RÉDUCTION DES PÉRIODES D'ÉPANDAGE, MEILLEURE UTILISATION DES EFFLUENTS D'ÉLEVAGE ET RENDEMENT DE CHANTIER IMPORTANT POUSSENT À L'ÉPANDAGE DU LISIER SANS TONNE, DANS UN PAYS OÙ LES PRAIRIES ET LES TERRES CULTIVÉES JOUXTENT SOUVENT LES BÂTIMENTS D'ÉLEVAGE.
Il y a quelques années, aux Pays-Bas, l'épandage du lisier sans tonne était une solution pour fertiliser les sols sensibles au tassement, les terres de tourbe en particulier. À l'époque, le lisier était épandu à la surface du sol, une technique désormais interdite. Pour limiter les émissions d'ammoniaque, l'utilisation de matériels permettant de l'injecter dans les premiers centimètres du sol est la règle, sur les prairies comme sur les terres arables. L'épandage sans tonne s'y est adapté.
Les tours de vis de la législation néerlandaise sur les périodes d'épandage lui ont même donné un coup de pouce. Initialement toléré tout au long de l'hiver sur sols argileux ou de tourbe, l'épandage de fumier ou de lisier est interdit partout de mi-septembre à février. Seul créneau possible, la période de croissance des plantes. D'où l'engouement actuel pour une technique d'épandage permettant d'apporter le lisier tôt dans la saison. Le contexte particulier des fermes néerlandaises, avec leur parcellaire très restructuré, a aussi joué pour elle. Ici, prairies et terres arables jouxtent généralement les bâtiments d'élevage et la fosse à lisier qui va avec.
L'épandage sans tonne a fait son apparition dans les exploitations sur sols argileux ou de tourbe, où le passage d'une tonne au printemps oblige à décaler le premier apport pour attendre que les parcelles soient suffisamment ressuyées. Puis il s'est étendu partout où l'on cherche à intervenir tôt pour allonger au maximum la période pendant laquelle les plantes peuvent utiliser le lisier épandu. Le fait est que l'épandage sans tonne provoque peu ou pas de dommage sur le couvert végétal en place, la structure du sol ou les chemins. Dans les grandes parcelles, la plus grande capacité d'épandage peut aussi être un moyen de réduire les coûts de chantier.
Ajouter de l'eau permet d'améliorer l'absorption du lisier dans le sol et son utilisation.
UN RENDEMENT DE CHANTIER IMPORTANT
D'abord réservée à la fertilisation des prairies, cette technique d'épandage s'étend sur les terres arables (avant labour, sur couvert végétal d'hiver ou sur céréales implantées en fin d'été). Quelques agriculteurs et des entrepreneurs ont également développé leur propre matériel pour travailler au moment du semis de maïs ou pour injecter du lisier entre des rangs de pommes de terre.
Sur de grandes parcelles, l'épandage sans tonne offre, comme principal atout, son rendement de chantier supérieur au travail avec une citerne traînée. Et pour cause, il n'y a plus d'allers-retours à faire du champ à la fosse, pour remplir la tonne à lisier. Sauf incident de colmatage du tuyau, l'épandage est ininterrompu.
En revanche, cette technique nécessite la présence de deux personnes : une à la fosse et à la pompe, l'autre au champ. Selon les utilisateurs néerlandais, en fonction du type d'injecteur, de la largeur de travail, de la consistance du lisier et de la vitesse du tracteur, une capacité de 100 à 130 m3 épandus par heure est possible. On peut ainsi atteindre un rendement de chantier de 40 m3/ ha avec 3 ha/h.
Mais pour cela, encore faut-il aussi que l'équipement soit bien adapté : le type de pompe, la pression, la puissance de moteur et l'épaisseur des tuyaux doivent correspondre. Outre la main-d'oeuvre nécessaire, travailler avec un tuyau flexible qui approvisionne le matériel d'épandage porté par le tracteur a une autre contrainte : le travail conséquent qu'il demande avant et après chaque chantier. Les tuyaux doivent être d'abord déroulés et connectés les uns aux autres à l'avance, puis déployés et mis en place dans le champ à fertiliser. L'épandage terminé, ces tuyaux doivent être nettoyés à l'eau, vidés et enroulés. Le lisier dilué et l'eau doivent aussi être épandus sur ou dans les premiers centimètres du sol. Parfois, une balle est utilisée pour forcer l'évacuation de l'eau dans les tuyaux.
UNE POMPE DE 120 À 140 M3/H ET UN TRACTEUR DE 140 À 200 CH
En pratique, deux types de tuyaux sont utilisés : un plus épais pour acheminer le lisier de la fosse à l'entrée de la parcelle, l'autre plus mince pour approvisionner le matériel d'injection. Des flexibles d'une longueur de 1,5 à 2 km ne sont pas des exceptions. Ils ont, en général, un diamètre de 127 mm pour le premier tuyau, et de 101,6 mm pour celui tiré au sol par le tracteur. Selon la distance d'épandage, une pompe de 120 à 140 m3/h et un tracteur de 140 à 200 ch sont nécessaires. Certaines entreprises de travaux agricoles utilisent une deuxième pompe et vont un kilomètre plus loin… jamais plus !
