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Chez Simon Čretnik (Slovénie)Des vaches laitières en stabulation libre sur tapis

C'était déjà dépaysant de découvrir la Slovénie et ses particularités agricoles, mais nous voilà aujourd'hui chez Simon Čretnik qui nous fait découvrir son bâtiment vaches laitières atypique. Il s'agit d'une stabulation libre constituée d'énormes tapis.

Ça c’est du bâtiment atypique, d'autant plus pour la Slovénie où 70 % des étables sont entravées. Chez Simon Čretnik, les vaches sont en stabulation libre toute l’année. Ici, il n’est pas question de logettes, mais il n’y a pour autant pas de litière non plus : ni paille, ni sciure, ni sable, ni compost… Ses 55 vaches laitières se couchent sur un grand tapis.

Stabulation
Le coût du projet frise les 1 million d'euros, subventionné à 40 %. L'éleveur a quant à lui emprunté sur 25 ans. ( © Terre-net Média)

La ferme se situe à Žalec, un village à 255 m d’altitude au centre du pays. Comme beaucoup d’exploitations en Slovénie, l’élevage de Simon est au cœur du village à moins de 100 m des habitations. Après plusieurs années à petite échelle (25 vaches à la traite, toutes à l'attache), Simon a opté en 2021 pour ce nouveau bâtiment (un peu plus reculé des voisins) afin de s'agrandir et produire plus. Et pari gagné : l’éleveur estime avoir pris quasiment 5 000 kg de lait par vache principalement grâce au confort. « Je voulais quelque chose qui s’intègre bien dans le paysage, qui réponde aux attentes en termes de bien-être animal et qui soit le plus confortable possible pour mes vaches », explique-t-il.

« Le confort de la prairie à l’intérieur »

Simon a investi près d'un million d'euros dans son projet, emprunté sur 25 ans. « J'ai perçu 400 000 € de subvention, il reste 600 000 € à ma charge. Je sais quoi faire de ma vie pendant quelques années », plaisante-t-il. Ici, les vaches ne sortent pas car l'élevage est véritablement enclavé dans le village sans parcelles accessibles autour. L'éleveur voulait donc un maximum de confort pour son troupeau.

C'est en allant aux Pays-Bas qu'il a découvert ce type de bâtiment en test sur une ferme expérimentale. Il a ensuite fait les démarches avec ID Agro qui l'a monté, c'est l'un des premiers de la sorte en Europe. Sa particularité : son sol artificiel en tapis drainant. C'est un système perméable composé de plusieurs couches :

- le dessus est une sorte de caoutchouc qui laisse passer l'urine au travers tout en restant sec,

- en-dessous, il y a un matelas assez souple pour permettre aux vaches de s'y coucher confortablement, mais suffisament dur pour permettre le passage d'un robot aspirateur à lisier,

- et enfin, la couche en contact avec le sol est une sorte de petit caillebotis qui collecte les urines. Ces dernières sont ensuite stockées en fosse, à part de la partie solide.

Tapis pour vaches
Dans l'aire de couchage, les vaches sont libres de s'installer où elles veulent. ( © Terre-net Média)

ID Agro estime la durée de vie du sol à 8-10 ans. Et cette part est l'une des plus coûteuses du bâtiment (on parle de 115 €/m2 sur un tôtal de 1 300–1 500 €/m2 pour l'ensemble du bâtiment).

Les vaches diposent de 15 m2 chacune, autant dire qu'elles ont de la place. « Elles se mettent où elles veulent et comme elles veulent, comme si elles étaient dehors, explique Simon. Elles ont finalement le même confort qu'en pâture tout en profitant des avantages du bâtiment (de l'ombre, pas d'insectes, de la ventilation...). » Les génisses sont juste en face, en litière sur menue paille.

Ce type de bâtiment présente aussi un autre avantage non négligeable : il permet de réduire les émissions d'ammoniac. « Il est question de 80 % d'émissions en moins, nous sommes actuellement en train de faire les mesures. » Urine et bouses sont séparées du départ, puis la phase solide passe dans un séparateur de phase pour encore bien dissocier le liquide du solide.

