« JE METS LA FRACTION SOLIDE DU LISIER DANS LES LOGETTES »

© PHOTOS P.L.C.
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LE GAEC DE LA VALLÉE BLANCHE A RÉNOVÉ L'ANCIEN BÂTIMENT AFIN D'ACCUEILLIR 40 VACHES SUPPLÉMENTAIRES. POUR GAGNER DE LA PLACE, LES ASSOCIÉS ONT DÉCIDÉ DE VALORISER LA PARTIE SOLIDE DU LISIER POUR LE COUCHAGE.

TRANSFORMER L'AIRE PAILLÉE EN LOGETTES est une option courante pour faire face à une augmentation d'effectif sans trop investir. Mais lorsque la surface couverte est réduite, il faut l'optimiser. Les associés du Gaec de la Vallée Blanche, à Nozay (Loire-Atlantique), ont réfléchi à cette question lorsqu'un jeune les a rejoints en 2011. « Nous avions une aire paillée et une fumière pour 90 vaches, précise Nicolas Besnier, l'un des associés. Nous pouvions aménager deux rangs de logettes assez facilement, mais cela ne suffisait pas pour créer les 140 places dont nous avions besoin. Il en manquait 50 et nous voulions donc passer à trois rangs de logettes. » La largeur du bâtiment se limite à 14,80 m entre les cornadis et le mur du fond. C'était insuffisant pour installer trois rangs de logettes et un couloir de paillage.

Impossible donc de stocker de la sciure et de la paille entre les rangs. Pour entreposer ailleurs ce type de produits, il aurait fallu construire un hangar spécifique, ce que les éleveurs voulaient éviter. Ils ont préféré investir dans un séparateur de phase du lisier pour utiliser la partie solide en litière. Cela résolvait le problème de la place nécessaire pour le stockage. Ils sont allés voir des éleveurs de l'est de la France qui avaient l'expérience de cette pratique. Ils sont rentrés convaincus. Ils ont notamment été séduits par le confort pour les animaux, mais aussi par leur propreté.

« UN COUCHAGE TRÈS CONFORTABLE »

Ce sont ces arguments qui ont fait la différence par rapport aux matelas, qui ne nécessitaient pas non plus d'espace de stockage supplémentaire.

Le bâtiment compte désormais 140 places de logettes. Deux rangées face à face, d'une longueur de 2,30 m chacune, et une face au mur, qui mesure 2,60 m. À des arrêtoirs en béton, les éleveurs ont préféré des sangles, plus souples. Ils ont investi 45 000 € dans un séparateur de phase. Le lisier est d'abord récupéré dans une préfosse. Une pompe le reprend et l'envoie vers le séparateur de phase. La partie solide est recueillie sur une plateforme. Elle a une teneur en matière sèche de 30 %. Les éleveurs l'épandent sur les logettes à l'aide d'une pailleuse. Il n'y a donc pas de temps de stockage ni de fermentation avant l'utilisation. Le produit sec est utilisé frais et non composté.

Les logettes sont bétonnées et en légère pente (4 %). « Ce système fonctionne moins bien avec des logettes creuses », estime Nicolas. Les éleveurs disposent une couche de 5 à 8 cm une fois par semaine dans les logettes. Au total, cela leur prend moins d'une heure par semaine. L'apport du produit frais dégage une légère odeur mais elle ne persiste pas. En revanche, il n'y a aucune poussière, ce que les éleveurs apprécient. Les logettes sont nettoyées quotidiennement pour enlever les bouses.

En bougeant dans les logettes, les vaches ont tendance à repousser un peu le produit vers le couloir d'exercice. D'où la nécessité d'en remettre régulièrement. Mais de cette façon, il n'y a pas d'accumulation sur le couchage. « C'est ce qui explique le bon fonctionnement de ce système », analyse Jérôme Marie, spécialiste des bâtiments à la chambre d'agriculture. En effet, la fraction solide du lisier est un produit absorbant. Lorsque des vaches perdent du lait, par exemple, il est retenu dans cette litière qui peut devenir un véritable bouillon de culture si elle n'est pas régulièrement renouvelée.

« IL N'Y A PAS PLUS DE CELLULES QU'AVANT »

Les éleveurs craignaient un peu une dégradation de l'état sanitaire du troupeau, voire une recrudescence des mammites, notamment en raison du climat plus humide chez eux que dans les élevages qu'ils avaient visités. En réalité, ils n'ont pas vu de différences depuis deux ans. Ils ont été pénalisés une seule fois pour une teneur excessive en cellules. Mais ils l'expliquent plus par le fait que l'agrandissement du troupeau s'est fait volontairement sans achat de vaches. Le quota a été produit mais les animaux ont été moins triés depuis l'agrandissement du troupeau et l'aménagement du bâtiment. Les éleveurs savent que quelques vaches incurables doivent partir.

