« NOUS AVONS OPTÉ POUR UNE PETITE MÉTHANISATION ADAPTÉE À NOTRE ÉLEVAGE »

Six mois après la mise en route du méthaniseur Bio4Gas, « le moteur de 50 kWe fonctionne à plein régime », déclarent, très satisfaits, Mathieu et Mickaël Grange, les deux frères associés à leur père Pascal, et à Nicolas Malin, le voisin.PHOTOS © A.B.
Six mois après la mise en route du méthaniseur Bio4Gas, « le moteur de 50 kWe fonctionne à plein régime », déclarent, très satisfaits, Mathieu et Mickaël Grange, les deux frères associés à leur père Pascal, et à Nicolas Malin, le voisin.PHOTOS © A.B. (©)

LE GAEC P2MN, EN BRESSE DE L'AIN, A INVESTI DANS UNE PETITE MÉTHANISATION (50 KWE) FONCTIONNANT AVEC LE LISIER ET LE FUMIER MOU DE SES 120 VACHES.

L'INSTALLATION DE MÉTHANISATION du Gaec P2MN est entrée en service en juin 2014. D'une puissance installée de 50 kWe, elle valorise 5 000 m3 par an de lisier de bovin et 250 t de résidus de silos de maïs fournis par une coopérative voisine. Une fosse de stockage circulaire de 2 270 m3, représentant six mois d'autonomie, a été construite.

« Notre première motivation était de simplifier le travail lié à la reprise et à l'épandage du fumier mou, expliquent Mathieu et Mickaël Grange, deux des quatre associés du Gaec P2MN. En logettes paillées et couloir raclé, il fallait gérer une "fumière piscine". Nous n'avions pas de fosse de stockage. Poussé en bout de stabulation sur une plate-forme couverte, le fumier était repris l'hiver tous les mois et stocké en bout de champ. C'était prenant et salissant. » Le fumier mou raclé est désormais poussé automatiquement dans une préfosse de 40 m3. Mélangés à des résidus de maïs fournis par une coopérative voisine, les effluents sont homogénéisés quatre fois par jour et envoyés dans le digesteur. Cette préfosse existait déjà. Elle servait à récupérer les eaux blanches et vertes de la salle de traite. « Avec la méthanisation, nous liquéfions les matières, ce qui facilite l'épandage », se félicite Mathieu Grange.

Pour travailler dans des conditions optimales, le Gaec a investi 40 000 € dans un épandeur au sol. D'une largeur de 11 m, la tonne crache le digestat à 20 cm du sol, ce qui limite au maximum les rejets d'ammoniac dans l'air.

« LE MOTEUR FONCTIONNE À PLEIN RÉGIME »

Le passage du fumier mou au digestat a d'autres avantages : l'odeur des effluents disparaît et la valeur du produit final s'améliore, car l'azote transformé est plus facilement assimilable par les plantes. Cet aspect-là n'a pas encore été chiffré. Pour déterminer la valeur du digestat, des analyses doivent être réalisées cet hiver. « Un agriculteur voisin, producteur de porcs et équipé d'un même type de méthaniseur que nous, a chiffré à plus de 10 000€ les économies annuelles d'engrais réalisées », notent les deux frères.

Au Gaec P2MN, la méthanisation était dans l'air depuis quelques années. « Il y a cinq ans, nous avions réfléchi à installer une grosse unité, expliquent Mathieu et Mickaël. Mais être tributaires de coproduits extérieurs nous rebutait. Nous ne voulions pas passer du temps à gérer des contrats, ni embaucher un salarié pour s'occuper de l'unité. Nous voulions rester d'abord des agriculteurs. »

Le système par voie liquide sans brassage mécanique, fondé sur la technologie autrichienne Bert et proposé par la société Bio4Gas Express, a séduit les associés. « Elle correspond à notre souhait de fonctionner en autonomie et elle est adaptée à la taille de notre exploitation », expliquent-ils.

À l'intérieur du méthaniseur, deux chambres concentriques imbriquées l'une dans l'autre sont connectées à la base par de petites ouvertures pour permettre le déplacement du substrat. Chacune d'elles est équipée d'un tube creux placé verticalement : un Thermo Gas Lift. L'agitation continue est permise par un effet de thermosiphon (comme dans une cafetière italienne). En forçant la circulation d'eau chaude dans les parois du tube, on induit un mouvement vertical du substrat. Celui-ci est amplifié par une vanne flip-flop qui génère une différence de pression entre les deux chambres. Alors que le lisier est introduit dans la chambre extérieure, la chambre centrale évacue le substrat dégradé. Le temps de séjour dans le digesteur se limite à trente jours.

