Patrick Mercier a la patience d'un paysan mais pas la prudence d'un Normand. Voici presque vingt ans qu'il bataille pour un véritable ancrage de l'AOC camembert à la Normandie.
On aime tous le combat d'Astérix face à l'armée romaine. On ne peut éprouver que de la sympathie pour celui de Patrick Mercier pour la défense de l'AOP camembert de Normandie. Sous son impulsion, l'appellation vient d'envoyer devant les tribunaux le numéro deux mondial des produits laitiers, Lactalis, mais aussi le puissant groupe fromager Bongrain et la coopérative Isigny Sainte- Mère. Motif : usurpation de la notoriété régionale avec la mention « fabriqué en Normandie » sur leurs camemberts non-AOC. « Le processus démocratique a été respecté pour prendre cette décision », insiste l'éleveur ornais, vice-président de l'ODG depuis le 9 mars, remplacé au poste de président par le fromager Thierry Graindorge. « Le respect des règles de vote permet de résister à de fortes pressions et de dormir plus tranquillement. » Pas facile en effet de batailler pendant des années contre le géant lavallois quand on est soi-même producteur Lactalis.
PUGNACITÉ
« Je ne compte pas les coups de fil, les interventions publiques contre moi. » Seulement, convaincu du bien-fondé de son engagement, Patrick n'est pas du genre à lâcher le morceau. « Je ne me laisse jamais influencer. Plus j'ai des pressions, plus je résiste, ironise le Normand aux yeux bleus. Quand Lactalis réagit vivement, je me dis : “Ah, je suis dans le vrai” ! » Sans doute ses conditions d'installation difficiles dans les années quatre-vingt lui ont elles aussi forgé cette pugnacité.
CONTRE LE NIVELLEMENT
L'éleveur refuse que son lait soit payé selon les marchés mondiaux. « Je suis prêt à faire des efforts mais pas que mon prix du lait baisse, lâche-t-il. Le producteur n'est pas la variable d'ajustement des industriels pour la conservation de leurs marges. » Aussi, lorsqu'une réflexion débute en 1995 sur l'écriture d'un cahier des charges de production pour les trois AOC fromagères bas-normandes, il n'hésite pas à se lancer dans l'aventure. Non sans débats houleux, elle aboutira treize ans plus tard à un nouveau décret pour chacune. « Les valeurs normandes d'une vache de race normande nourrie à l'herbe ne font plus débat au sein des producteurs AOC, se réjouit-il. S'ils ne les avaient pas défendues, elles seraient balayées aujourd'hui par l'industrialisation du lait. »
NOUVEAU CHALLENGE
Avec Patrick Mercier et son épouse Francine, la tradition normande n'en finit pas de se renouveler. Leur lait AOC est aussi bio depuis le 1er mai. Le couple vient de quitter Lactalis. Une partie est désormais collectée par Biolait. L'autre sera transformée à la ferme à partir du 1er juillet pour commercialiser un camembert fermier, AOC et… bio. « Notre projet est source d'emplois. Nous embauchons un fromager et espérons deux autres embauches l'an prochain. » Une autre façon de décliner l'ancrage au terroir.
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