Le troupeau s'est assez vite adapté à ce nouveau logement. Et Nicolas pense même que l'utilisation de la fraction sèche du lisier a aidé les vaches à adopter les logettes. En effet, le séparateur de phase n'a démarré que trois semaines après la mise en service du bâtiment. Pendant ce temps, la litière se composait d'un mélange de sciure et de paille broyée. Les vaches se couchaient peu dans les logettes. Elles n'ont plus hésité dès que les éleveurs ont utilisé le produit issu du séparateur. Depuis, les génisses, qui sont sur une aire paillée pendant leurs deux premières années, n'ont aucun mal à s'habituer aux logettes. La technique permet donc d'atteindre le bon niveau de confort qu'attendaient les éleveurs. Ils ne sont pas déçus non plus sur le plan de la propreté des animaux. Le nettoyage des mamelles en salle de traite en est facilité.

« LA CONDUITE DU SÉPARATEUR EST TECHNIQUE »

« La conduite du séparateur est assez technique », précise Nicolas. La teneur en matière sèche du produit final dépend en effet de la pression. Trop sec, le produit ne reste pas dans la litière. Trop humide, il a tendance à coller aux animaux. Les éleveurs ont mis un certain temps avant de bien maîtriser les réglages. Ils font tourner le séparateur en fonction de leurs besoins pour la litière. En moyenne, c'est trois à quatre fois par semaine. Ils démarrent après la traite du matin pour la journée. « Nous évitons de nous en servir pendant la traite pour ne pas avoir une consommation ponctuelle excessive en électricité », précise Nicolas. Le reste du temps, le lisier est acheminé vers la fosse principale.

L'utilisation d'une partie du lisier pour le couchage permet de réduire un peu les besoins en volume de stockage d'effluents. Ce point n'avait pas d'importance ici avec une fosse suffisamment grande. En revanche, le parcellaire est éclaté avec la moitié de la surface située à 11 km du siège de l'exploitation. Les éleveurs étaient donc intéressés par une réduction des volumes de déjections à épandre. D'autant plus qu'avec les ateliers de bovins d'engraissement, ils disposent d'une bonne quantité de fumier pour la fertilisation.

« UN BILAN ÉCONOMIQUE POSITIF »

Les éleveurs considèrent aussi que le bilan est positif sur le plan financier. Certes, ils ont investi 45 000 € dans le séparateur de phase. Et le coût de fonctionnement est évalué à 3 000 €/an, essentiellement en électricité. C'est plus que ce qu'auraient coûté des tapis, l'autre option envisagée. À 110 €/place, la facture serait montée à 14 000 €. Mais leur choix est plus performant en termes de confort et de propreté. Et par rapport à l'option sciure ou paille, ils ont fait l'impasse sur la construction d'un hangar de stockage. Aujourd'hui, les éleveurs peuvent vendre de la paille.

Pour améliorer le système, ils réfléchissent à deux évolutions possibles. « Les vaches gaspillent le produit en le rejetant dans le couloir », constate Nicolas. En posant une petite baguette de bois à l'arrière de la logette, il réduirait ces pertes. Car il ne souhaite pas faire tourner le séparateur plus longtemps. Actuellement, avec une mise en route entre les deux traites durant toute la journée, le volume d'extrait sec produit est totalement consommé.

En produire plus supposerait de faire fonctionner le séparateur la nuit, ce que les associés préfèrent éviter. Même s'ils n'ont jamais eu de soucis, on ne sait jamais. « Nous allons commencer par poser des baguettes sur une partie des logettes pour voir comment cela fonctionne », ajoute l'éleveur.

Jérôme Marie est assez réservé sur cette option. Il craint une dégradation sanitaire en cas de stockage prolongé du produit dans la logette. « Je connais au moins deux éleveurs équipés de séparateurs de phase et de logettes creuses. Ils ont abandonné l'utilisation de la fraction sèche dans les logettes pour des raisons sanitaires », explique-t--il.

L'autre amélioration envisagée consisterait à couvrir le séparateur. Il se trouve actuellement à l'air libre, ce qui est ennuyeux quand la météo est humide.

PASCALE LE CANN

Nicolas Besnier, l'un des associés du Gaec de la Vallée Blanche

Mélange dans une préfosse. Le lisier raclé passe d'abord dans une préfosse. Il est repris par une pompe pour être dirigé vers le séparateur, lorsque les éleveurs ont besoin de produit pour la litière, soit trois ou quatre jours par semaine. Le reste va directement dans la grande fosse. Il est épandu sur les terres.

Séparateur de phase. Les éleveurs font tourner le séparateur en fonction de leurs besoins pour les logettes. Le réglage vise à obtenir un produit suffisamment sec, mais pas trop. Il est utilisé frais.

Les éleveurs apprécient beaucoup la propreté des animaux avec cette litière.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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