
Sexage des doses et génotypage des génisses sont des outils accessibles à tous. Ils offrent de sérieuses opportunités pour les éleveurs soucieux de confort et de rentabilité.
L'ÉVOLUTION DES TECHNOLOGIES LIÉES À LA REPRODUCTION a été particulièrement rapide depuis une dizaine d'années. Elle se poursuit, mais déjà ces nouveautés constituent des outils qui ne sont pas réservés aux sélectionneurs. Même si elles paraissent sophistiquées et coûteuses, elles sont en réalité de plus en plus simples à utiliser et leur coût est en baisse. Elles provoquent une véritable révolution en permettant aux éleveurs de réaliser un vieux rêve : produire des génisses dont ils connaissent le potentiel, issues des mères qu'ils ont choisies, au moment où ils le souhaitent.
Ces techniques arrivent à point nommé pour aider les éleveurs à faire face dans une filière laitière en pleine mutation. Les volumes de lait à produire ne seront plus aussi stables après 2015. Les prix font déjà le yo-yo depuis plusieurs années.
Or, réagir à une bonne conjoncture implique de disposer de réserve de production. La saisonnalité des livraisons est liée aux périodes de vêlage.
Les éleveurs ont besoin de plus de souplesse et de réactivité. En permettant de mieux maîtriser le renouvellement tant en quantité qu'en qualité, l'utilisation des nouvelles technologies leur donne de nouvelles cartes à jouer.
« Les fondamentaux de la reproduction resteront toujours », souligne Aurélien Michel, responsable de la gestion du renouvellement chez Évolution. À savoir : l'alimentation, le suivi sanitaire et la surveillance des animaux. En revanche, les semences sexées et le génotypage apportent des connaissances qui permettent de réduire les aléas.
« La mortalité des veaux, le sexe ratio ou les femelles à l'origine du renouvellement constituent autant d'éléments que l'éleveur a toujours subis mais qu'il pourra mieux maîtriser à l'avenir », déclare Aurélien Michel.
Gérer le renouvellement à l'ancienne implique de rester soumis à ces aléas, alors que les nouvelles technologies permettent de savoir quand vont arriver les nouvelles femelles et avec quel potentiel de production. Il s'agit donc d'une aide réelle au pilotage du troupeau.
On peut classer ces technologies en trois catégories.
1. MONITORING : SUIVRE LES ANIMAUX EN CONTINU
Les outils de monitoring offrent une aide à la surveillance des animaux. Elle se révèle particulièrement utile pour repérer les vaches en chaleurs ou celles qui s'apprêtent à vêler. Plus globalement, elle peut faciliter le suivi de la santé des animaux (mesure de la rumination ou de l'activité).
Ces outils sont apparus depuis une dizaine d'années et chez Évolution, par exemple, environ 10 % des éleveurs sont équipés de l'un ou l'autre des systèmes proposés.
Si l'agrandissement des troupeaux augmente le nombre d'animaux suivi par personne, et donc le besoin en aide de ce type, force est de constater que des élevages de taille moyenne s'équipent aussi. En sécurisant des étapes-clés et à risques, les outils de monitoring donnent à l'éleveur un certain confort, qui semble recherché. Ils permettent de réduire les pertes
au vêlage et d'améliorer la détection des chaleurs.
L'éleveur dispose ainsi d'un moyen supplémentaire pour redresser les performances à la reproduction, par exemple. Quant aux capteurs de comportement, ils signalent des modifications pouvant traduire un problème de santé.
2. SEMENCE SEXÉE : DES FEMELLES QUAND ON LE SOUHAITE
Produire des paillettes d'un sexe déterminé est possible depuis le début des années 2000. Mais la technologie a connu un véritable tournant en 2008-2009. Jusque-là, la rareté et la perte de fertilité limitaient la vulgarisation du sexage des doses. Depuis, la technique a énormément progressé.
Cela a permis d'élargir l'offre. Limitée au début à quelques mâles, elle est aujourd'hui beaucoup plus variée. Mais certains mâles possèdent une qualité de semence qui empêche son sexage.
L'intérêt et la fiabilité du sexage des doses ont été démontrés par l'Institut de l'élevage qui a présenté une étude sur le sujet au Space 2013. En 2012, 200 000 inséminations artificielles ont été réalisées avec des paillettes sexées.
C'est 30 % de plus qu'en 2011 et cela donne une base de données suffisamment large pour être exploitée. La montbéliarde et la jersiaise sont de loin les races qui ont le plus recours à cette technique. Les doses sexées représentent respectivement 14,4 et 13,6 % des inséminations artificielles premières dans ces deux races. À titre indicatif, les IAP laitières avec des doses sexées représenteront 8 % du total chez Évolution en 2013. Ce taux devrait dépasser les 10 % en 2014.
Toutes races confondues, les paillettes sexées concernent avant tout des IAP (79 % du total) réalisées sur des génisses (65 %). Mais le taux de non-retour est en moyenne inférieur de 10 %. Ceci explique en partie le fait que les génisses soient les plus concernées par ces doses. Les utilisateurs ont intérêt à privilégier les femelles les plus fertiles. L'étude montre aussi que le sexage fonctionne bien puisque les paillettes sexées femelles donnent 90 % de génisses.
