ENSILAGE D'HERBE : DE LA QUALITÉ EN COUPE PRÉCOCE

Cette année encore, la valeur des ensilages d'herbe est hétérogène. Les éleveurs qui ont su saisir les occasions météorologiques pour ensiler précocément obtiennent des fourrages de qualité très correcte.© CHRISTIAN WATIER
Cette année encore, la valeur des ensilages d'herbe est hétérogène. Les éleveurs qui ont su saisir les occasions météorologiques pour ensiler précocément obtiennent des fourrages de qualité très correcte.© CHRISTIAN WATIER (©)

ENCORE UNE ANNÉE ATYPIQUE POUR LES CHANTIERS D'ENSILAGE D'HERBE 2013. Le printemps froid et humide a souvent conduit à reporter les dates de récolte à un stade végétatif avancé qui pénalise les valeurs alimentaires. « La pluviométrie importante et une fertilisation azotée peu efficace par temps froid expliquent aussi la faible concentration en éléments nutritifs de l'herbe, rapporte Jean Zapata, conseiller en fourrages au contrôle laitier du Puy-de-Dôme. Par ailleurs, les conditions climatiques sont à l'origine de taux de matière sèche (MS) et de cellulose faibles qui rappellent l'intérêt d'utiliser des conservateurs pour prévenir les risques de butyriques. » Ces difficultés récurrentes à ensiler une herbe de qualité soulignent la nécéssité de préparer la chaîne de récolte en amont, de façon à saisir les premières fenêtres climatiques favorables à une récolte précoce.

« Pour répondre à cet enjeu, il faut que la fertilisation, l'étaupinage et l'émoussage soient aussi réalisés précocement, dès le démarrage en végétation qui correspond à une somme de température de 200°C (base 1er février), rappelle le conseiller. Un repère que l'on retrouve autour du 10 mars en plaine, le 25 mars en semi-montagne et vers le 10 avril en montagne. »

DANS LE MASSIF CENTRAL

Quelles valeurs alimentaires ?

Comme chaque année, un petit groupe d'éleveurs a réussi à ensiler avant la somme de températures de 700°C, repère pour une fauche au stade début épiaison, qui n'a été atteint en plaine qu'autour du 19 mai (en année « normale » ce stade est atteint vers le 1er mai en plaine, le 15 mai en semi-montagne et le 25 mai en montagne). « Ce sont des éleveurs qui devancent les recommandations et fauchent à une somme de température comprise entre 600 et 650°C, correspondant davantage au stade végétatif qu'au stade début épiaison, constate Jean Zapata. Ils acceptent une baisse de rendement pour privilégier la qualité, mais misent aussi sur les deuxième et troisième coupes pour rattraper les stocks. Cette pratique présente un intérêt pour la qualité et la quantité des repousses, que ce soit pour le pâturage ou les regains. » La valeur de ces ensilages est de 14,7 % de MAT, 0,93 UFL, 90 g de PDIN, 75 g de PDIE, 21,6 % de cellulose et 29 % de MS. En comparaison, la valeur moyenne des ensilages 2013, réalisés majoritairement début juin, est de 0,84 UFL, 83 g de PDIN, 68 g de PDIE, 13,2 % de MAT et 31,3 % de MS, pour une concentration de 0,78 UFL/UEL.

Les conseils pratiques

Deux types de ration de base caractérisent les systèmes d'alimentation du Massif central : les rations tout herbe avec 50 % d'ensilage + 25 % de regain + 25 % de foin, et des rations 50 % ensilage d'herbe + 50 % de maïs. Au regard de la valeur moyenne des ensilages d'herbe, les rations tout herbe nécessiteront une forte complémentation en céréales, « jusqu'à 6 kg pour répondre à un objectif de production de 25 l. Pour des rations mixtes maïs-herbe, la faible teneur en MAT de l'herbe rend plus difficile le maintien d'un niveau de production élevée à un coût maîtrisé. Dans ce cas, il faut privilégier le colza ou le colza-soja aux pulpes et aux luzernes déshydratées qui risquent de déconcentrer la ration ».

EN LORRAINE

Quelles valeurs alimentaires ?

