Au Gaec de Chanac (48), la Brune apporte 50€ de plus par tonne de lait

Patricia Bonnal et Eric Barbut travaillent à deux en Gaec avec 60 vaches en robot de traite et 70 ha labourables. (©Terre-net Média)
Patricia Bonnal et Eric Barbut travaillent à deux en Gaec avec 60 vaches en robot de traite et 70 ha labourables. (©Terre-net Média)

Au Gaec de Chanac en Lozère, Eric et Patricia ont à cœur de faire partager leur passion pour la race brune et présenter ses qualités dans un système performant. Ils ont décidé de relever leurs manches face à la crise en entamant aujourd’hui une conversion en bio et misent sur la transformation fromagère.

Installés en couple à Chanac, en Lozère à quelques minutes de Mende et du Mondial Brune 2016, Eric Barbut et Patricia Bonnal sont éleveurs de Brunes depuis trois générations. Administrateur à Brune génétique services (BGS), Eric est d’ailleurs l’un des principaux instigateurs du Mondial de la race sur ses terres natales. Un exploit d’avoir su rassembler des passionnés de la Brune venus des cinq continents en Lozère, aux portes des Cévennes.

La brune nous apporte la sécurité

« La Brune nous apporte la sécurité, elle est capable de s’adapter aux conduites d’élevage les plus variées, du pâturage intégral aux systèmes plus intensifs. Et grâce à ses taux laitiers élevés, ses faibles comptages cellulaires et sa grande longévité, elle sait s’adapter à tous les contextes économiques. La Brune a été le choix de nos parents et nous avons la volonté de le consolider. » Grâce à un long travail de génétique, le troupeau de 60 laitières est performant avec une moyenne de 8 652 kg par vache (41 g/kg de TB, 35 g/kg de TP, 215 000 cellules) et un âge moyen au premier vêlage à 26 mois. Adepte des concours, le Gaec de Chanac s’est plusieurs fois illustré lors du Sommet de l’élevage ou des journées Châtillonaises avec des vaches comme Fourmi (Traction), Fantasia (Calween) ou Doremi (Balou), des familles que les éleveurs ont su travailler pour présenter aujourd’hui leurs descendances au concours européen de Mende.

Les 60 Brunes du Gaec sont traites au robot (Lely A3) depuis 2009. « La Brune est une race attachante au caractère sympathique, docile et très curieuse, c’est un avantage pour le robot de traite », complète Patricia. Difficile néanmoins de dépasser les 60 vaches, le temps de traite des Brunes étant un peu plus long que d’autres races laitières, ce qui est un avantage pour la résistance aux mammites, mais limite un peu le nombre de vaches par stalle.

"On a mangé toutes nos économies"

Brunes ou pas, l’exploitation est en grande difficulté depuis la crise laitière. Les 536 000 litres livrés sont passés de 391,3 €/t en moyenne sur 2014 (qualité comprise) à 332€/t en 2015 et qu’en sera-t-il en 2016 ? Le lait est aujourd’hui « gracieusement donné » à Lactalis pour un prix de base à 263 €/1 000 litres ! Heureusement, les 35 grammes de taux protéique (TP) et les 41 grammes de taux butyreux (TB) permettent une plus-value de 40 à 50 euros de plus par tonne de lait. L’exploitation aurait besoin d’un prix de 360 €/t pour tourner normalement. « On a mangé toutes nos économies, si ça ne remonte pas dans six mois nous devrons mettre la clé sous la porte », se désole Patricia.

Située à 600 mètres d’altitude sur 110 hectares, dont 70 labourables, la ferme présente des coûts de production élevés : les parcelles sont petites, très morcelées et aux terres argilo-calcaires peu portantes et rapidement séchantes en été. Seules les génisses et les vaches taries pâturent.

Le bio pour s’en sortir

Après quelques mois de réflexion et une étude réalisée par la Chambre d’agriculture, Eric et Patricia ont choisi de convertir l’exploitation en agriculture biologique et espérer ainsi gagner une centaine d’euros sur la tonne de lait livrée. La conversion des terres a débuté en décembre 2015. Il faut alors remplacer les 16 hectares de maïs par des méteils et des luzernes et limiter drastiquement la distribution de concentré au robot. D’après l’étude, la production par vache devrait réduire d’environ un tiers, « mais normalement on devrait s’en sortir mieux », espère Eric. Le pâturage va néanmoins être compliqué à mettre en œuvre. Aujourd’hui le troupeau ne sort pas, pour respecter le cahier des charges il faudra aménager un accès extérieur à une petite parcelle, mais l’herbe pâturée et les économies qu’elle apporte ne seront pas vraiment au menu des laitières. Actuellement le coût alimentaire avoisine les 120 €/1000 litres, dont 75 € de concentré (voir ration). Un mash à 280 €/t - plus cher que le prix du lait - est distribué en complément au robot de traite.

Un fromage au lait de brune

En attendant que le lait puisse être livré et rémunéré en bio en 2017, les éleveurs œuvrent sur un nouveau projet : fabriquer un fromage exclusivement au lait de Brunes. Avec six producteurs de Lozère, ils viennent de créer une gamme de fromages plus ou moins affinés, intitulés « Saveur Lozère ». Pour cela, quelques milliers de litres sont collectés chez les éleveurs bruns pour être transformés à la laiterie Baecheler dans le Lot-et-Garonne (47). Car le lait de Brune est particulièrement fromageable grâce à une proportion importante de la variante B de la Kappa-caséine qui assure un meilleur rendement fromager (70 à 90 % de taureaux bruns présentent les gènes de la caséine BB).

Ainsi, les essais réalisés en Italie sur le Parmesan ont montré que les Brunes produisait 1 kg de fromage de plus que les Holstein pour 100 kg de lait. Ce projet de fromage est d’ailleurs inspiré d’une filière italienne qui a su faire de la Brune un atout commercial auprès des consommateurs. Le modèle économique de distribution des fromages de Lozère, les volumes et les débouchés restent encore à définir. Mais pour avoir gouté un petit morceau de ces grandes tommes de 6 kilos, ce fromage parfumé ne devrait pas tarder à être plébiscité par les gourmets cévenoles.

La brune s'adapte bien au robot : voir un article sur le sujet
La brune s'adapte bien au robot : voir une étude sur le sujet (©Terre-net Média)
 

Génisses brunes caillebotis
Les génisses et les vaches sont élevées sur caillebotis. La Brune présente de bonnes pattes qui lui assurent sa longévité. Le bardage latéral a été remplacé par des murs gonflables Isocell (installés par Ph Deru). (©Terre-net Média)
 

Cases à veaux
Cases à veaux (©Terre-net Média)
 

L'exploitation est située dans la vallée du Lot, au pied des montagnes cevenoles.
L'exploitation est située dans la vallée du Lot, au pied des montagnes cévenoles. (©Terre-net Média)
 

Pour les visites d'élvage du Congrés Mondial de la Brune, les éleveurs ont présenté les familles souches : Doremi (Balou) et Fantasia (Calween)
Pour les visites d'élevage du Congrès Mondial de la Brune, les éleveurs ont présenté leurs familles souches : Doremi (Balou) et Fantasia (Calween) et les filles de Volvic, Sagittaire, Huxion, Calvin, Traction... (©Terre-net Média)
 

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Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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