Le succès croissant du sexage est lié à l'amélioration de la technique et aussi à l'intérêt que les éleveurs y trouvent. Ne faire naître que des femelles a toujours fait partie des rêves inaccessibles des laitiers. Cela est en train de changer. Avec les doses sexées, il est possible de choisir le moment de l'arrivée des génisses de renouvellement, mais aussi leur origine maternelle et leur nombre.
Il s'agit donc d'un levier fort pour disposer du nombre et de la qualité des génisses que souhaite l'éleveur.
Avoir plus de génisses permet de mieux trier et donc de maximiser le progrès génétique. Les éleveurs s'en servent aussi pour faciliter les vêlages avec des veaux moins gros. Cet avantage n'avait pas été anticipé. Mais il s'avère essentiel puisque les vêlages sans problème facilitent les démarrages de lactation.
3. GÉNOTYPAGE DES FEMELLES : TRIER EN CONNAISSANCE DE CAUSE
La troisième technologie arrivée récemment dans les élevages est la possibilité de génotyper les femelles. L'intérêt est évident : les index calculés sur cette base sont nettement plus fiables que les estimations réalisées sur ascendance. On passe d'un CD (coefficient de détermination) de 0,2 à près de 0,7. De plus, le génotypage donne l'ensemble des index alors que ceux-ci n'étaient pas disponibles auparavant, pour les fonctionnels notamment. Enfin, le potentiel d'une génisse peut être connu dès l'âge de deux mois. On ne commençait à l'approcher de manière fiable qu'à partir de la troisième lactation il y a seulement deux ans.
Les travaux de l'Institut de l'élevage permettent d'affirmer que les index génomiques des génisses sont plus pertinents que les index sur ascendance pour prédire les performances.
Ce génotypage est accessible pour les éleveurs depuis 2011. La technologie a connu une forte avancée en 2012 avec l'utilisation d'une nouvelle puce dite LD (basse densité) deux fois moins chère que la 54K qui prévalait jusque-là. Le prix est tombé en dessous de 80 € et la demande a explosé.
Pour les trois premières races laitières, les génotypages pour les éleveurs (hors schéma de sélection) sont passés de moins de 2 000 en 2011 à 25 000 en 2012. « Sur la zone d'Évolution, on sera à 18 000 cette année, soit 2 % des génisses. Et on devrait friser les 30 000 en 2014 », prédit Aurélien Michel. Il constate que beaucoup d'éleveurs l'ont fait au départ sur quelques animaux, par curiosité. Aujourd'hui, la plupart le commande pour un lot de génisses. Ils ont donc intégré le génotypage dans leur stratégie de renouvellement.
Cette information sert d'abord à choisir les animaux qui resteront dans le troupeau et qui produiront le renouvellement. Mais prédire les performances d'une vache permet aussi de mieux la conduire. On peut ajuster la ration à son potentiel, tenir compte des faiblesses éventuelles en fertilité ou cellules et, bien sûr, effectuer les accouplements en fonction des qualités et des défauts réels.
Au progrès génétique traditionnellement apporté par la voie mâle s'ajoute aujourd'hui celui de la voie femelle. Les éleveurs ont donc les moyens de l'accélérer fortement dans les prochaines années.
Il serait dommage de ne pas concilier cet ensemble de technologies dans le but d'augmenter la sécurité, le confort de l'éleveur, les performances techniques et économiques. « L'augmentation de la demandeva faire baisser les prix du génotypage », estime Aurélien Michel. L'Institut de l'élevage a chiffré les gains permis par le progrès génétique. Ainsi, pour un troupeau de 60 vaches, le bénéfice lié à une hausse de production de 100 kg de lait/vache dépasse-t-il les 900 €/an. Il est du même niveau pour un passage de 200 000 à 180 000 cellules ou pour une progression du taux de réussite à l'insémination de 2 %. Le recours aux nouvelles technologiques représente donc un investissement qui s'amortit assez rapidement.
DES OUTILS COMPLÉMENTAIRES
Outre le progrès génétique, combiner sexage et génotypage offre des avantages économiques. L'éleveur a le choix entre plusieurs stratégies.
Il peut produire un maximum de génisses pour en vendre une partie ou pour développer son troupeau. Il peut aussi réserver les semences sexées à ses meilleures femelles et recourir au croisement industriel pour les autres. La plus-value sur la vente des veaux est conséquente. Et la stratégie la plus fréquente consiste à agrandir le troupeau sans achats extérieurs.
Ces impacts sur le progrès génétique et sur les ventes sont relativement faciles à chiffrer (voir tableau). Mais ces calculs n'incluent pas les gains induits par une meilleure santé et par le cumul du progrès génétique sur plusieurs générations.
Dans les prochaines années, l'écart va se creuser entre ceux qui adopteront ces nouveaux outils et les autres. « Évolution travaille aujourd'hui avec les OCL de l'Ouest pour accompagner les éleveurs dans l'appropriation de ces techniques », ajoute Aurélien.
PASCALE LE CANN
Aurélien Michel, responsable de la gestion du renouvellement chez Évolution.
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