L'avantage d'un tuyau d'alimentation d'un diamètre plus large est de pouvoir pomper plus le lisier avec moins de pression. Si besoin, de l'eau peut être ajoutée pour faciliter le pompage.
Le tuyau qui court sur le sol est branché à l'arrière du matériel d'injection attelé aux trois points du tracteur.
Impossible dans ces conditions pour le tracteur de faire marche arrière, même en bout de champ. C'est toujours en allant de l'avant que l'ensemble fonctionne. Pour permettre les allers-retours, le tuyau a la possibilité de tourner à 180° autour de son point de fixation. Difficile de donner un coût précis de l'investissement pour ce type de matériel. En effet, il s'adresse d'abord à des entrepreneurs travaillant souvent avec leurs propres outils combinés, adaptés aux prestations qu'ils proposent. Selon la capacité des installations, l'investissement dans une pompe revient entre 10 000 et 80 000 €, les tuyaux entre 15 et 40 €/m et l'injecteur entre 10 000 et 80 000 €.
UNE BONNE EFFICACITÉ AVEC UN LISIER ASSEZ FIN ET HOMOGÈNE
Basée à l'est du pays, l'entreprise de travaux agricole Van Hal propose cette technique d'épandage depuis quatre ans. Les demandes d'intervention vont crescendo de la mi-janvier à la mi-mai.
En 2008, Van Hal a ainsi fertilisé quelque 1 500 ha, aussi bien des terres nues, des céréales d'hiver ou des prairies, sur sols argileux ou sableux. « Nous avons de plus en plus de demandes pour ce type d'intervention, jusqu'en Allemagne », explique Erik Morsink, son directeur.
Selon l'emplacement du champ et de la fosse à lisier, la mise en place et le démontage des tuyaux sont très variables : de 15 min à 1 h 30. La consistance du lisier joue aussi. « Celui de porc ne nécessite pas d'ajout d'eau. Si la porcherie est juste à côté d'un seul champ à fertiliser, on peut aller très vite et sans interruption. Ce n'est pas le cas s'il faut intervenir sur plusieurs parcelles successivement. S'il faut en plus ajouter de l'eau pour rendre du lisier de bovin plus liquide, alors il peut se passer une heure et demie avant que la première goutte de lisier soit épandue au champ. Pour que le pompage soit efficace, mieux vaut que le lisier soit suffisamment fin et homogène. Un lisier trop épais qui n'a pas été mélangé pendant un certain temps ou contient des débris d'ensilage, par exemple, augmente les risques de colmatage. »
En général, ces chantiers mobilisent deux personnes communiquant par talkie-walkie. Elles peuvent ainsi se tenir mutuellement informées du flux de lisier en cas de problème. « Selon la fluidité du lisier, on peut ajouter jusqu'à 25 % d'eau, pas plus », ajoute l'entrepreneur. Le dosage est contrôlé par un débitmètre. « Nous travaillons habituellement avec une pression à la pompe de dix à douze atmosphères et une vitesse de 3 à 5 km/h, soit une capacité nette d'épandage de 50 à 120 m, selon la parcelle et le lisier. »
Pour limiter les phénomènes de tassement, cette entreprise travaille avec un tracteur de 200 ch, équipé en pneus de 600 et 105 (respectivement à l'avant et l'arrière), gonflés à une pression de 0,6 atmosphère. Le tracteur dispose, en outre, d'un dispositif d'ajustage de la pression en cours de chantier.
Van Hal facture sa prestation au mètre cube de lisier épandu par heure. Selon la taille et le nombre de parcelles, le type de lisier et l'eau ajoutée, le coût varie de 2,20 à 4 €/m3 (hors TVA), un tarif légèrement supérieur dans cette ETA à un épandage classique avec une tonne.
WILFRIED WESSELINK
(1) Diverses marques de système de tuyaux flexibles existent aux Pays-Bastelles que Baars/Roelema, Schouten, Venhyis, Votex, Vredo
Une protection pour ne pas gêner le trafic routier. Si le tuyau est amené à traverser une route, il est « coupé » par deux petits ponts.
Deux type de tuyaux. Le premier tuyau (rouge) qui achemine le lisier à l'entrée de la parcelle à fertiliser, est d'un gros diamètre (127 mm). Cela permet de pomper plus de lisier avec moins de pression. Le second, traîné sur le champ et attelé au matériel d'épandage, mesure 25 mm de moins.
Photos : © WILFRIED WESSELINK
Des pneumatiques adaptés pour limiter le tassement. Ce tracteur de 200 ch est équipé, à l'avant et l'arrière, de pneus en 600 et 1050, pour limiter le tassement. Il dispose aussi d'un système pour réguler la pression des pneus au champs.
Épandage sur prairies mais aussi sur céréales d'hiver. D'abord réservée à la fertilisation des prairies, cette technique d'épandage s'étend sur les terres arables. C'est notamment le cas très tôt en saison sur les céréales implantées en fin d'été.
Rotation possible à 180° en bout de champ. Le tuyau qui court sur le sol est branché à l'arrière du matériel d'injection, attelé aux trois points du tracteur. Impossible dans ces conditions de faire marche arrière. C'est toujours en allant vers l'avant que l'ensemble fonctionne. Pour permettre les allers-retours, le tuyau peut tourner à 180° autour de son point de fixation.
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