
Depuis 2022, les 100 vaches en lactation de l’EARL des Quatre Vents pâturent 10 ha à l’arrière du bâtiment exposés au vent et en plein soleil. L’année suivante, ont été plantés 1 615 m de haies dont 950 m pour constituer les dix paddocks de 1 ha. L’ombrage qu’ils créeront rafraîchira les laitières.
Durant les fortes chaleurs estivales, si elles ont le choix, les vaches laitières préfèrent rester dans leur bâtiment plutôt qu’au pâturage, surtout si les prairies ne disposent pas suffisamment d’ombrage. Cela nécessite des stabulations bien ventilées et, quand c’est possible, l’absence de translucides dans la toiture pour éviter d’y augmenter le rayonnement solaire et la température. Dans le Grand Ouest, les laitières sont généralement sorties la nuit, l’air maritime et le climat plus doux leur accordant du répit. En Alsace, le climat continental n'atténue pas, ou beaucoup moins, les températures nocturnes.
Le zéro pâturage accompagné d’une ventilation mécanique est monnaie courante. Néanmoins, encouragés par les financements nationaux ou régionaux, des éleveurs s’engagent dans la plantation de haies. L’investissement subventionné à 80 % ou 90 % les aide à franchir le pas.
L’index THI mesuré sous les arbres
Ils sont confortés dans leur choix par le suivi de cinq élevages laitiers en 2021 et 2022, réalisé par la chambre d’agriculture d’Alsace et son homologue allemande LBV Baden-Wittemburg dans le cadre du programme transfrontalier Klimaco. L’index THI (Temperature Humidity Index) a été calculé dans des parcelles plantées de haies. Pour rappel, le THI est la mesure d’alerte du stress thermique des vaches. À 68, elles sont en stress léger, à 78 en stress marqué. « La température et l'humidité en condition ombragée et en plein soleil y ont été mesurées, raconte Cécile Michel, conseillère technique élevage & agroforesterie à la chambre d’agriculture d’Alsace. La présence d’arbres dans les pâturages améliore sans conteste le bien-être des animaux. » À l’ombre des haies, 67 % des situations enregistrées sont sans stress thermique (THI inférieur à 68), contre 48 % en plein soleil. À l’inverse, en plein soleil, 23 % sont en stress thermique modéré (de 72 à 79 de THI) et 17 % en stress fort (de 80 à 89), contre respectivement 18 % et 1 % sous ombrage. L’étude met également en évidence l’importance du positionnement des haies en fonction de l’orientation de la parcelle.
« L’effet de l’ombrage est ressenti plus ou moins tôt dans la journée et profite plus ou moins longtemps aux animaux », reprend la conseillère. Elle prend l’exemple de deux des cinq prairies auscultées. Dans l’une, la différence de température (plus de 5 °C) dure onze heures (de 8 heures à 19 heures) tandis que dans l’autre, elle est de sept heures et demie et a lieu plus tard dans la journée (de 12 heures à 19 h 30). « D’autres paramètres sont à prendre en compte pour une bonne implantation des haies : exposition au vent, sens d’écoulement des eaux de pluie, etc. », complète-t-elle.
Allonger le temps de pâturage dans la journée
Dans le Bas-Rhin, l’EARL des Quatre Vents fait partie des convaincus de ces bienfaits. En février 2023, dans sa prairie pâturée de 10 ha à l’arrière de la stabulation, les associés ont planté 1 425 arbres et arbustes. Ils sont le point d’orgue, non pas d’un retour des vaches laitières au pâturage, mais de sa mise en orbite. La prairie a été semée un an plus tôt.