Dans les départements lorrains, on retrouve deux types de fourrages dont la valeur dépend là aussi de la date de récolte. D'une part, les ensilages de début mai, où une courte fenêtre météo sans pluie a permis à certains d'intervenir. Ces ensilages, réalisés en conditions de portance difficiles, se révèlent pauvres en MS et déséquilibrés, au regard des analyses faites par Optival : 20 % de MS, 14,5 % de MAT, 0,75 UFL, 81 g de PDIN, 57 g de PDIE, 16 g de PDIA et 65 % de DMO. D'autre part, on retrouve les ensilages réalisés au cours de la première quinzaine de juin. Le stade végétatif avancé limite leur valeur azotée et énergétique. « Heureusement, les températures basses ont également entraîné un retard de végétation de quinze jours, souligne Jérôme Larcelet, expert en nutrition d'Optival. Ce qui a permis d'ensiler à un stade épiaison pas trop avancé un fourrage de qualité moyenne, similaire à celui de la campagne 2012, plus équilibré et donc plus facile à corriger. » Les analyses laissent apparaître des valeurs moyennes de 40 à 45 % de MS, 11 % de MAT, 0,8 UFL, 70 g de PDIE, 60 g de PDIN, 23 g de PDIA et 67 % de DMO.

Les conseils pratiques

« Les ensilages précoces qui représentent un quart de la récolte, sont riches en azote soluble, pauvres en UF et déséquilibrés dans leur rapport PDIN/PDIE. Il faut donc limiter leur incorporation dans la ration des vaches à haut potentiel, apporter une part de tourteaux tannés pour corriger leur faible valeur en PDIA et corriger le déficit énergétique avec des céréales. En outre, la faible teneur en MS de ces ensilages, distribués en complément des maïs 2013 qui s'annoncent eux aussi relativement humides (32 à 33 % de MS), doit amener à respecter les apports de fibres efficaces. Enfin, les teneurs élevées en minéraux laissent suspecter la présence de terre dans ces fourrages, à cause de chantiers réalisés en conditions difficiles (120 g/kg MS contre une norme de 60 à 100 g/kg de MS). Il y a donc un risque au niveau de la conservation et des butyriques qui appelle à être très vigilant sur l'hygiène de traite. » Dans la mesure du possible, il est donc préférable de distribuer ce fourrage aux génisses, avec du foin ou de la paille pour assurer le bon fonctionnement de la panse. Concernant la faiblesse en MAT des récoltes tardives, il est difficile de miser sur elles pour envisager des économies de correcteur azoté dans les rations à base de maïs.

EN NORMANDIE

Quelles valeurs alimentaires ?

Les reports de fauche dans le contexte de printemps froid et humide ont amené beaucoup d'éleveurs à privilégier le pâturage, puis à assurer les semis de maïs, avant de réaliser du foin en juin sur les prairies naturelles. Ils ont misé sur l'ensilage des dérobées à base de ray-grass italien et les enrubannages d'automne pour rattraper les stocks. La valeur moyenne des ensilages du printemps 2013 sur le territoire est de 0,82 UFL, 68 g de PDIN, 65 g de PDIE 11,6 % de MAT et 33 % de MS. Mais les éleveurs qui ont su saisir les opportunités pour réaliser des fauches précoces, autour du 15 avril, ont obtenu des fourrages de valeur très intéressante, de 0,90 UFL, 16 % de MAT et 90 g de PDI. Les fauches les plus tardives, réalisées à un stade montaison avancé après le 15 mai, ont des valeurs de 0,75 UFL, 8 % de MAT et moins de 60 g de PDI. « Cette forte disparité rend les analyses indispensables pour ne pas faire de graves erreurs de rationnement, que l'ensilage soit consommé par les laitières ou par les génisses », rappelle Olivier Leray, référent fourrage à Littoral normand conseil élevage.

Les conseils pratiques

Un ensilage précoce à 0,9 UF et 90 g de PDI répond aux objectifs de densité énergétique et protéique de la ration de base des laitières. Incorporé à raison d'un tiers de la ration en complément du maïs ensilage, ce fourrage permet l'économie de 800 g à 1 kg de soja/VL/j, par rapport à une alimentation en maïs plat unique. « À condition de disposer de suffisamment de stocks ! Car pour améliorer l'autonomie protéique via une récolte précoce de l'herbe, il faut pouvoir accepter des niveaux de rendements de 2,5 t/ha sur une coupe pour gagner en qualité. Cette notion d'autonomie implique donc un raisonnement global, tant au niveau du coût de la ration que du bilan fourrager, pour allier les objectifs techniques aux objectifs économiques. »

JÉRÔME PEZON

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
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Herbe

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