« UN SÉCHOIR POUR VALORISER LA CHALEUR »

Parti initialement sur un projet intégrant le lisier, le fumier, et les déchets de maïs, le Gaec a finalement opté pour un méthaniseur fonctionnant à 95 % avec le lisier et à 5 % avec les déchets de maïs. Le fumier est géré à part. « Avec le lisier et les déchets de maïs, le moteur de 50 kWe fonctionne déjà à plein régime, constate Mickaël. Peut-être quand nous aurons suffisamment de recul, faudra-t-il monter en puissance électrique en passant à 65 kWe lors de la révision des huit ans ? »

Pour valoriser la chaleur produite et optimiser le prix de l'électricité revendue à EDF, le Gaec a investi dans un séchoir équipé de deux cellules. Celui-ci a été installé sous un hangar neuf de 36 m de long par 16 m de large, qui sert également à abriter du matériel initialement logé dehors. Son toit est équipé d'un système de récupération de chaleur. « Créer un réseau de chaleur pour nos maisons ou celles du voisinage n'était pas envisageable. Nos propres habitations étaient déjà chauffées soit au bois, soit par la géothermie. »

« LE RETOUR SUR INVESTISSEMENT EST CHIFFRÉ À HUIT ANS »

Dans le cadre d'une prestation de service, une partie de la chaleur produite par le méthaniseur est vendue à une entreprise forestière de la région que le Gaec a lui-même démarchée. Après avoir benné les plaquettes à sécher, le camion repart avec le bois sec. Le chauffeur se débrouille tout seul avec le télescopique de l'exploitation mis à sa disposition, moyennant une location. En mai-juin, l'excédent de chaleur sera utilisé pour sécher le foin. Fin août, il servira pour la luzerne. « Le matin, nous pourrons rentrer le fourrage à la rosée avec toutes ses feuilles », avance Mickaël Grange.

La construction de ce séchoir représente un investissement supplémentaire, mais il permet de mieux valoriser la chaleur produite lors du process de méthanisation, et donc d'avoir un meilleur prix pour l'électricité (+ 12 000 € par an pendant quinze ans). « Notre objectif est de financer le coût du bâtiment par les recettes issues de la prestation de service des plaquettes forestières », précisent les éleveurs.

Très satisfaits du démarrage de leur installation, les associés du Gaec P2MN notent que « le moteur a tout de suite produit à plein régime. En régime de déclaration (un dossier à déposer en préfecture), le délai de montage du dossier a été rapide. Le plan d'épandage initial n'a pas été modifié : avec la méthanisation, nous perdons 4 à 5 % du volume initial des effluents ce qui compense largement les 250 tonnes de déchets de maïs en plus incorporés dans le méthaniseur. Nous avons eu beaucoup d'échanges avec le voisin de Domsure, premier agriculteur du département à s'être équipé d'une unité de méthanisation Bio4Gas Expres. »

Au total, 660 000 € ont été investis dans l'installation. Ce chiffre comprend non seulement l'unité de méthanisation (460 000 €), mais aussi le séchoir (83 000 €), la fosse de stockage des effluents (77 000 €) et la tonne à lisier (40 000 €). Grâce aux subventions obtenues (212 000 €), le temps de retour sur investissement a été chiffré à huit ans. « Ici, la rentabilité de l'investissement a été calculée avec le stockage des effluents : bien que n'étant pas en zone vulnérable, les agriculteurs ont prévu une capacité de six mois pour tenir compte de l'évolution de la réglementation », souligne Olivier Rebaud, de Bio4Gas Express.

ANNE BRÉHIER

Le Gaec a investi 40 000 € dans un épandeur au sol pour optimiser l'épandage du digestat et réduire au maximum les rejets d'ammoniac dans l'air. En arrière-plan, le stockage des déchets de maïs et le digesteur de 600 m3.

Le télescopique sert aussi bien à benner les déchets de maïs dans le digesteur qu'à manipuler les plaquettes forestières dans le séchoir. Installées sous un hangar neuf qui abrite aussi du matériel, les deux cellules du séchoir ont été mises en service fin 2014.

En bout de stabulation, l'ancienne plate-forme où était stocké le fumier mou a été transformée en 32 places de logettes supplémentaires. Les travaux ont été réalisés par les agriculteurs eux-mêmes.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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