« À mon installation, en 1993, la stabulation actuelle de 100 logettes a été construite en dehors du village. Mes parents et moi avions fait le choix à l’époque du zéro pâturage », explique Sébastien Guth, en EARL avec son fils Jacques depuis un an et demi. La conversion à l’agriculture bio il y a cinq ans et l’encouragement de leur coopérative Alsace Lait pour du lait en démarche pâturage et non OGM ont incité les deux associés à faire le saut. La coopérative demande un minimum de 10 ares par vache et par jour à raison de six heures par jour. « La parcelle est sur un plateau de cultures dépourvu de haies. Comme l’indique le nom de notre EARL, elle est balayée par les vents. Les vaches ne disposent d’aucun ombrage pour se protéger des rayons solaires et se rafraîchir grâce au courant d’air sous les arbres », détaille Sébastien Guth. Heureusement, en attendant que les haies produisent tout leur effet, à partir d’une porte de tri en sortie de bâtiment, les laitières en traite robotisée peuvent aller et venir librement. « L’objectif est que les laitières restent plus longtemps à pâturer, ce qui allégera une bonne partie de l’année le bâtiment qui est saturé. »
DIAPORAMA






Tous les 27 mètres pour le passage des engins
Concrètement, la réalisation se décline en deux volets : deux haies en double rang sur le pourtour de la prairie et à l’intérieur, dix paddocks de 1 ha délimités par huit rangées simples. Les deux haies en double rang large de 80 cm sont respectivement composées de 272 et 393 mètres linéaires d’arbres et d’arbustes exposés nord et ouest pour, à terme, protéger les laitières du vent et du soleil en deuxième partie de journée. De même, les huit rangées sont exposées est-ouest pour créer de l’ombre dans chaque paddock. Longues de 100 à 120 mètres pour un total de 950 mètres, elles sont espacées chacune de 27 mètres pour des paddocks de deux jours de pâturage. « Le premier jour, la parcelle est coupée en deux par un fil électrique. Le second, tout l’hectare est à disposition des 100 laitières. » Cette largeur de 27 mètres n’est pas décidée au hasard. Elle permet le passage des engins agricoles, qui peuvent également longer les quatre côtés.Créer des zones d’ombrage réparties de façon homogène dans la prairie ou le paddock évite en outre l’attroupement des vaches en un seul endroit. Elles ne sont pas en compétition pour y accéder et répartissent mieux leurs bouses, avec moins de mammites associées à la clé.
17 000 € de plantation à 80 % subventionnés
L’EARL des Quatre Vents s’est formée à l’agroforesterie via les webinaires de l’association Arbres et Paysages 32 et l’accompagnement de la chambre d’agriculture d’Alsace. « Même si l’objectif n’est pas alimentaire, les feuilles des essences retenues pour la constitution de haies sont toutes consommables, indique Cécile Michel. Il faut en effet être vigilant sur les risques de toxicité. C’est pour cette raison que l’érable sycomore est écarté. » En revanche, le mûrier blanc repéré pour ses feuilles à 15 % de MAT/kg de MS est plébiscité dans les deux haies à double rang. « C’est un test car, sensible au gel, on le trouve dans la moitié sud de la France. Le double rang devrait le protéger du froid. »
Le montant de l’investissement s’élève à 17 000 €, hors travail du sol et main-d’œuvre. La journée de plantation s’est appuyée en effet sur une équipe de 25 personnes bénévoles. Ce coût intègre les 1 615 mètres de haies dédiés aux vaches, mais aussi 1 290 mètres linéaires dans deux prairies pâturées par les génisses. L’État a financé 13 600 € (80 %). « Les corsets métalliques qui protègent les plants d’arbres représentent 32 % du montant », précise Sébastien Guth. Des filets en plastique protègent, eux, les arbustes. Des clôtures électriques fixes et amovibles entourent les haies. « C’est important de soustraire les plants à la prise des vaches et du gibier. Ils sont faciles à attraper ou à endommager les premières années. » À ces 17 000 €, il faut ajouter 3 000 € de chemin et d’abreuvoirs subventionnés à 40 % par la Région Alsace et 1 000 € de canalisation.
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