
SOUCIEUX DE RENFORCER LEUR AUTONOMIE, VINCENT HUE ET EMMANUEL TIRARD ONT INVESTI DANS UNE AUTOCHARGEUSE. L'ORIENTATION TECHNIQUE TRÈS PROCHE DE LEURS EXPLOITATIONS FACILITE L'UTILISATION DE LA MACHINE AU QUOTIDIEN.
L'INVESTISSEMENT PARTAGÉ EST UN MOYEN D'AFFOURAGER à un coût maîtrisé, mais l'organisation du travail peut s'avérer difficile et l'augmentation des budgets « fuel et entretien » liée à une utilisation intensive ne compense pas toujours la baisse de consommation des concentrés. « Malgré des atouts évidents, des éleveurs abandonnent cette pratique peu après avoir investi. En témoignent les matériels d'occasion à la revente, constate Gérard Losq, du pôle herbivore de la chambre d'agriculture de Bretagne. C'est la mauvaise évaluation du temps de travail qui motive ce retour en arrière. Il est en moyenne de 50 min/j (une seule distribution par jour) et vient se greffer aux autres tâches de l'exploitation. »Pour optimiser cette pratique, il faut se limiter à deux ou trois éleveurs proches et, idéalement, investir en ayant les mêmes objectifs d'utilisation de la machine. « Sur des exploitations de même profil, l'organisation est facile, souligne Florian Frémont, conseiller à la fédération des Cuma de Basse-Normandie. Lorsque les besoins et les contraintes sont différents, il faut individualiser les postes entretien et carburant. Pour cela, un cahier de suivi peut s'avérer indispensable. Si la remorque est attelée à un tracteur dédié, une autre option est envisageable : celui qui a le matériel fait systématiquement l'entretien et le plein de fioul avant de le passer au suivant. »
« DIFFICILE DE GÉRER LES QUANTITÉS DISTRIBUÉES »
Un compteur peut être branché sur le convoyeur de la remorque pour évaluer le temps de travail et facturer les charges au prorata de l'utilisation de chacun. Pour limiter l'astreinte, la capacité de la remorque devra permettre d'apporter la ration d'herbe en un seul trajet. « La quantité d'herbe distribuée est difficile à gérer avec précision (densité de l'herbe fraîche : 250 à 400 kg/m3). Elle dépend du type de prairie et de la quantité d'eau. Dans notre système, ce manque de précision a peu d'impact, car nous n'avons pas d'objectifs de production élevés », explique Vincent Hue, éleveur à Saint-Jean-le-Blanc. Avec Emmanuel Tirard, ils ont choisi en 2010 d'investir dans une remorque faucheuse-autochargeuse Bonino de 28 m3 pour un montant de 30 000 €. À l'époque, ils ont bénéficié d'une subvention de 6 250 € du Conseil régional, cofinancée par les fonds européens (Feader), au titre de l'aide aux investissements collectifs pour une agriculture durable et innovante. « La réflexion est née de la volonté d'affourager de la luzerne en été, lorsque l'herbe manque en pâture. Cela permet de ralentir le rythme de rotation des paddocks pour maintenir le silo de maïs fermé plus longtemps. La remorque joue ainsi un rôle d'appoint fourrager, l'objectif premier étant de valoriser les parcelles accessibles par le pâturage. Car le gros inconvénient de cet outil est le temps passé : une heure en moyenne, avec des parcelles distantes de 5 km maximum. »
Chez Vincent, avec 0,24 ha/VL accessible, la période de plein pâturage dure jusqu'au 15 juin. Ensuite, l'autochargeuse tourne tous les jours pour aller chercher sur des parcelles plus éloignées du RGI/TV (8 ha) ou de la luzerne (6 ha) derrière les deux premières coupes ensilées. Le silo reste ainsi fermé jusqu'à mi-août. « La difficulté avec la luzerne consiste à créer un décalage dans la pousse pour l'exploiter avant la floraison. »
En automne, la remorque valorise des prairies et des refus qui ne justifient pas une récolte en stock. À partir d'octobre, les deux éleveurs affouragent un mélange colza + RGI, implanté entre une céréale et un maïs. C'est la portance des sols qui décide de la poursuite en hiver de cette pratique.
« L'AFFOURAGEMENT A UN RÔLE D'APPOINT »
« La première année, j'ai affouragé du colza jusqu'en février et l'année dernière, seulement jusqu'à fin novembre. Le colza n'est pas très laitier, mais il a un intérêt métabolique à travers la diversification des fourrages et il participe à une meilleure autonomie protéique. » Habitant dans la même commune (1 km entre les deux fermes) et partageant les mêmes objectifs, les deux éleveurs ont une organisation très simple : « Chacun fait le plein à tour de rôle. Comme nous partageons également la mélangeuse, chacun de nous possède un traceur dédié sur un outil. Le matin, lorsque j'ai fini de distribuer la ration, j'amène le bol et je repars avec l'autochargeuse, et vice-versa. » En réduisant progressivement la part de maïs, Vincent s'est engagé dans une conversion à l'agriculture biologique.
JÉRÔME PEZON
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