voire me reconvertir, au cas où mon projet ne marche pas, j'estimais qu'il me fallait un Bac. En plus, cela rassurait ma mère et mon père, inquiets au départ car ma famille n'était pas du tout du monde agricole. Eux, par exemple, travaillent dans une auto-école et dans les assurances », explique-t-il.
Quand mes parents ont compris que j'étais heureux, ils m'ont fait confiance.
Pour des études plus concrètes et pratiques, il s'oriente vers un Bac pro CGEA (conduite et gestion d'exploitation agricole) à dominante élevage. « Quand mes parents ont compris que cela me plaisait et que j'étais très heureux, ils m'ont fait confiance. » Son examen en poche, conscient que les connaissances théoriques sont également importantes, en particulier en termes de stratégie d'exploitation, Théo poursuit son cursus avec un BTS Acse. En apprentissage toutefois pour allier théorie et réalités du terrain.
« Découvrir de nombreux systèmes pour choisir le sien »
De plus en plus de responsabilités et de moins en moins le droit à l'erreur.
« Je voulais renforcer mes compétences pour sécuriser mon avenir professionnel, estime Théo. Un chef d'exploitation agricole a de plus en plus de responsabilités et de moins en moins le droit à l'erreur. Ce BTS permet de découvrir de nombreux systèmes agricoles, à travers des études de cas chiffrées, objectives et qui prennent l'exploitation dans sa globalité afin de l'optimiser : contextes pédo-climatiques, main-d'œuvre, territoire, débouchés, etc. On peut prendre des idées pour sa propre installation, en cernant mieux ce qui semble convenir à ses objectifs et aux atouts et contraintes de sa future ferme. »
Selon lui, l'apprentissage est également bénéfique car il met un pied dans la vie active, même si l'alternance entre l'école et l'élevage impose de s'adapter à de fréquents changements d'horaire, de rythme et de type de travail. « Il faut réussir à rester sans bouger dans une salle après avoir avoir été toujours en mouvement dehors avec les animaux ou dans les champs », reconnaît-il. Pour autant, Théo, après avoir obtenu son diplôme, a décidé de rempiler un an pour un certificat de spécialisation en machinisme, toujours sur la même exploitation.
« Se donner tous les moyens d'y arriver »
« Le matériel n'est pas ma grande passion, mais il faut être polyvalent quand on est agriculteur, met-il en avant. Autant donc diversifier ses connaissances et compétences. Et lorsqu'on s'installe en hors cadre familial, il faut se donner tous les moyens d'y arriver. En plus, c'est utile au quotidien de savoir faire un peu de mécanique, réparer et souder entre autres. Cela évite de devoir sans cesse appeler le mécano. Surtout que ce poste coûte cher, alors si on peut faire quelques économies... »
Il faut être polyvalent quand on est agriculteur !
Il ne reste plus à Théo que l'épreuve finale à passer, mais avec la crise sanitaire du covid-19, il ne sait pas encore comment celle-ci sera organisée. Depuis mi-mars, les cours se font à distance mais l'apprentissage, lui, a heureusement été maintenu. D'ailleurs, une fois diplômé, il sera embauché en tant que salarié au sein de l'élevage. « Je suis arrivé au bon moment. Le Gaec à trois associés venait d'être séparé en deux exploitations suite au départ en retraite du frère de mon maître d'apprentissage. Ce dernier a gardé 75 ha, des prairies et un peu de céréales, et les vaches laitières, 60 Normandes, son neveu, les bovins allaitants de race parthenaise. Il ne pouvait faire face seul à la charge de travail et recherchait un apprenti. »
Je suis arrivé au bon moment.
« Mon ancien maître de stage, qui le connaissait, m'a recommandé auprès de lui poursuit Théo. Tout de suite, nous avons eu un bon feeling. » Le jeune homme n'a jamais caché, à son maître d'apprentissage, qui cherchait aussi à former un éventuel successeur pour sa ferme, son rêve de devenir éleveur et chef d'exploitation pour « être son propre patron ». Un rêve qui peut se concrétiser quand on a un projet bien réfléchi même si l'on n'est pas du monde agricole ! Même si c'est moins facile et qu'il faut trouver une exploitation et "le bon cédant". S'il précise qu'il n'est pas encore passé par l'étape de la succession, Théo sait que « le dialogue et une bonne entente sont essentiels pour savoir où l'on va et s'accorder sur la façon d'y parvenir », notamment pour déterminer si le passage de relais sera brutal ou progressif. Affaire à suivre donc d'ici quelque temps pour voir si transmission il y a effectivement.