
Les Néerlandais sont des maîtres en la matière, pour le fromage ou le foot.
Curieux ce côté Docteur Jekyll et Mister Hyde des Européens du Nord. À la fois si respectueux des réglementations quand ils les ont initiées ou qu'elles handicapent leurs voisins. On l'a vu, il y a quelques années, avec le lait cru accusé de tous les maux. Mais aussi toujours prêts à flirter avec les limites quand il s'agit de faire fructifier leurs propres intérêts. On vient et on continue de le vivre avec les Pays-Bas, prêts à tout pour gagner des parts de marché d'emmental ou une finale de Coupe du monde.
Pour les fromages, le tour de passe-passe pour contourner la législation française du décret fromages qui définit l'emmental, est limpide. Acte I : on s'appuie sur la dérogation d'une autre législation, celle du Codex alimentarius qui s'applique à l'export. Cette dérogation qui permet de faire quasiment ce que l'on veut sous réserve de ne vendre que dans son propre pays, a donné naissance à un nouvel emmental. Fini, aux Pays- Bas, le bloc d'un poids minimal de 40 kg de la norme Codex. Et c'est ainsi que les chaînes de gouda, fromage plus petit et moins cher à produire, crachent de l'emmental compétitif pour conquérir des marchés. Acte II : on brandit la réglementation européenne de libre circulation des produits pour prétendre exporter en France, en toute légalité, ce pseudo-emmental. Grillés les emmentalistes français qui se doivent de respecter le décret fromages et fabriquer des meules ou des blocs de 40 ou 60 kg, d'une hauteur minimale de 13 cm. Avec, en plus, des ouvertures de la taille d'une cerise à une noix. Il n'y a rien de tout cela dans les tranchettes « d'emmental » made in Nederlands vendues en France. Elles viennent de blocs de 15 kg et 9 cm de haut, comme l'assure le SIGF au vu de ces tranchettes. Du râpé, qui vient aussi des Pays-Bas et d'ailleurs, il ne peut rien dire en l'absence de croûte mais seulement suspecter, vu son prix trop compétitif, qu'il ne s'agit pas d'emmental râpé version décret fromages. Acte III : on mise sur une administration française frileuse à engager une procédure devant la Cour de justice européenne, contre deux poids lourds dans leur domaine et au bras long : le numéro un de l'industrie laitière aux Pays-Bas et l'une des principales enseignes de la grande distribution française.
Dans le football, même combat. Acte I : on mise sur le fait que l'arbitre n'osera pas expulser de joueurs en début de match et gâcher une finale de la Coupe du monde. Acte II : on oublie le fair-play de cette équipe néerlandaise qui, en 1974, soulevait la sympathie du public face à l'Allemagne. On la troque pour une équipe d'« Oranges » gonflés à bloc. Acte III : on troque le tacle régulier pour un croc-en-jambe par-derrière, histoire d'intimider. Et comme ça ne suffit pas, l'interception du ballon à 1,50 m se transforme en coup de pied frontal, version mae-geri. Mais pas pied nu comme au karaté, version foot, semelle et crampons dans le sternum de l'adversaire ibérique. Par chance, l'histoire se termine bien pour ceux qui méritent de gagner. La finesse du jeu espagnol triomphe du jeu trop musclé des Bataves.
On dit des Pays-Bas qu'ils sont l'autre pays du fromage. Mieux vaudrait dire « étaient », ou « sont » mais pour usurper la notoriété des autres. Revenez donc aux fondamentaux, réapprenez à émoustiller nos papilles. Car ce fromage que vous faites, tôt ou tard, vous trouverez plus compétitif que vous pour le faire. Il est aussi le moyen le plus sûr de voir demain le consommateur passer directement du plat chaud à la banane ou laisser la place aux céréales au petit-déjeuner. Il y a autant de finesse gustative dans votre pseudo-emmental que de finesse dans votre technique footballistique.
JEAN-MICHEL VOCORET
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