Génisses laitières
Les veaux sont en cases individuelles et passent ensuite en logement collectif face aux vaches. ( © Terre-net Média)

Une production en hausse

Après deux ans de mise en route, aucun regret pour l'éleveur qui a vu sa production laitière grimper en passant de 8 000 à 12 000 kg de lait par vache de moyenne. Il estime même pouvoir produire plus : « Il y a beaucoup à faire avec les données recueillies par le robot de traite. On va pouvoir agir plus en amont pour prévoir les problèmes de santé. » Les cellules ont quant à elles diminué (45 000 cellules) bien que le niveau n'ait jamais été très haut (maximum 90 000 cellules).

En effet, le robot (un Merlin de la marque Fullwood Packo) qui a été installé dans la stabulation va lui permettre un management un peu différent, avec plus d'anticipiation. Simon n'exclue pas non plus l'idée de s'équiper d'autres capteurs de détection des pathologies. Il veut aussi s'essayer aux médecines naturelles, « avec une détection précoce des problèmes, je pense qu'elles peuvent être encore plus faciles à mettre en place. »

Happy cows for happy farmer

L'éleveur parvient à sortir 50 000 litres de lait par carrière avec ses vaches hautes productrices (soit 4 lactations par vache), avec un taux de renouvellement de 22 %. Toujours plus : l'éleveur aimerait faire mieux, il compte notamment sur le confort du troupeau mais aussi sur la génétique pour améliorer sa longévité.

Stabulation vaches laitières
La nouvelle stabulation libre a permis aux vaches d'exprimer tout leur potentiel laitier. ( © Terre-net Média)

« Happy cows for happy farmer » [des vaches heureuses pour un éleveur heureux, NDLR], c'est sa devise. Car s'il passe beaucoup d'heures dans son élevage, Simon aspire aussi à se dégager du temps : « Aujourd'hui, je parviens à prendre 23 jours de congés par an. J'adore mon boulot mais j'ai une vie de famille, c'est aussi pour ça que j'ai fait ce projet. »

Des résultats économiques très dépendants du climat

La ration, calculée pour 35 litres/vache, est basée sur l'ensilage d'herbe (environ 80 %), puis l'ensilage de maïs (10 %), et des concentrés (orge produit sur l'exploitation, et maïs, soja et colza achetés à l'extérieur). Les vaches ont également une part de concentrés au robot (jusqu'à 4 kg maximum, en fonction de leur production de lait). La consommation en concentrés est de 1800 kg/VL/an.

Et c'est l'alimentation qui cause le plus de soucis à l'éleveur : « Nous avons eu 2 ans de sécheresse ici en Slovénie donc nous avons toujours manqué de fourrage. Il a fallu faire des compromis et acheter à l'extérieur. » Cela a notamment fait fortement grimpé le coût alimentaire : jusqu'à 55 % du prix du lait (430 €/1 000 l actuellement) contre 40 à 45 % en temps normal. Et l'année dernière était assez spéciale : « On avait certes beaucoup de flux de trésorerie grâce au prix du lait (qui a grimpé jusqu'à 500 €/1 000 l), mais avec peu de profit en bout du compte car nous avons acheté beaucoup de nourriture. »

« Heureusement cette année on devrait avoir assez d'eau, mais je pense qu'on n'arrivera pas à gagner en lait, nous resterons probablement au même niveau que l'an dernier voire un peu moins parce qu'on doit encore faire des ajustements suite aux deux dernières années. » L'éleveur souhaite améliorer ses connaissances sur l'herbe pour en augmenter la productivité justement.

Quant à ses projets pour demain, Simon souhaite faire grossir son troupeau pour atteindre 100 vaches traites d'ici quelques années. En revanche, il sera difficile pour lui d'agrandir sa surface : « Je n'ai que 16 ha en propriété, le reste est en location et c'est vraiment très cher pour devenir propriétaire. On parle de 70 000 €/ha. » Et aujourd'hui, l'éleveur a déjà 52 parcelles pour 40 ha (dont la plus loin se situe à 11 km du siège de l'exploitation).

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