« Le sol idéal pour les vaches laitières n’existe pas, mais on peut s’en approcher sans se ruiner »

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François Gervais,chargé d’études à l’Institut de l’élevage, service « environnement et bâtiments ». Auteur d’une étude longitudinale sur les sols innovants pour vaches laitières sur les volets de l’hygiène, la santé et le comportement des animaux. Watier
François Gervais,chargé d’études à l’Institut de l’élevage, service « environnement et bâtiments ». Auteur d’une étude longitudinale sur les sols innovants pour vaches laitières sur les volets de l’hygiène, la santé et le comportement des animaux. Watier (©)

Pour réussir à tenir un sol propre, le couloir à double pente est une piste intéressante. Pour le coût, réaliser un béton durable est impératif. Pour le confort et la santé des animaux, les sols mixtes combinant surfaces abrasives et confortables sont à étudier mais avec des précautions.

Quels sont les principaux défauts identifiés dans les sols des aires d’exercice ?

François Gervais : La pente des sols pleins est souvent très faible (0,5 % en moyenne sur nos élevages suivis) et parfois, il y a des contrepentes. Cela a des conséquences négatives avec un mauvais écoulement des liquides, des raclages moins efficaces, donc des zones toujours humides et sales. La propreté des pieds des animaux est alors difficile à maîtriser, ce qui est un facteur de risques majeur des infections des pieds, comme la dermatite digitée. Pour ces raisons, il est recommandé en cas de construction d’avoir environ 2 % de pente longitudinale. Il est aussi envisageable de mettre en place des pentes de 2 à 3 % vers le milieu des couloirs, à condition de disposer d’un canal d’évacuation central. En cas d’absence de pente (ou très faible), une solution avec caillebotis peut être envisagée.

La propreté des zones non raclées (passage entre couloirs, retour de salle de traite…) est aussi à considérer avec une bonne circulation des animaux, le moins de déjections possible, le moins de surface à nettoyer manuellement. Par exemple, des aménagements sont envisageables, notamment pour positionner les abreuvoirs hors des passages afin que les animaux défèquent dans les couloirs raclés, ce qui n’est pas courant.

D’une manière générale, il est aussi possible d’améliorer le raclage en augmentant sa ­fréquence et en adaptant les racleurs avec des éléments non métalliques en contact avec le sol (caoutchouc ou brosses) correspondant à des pièces d’usure. Des solutions apparaissent sur le marché.

Un autre défaut qui peut concerner tous les types de sol est leur glissance excessive, en lien avec leur confection et leur usure.

Le sol idéal existe-t-il et à quel prix ?

F.G. : Le sol idéal doit présenter plusieurs caractéristiques répondant aux déplacements des animaux, à la santé et la propreté des onglons. Par exemple, le sol doit avoir une adhérence suffisante (non glissant), sans être trop abrasif (usure sans excès des onglons), ne doit pas être trop dur notamment sur les zones de piétinement, doit rester propre et sec, donc facilement nettoyable…

De ce point de vue, le sol idéal n’existe pas vraiment. Par exemple, les tapis sont plus confortables, mais aboutissent à un manque d’usure des onglons. Les sols durs sont plus abrasifs, mais peuvent devenir glissants et sont moins confortables…

Pour le coût, il faut raisonner sur la longévité des sols et les différentes phases possibles pour les corriger avant leur réfection finale. Par principe, la solution de départ doit durer le plus longtemps possible, sans mesures correctives, tant qu’elle donne satisfaction, notamment sur le comportement et la santé des vaches. Les solutions correctives, comme le rainurage mécanique, la scarification… permettent de corriger un sol qui devient glissant et ainsi d’augmenter sa longévité. Enfin, les solutions de réfection seront choisies selon les caractéristiques de départ des sols : leurs pentes, la hauteur des seuils de logettes ou des marches… Les choix et la qualité des sols au départ sont déterminants sur leur longévité, et donc sur leur coût.

Par exemple, pour les sols pleins, le béton reste la solution de base qui restera la moins coûteuse, même avec des finitions complémentaires comme des empreintes sur béton frais exécutées par un professionnel. Autant réaliser des bétons durables et antidérapants dès le départ pour retarder le plus possible les solutions correctives, comme le rainurage mécanique. Par ailleurs, le béton reste la base d’autres types de sol, comme les tapis ou l’asphalte, plus coûteux. Cela explique que ce sont le plus souvent des solutions de réfection de bétons usagés ou devenus trop glissants.

De nombreuses innovations arrivent sur le marché (caillebotis de nouvelle génération, tapis améliorés…). Ces sols sont plus coûteux et peuvent se justifier s’ils apportent des améliorations pour les animaux. Mais ils sont à réserver pour des temps d’utilisation prolongée du bâtiment avec des raclages fréquents, en particulier pour des vaches plus sensibles, hautes productrices. Pour limiter l’impact sur les coûts d’investissement, ils peuvent aussi concerner des zones de l’aire de vie plus exigeantes, par exemple où les animaux piétinent comme le couloir d’alimentation, ou les aires d’attente des salles de traite ou des robots.

Le béton rainuré simple est-il dépassé ?

F.G. : Le rainurage mécanique sur béton après durcissement ou sur les caillebotis est une solution corrective très intéressante s’ils deviennent glissants.

Mais il faut le faire le plus tard possible et même au-delà de dix ans, tant que le sol donne satisfaction. Pour les bétons coulés sur place, cela dépend de la qualité de leur finition. Ce rainurage peut déstructurer le béton s’il est réalisé trop tôt. Il ne faut pas le faire avant un an, ce qui nécessite une finition de base des bétons par brossage et balayage modéré. D’après nos enquêtes, une empreinte sur béton frais en complément et correctement réalisée peut permettre de retarder ce rainurage jusqu’à une dizaine d’années.

Les sols mixtes paraissent intéressants, quelles sont les bonnes associations ?

F.G. : Comme le sol idéal n’existe pas, nous avons étudié des solutions de sols mixtes, différentes selon les couloirs où les effets peuvent se compenser. Par exemple, un sol abrasif sur le couloir arrière peut compenser le manque d’usure des onglons des sols plus souples sur le couloir ­d’alimentation. De nombreux éleveurs disposent de ces sols mixtes pour ­plusieurs raisons : transformation de l’aire paillée en logettes (le nouveau couloir peut être différent du couloir d’alimentation restant en place) ; aménagement du couloir d’alimentation avec un tapis, avec maintien du couloir arrière en place ; ou encore, réfection d’un couloir avec de l’asphalte. Il n’y a pas vraiment d’association idéale car chacune se justifie pour différentes raisons : effets combinés sur les onglons, adaptation des zones de piétinement, optimisation des coûts, réfection partielle des sols usagés, aménagement de bâtiments existants… Mais ces solutions ont des conditions de réussite. Par exemple, il faut que tous les animaux accèdent de manière équilibrée en temps aux différentes zones et qu’ils se répartissent bien. Le nombre de rangées de logettes et la conduite guidée ou non de la traite robotisée peuvent donc déterminer la réussite des sols mixtes.

Propos recueillis par Dominique Grémy

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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Herbe

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