On n'est pas aidés !

C'est la crise. Faut-il bloquer les routes ? Pas sûr. Faut-il interpeller les politiques ? Certainement. Faut-il se remettre en cause ? Assurément. Je veux bien entendre les conseils de toutes nos organisations professionnelles et para-agricoles qui nous exhortent à faire des économies et constituer de l'épargne de précaution. Encore eut-il fallu l'anticiper, car c'est avant la tempête qu'il faut vérifier que voiles et cordages sont en bon état.

Je veux bien partir à la course à la performance avec les Allemands, les Hollandais, les Irlandais... mais pas en traînant des boulets, que dis-je, des enclumes. Tous nos éminents organismes de conseil nous expliquent comment faire des économies, mais pas un ne m'a proposé de baisser de 30 % le coût de ses prestations. « On ne peut pas diminuer nos coûts car nous avons des charges de structure et des salariés », nous expliquent-ils, la bouche en coeur. Mais moi aussi, j'ai des charges de structure et si je n'ai pas de salarié, je n'ai pas l'intention de bosser pour la peau. Par contre, on ne me demande pas si je peux baisser mes coûts. On me l'impose !

Prenez mon centre de gestion, qui vient de revoir son plan comptable et la présentation de ses documents à grands frais. Sur la page « Prix d'équilibre » de mon atelier lait figure en bas une rubrique « Autres activités et céréales ». Cela veut dire que si tu as un atelier escargots ou accueil à la ferme, les résultats viennent minorer ton prix d'équilibre. C'est carrément irresponsable qu'un organisme que l'on paye ne soit même pas capable de sortir notre prix du lait « net » ! D'autant plus irresponsable que ces chiffres arrivent par des voies détournées chez nos industriels laitiers, qui s'empressent de s'en servir dans les négociations. Cet artifice permet de minorer le prix d'équilibre et de le ramener de 380 à 350 € en moyenne pour la Bretagne. Nos contrôles laitiers proposent une réduction de facture uniquement si tu acceptes de choisir une formule sans appui technique, ou sans peseur ou contrôle alterné. Ce n'est pas une diminution du coût, mais une diminution du service. Pendant ce temps, on te demande plus de qualité, de normes, de traçabilité... pour un prix du lait en baisse : « Travailler plus pour gagner moins. »

Avec 70 à 80 € de baisse en 2016 par rapport à 2014, il va falloir boucher des trous de trésorerie de plusieurs dizaines de milliers d'euros à coups d'économie de 500 € par ci, 1 000 € par là. Si tu as la chance de payer encore un peu de MSA et d'impôts, ces deux-là vont t'en piquer 42 %. Autant essayer de remplir le tonneau des Danaïdes avec une petite cuillère.Quand nos conseilleurs nous parlent de retrouver de la compétitivité, encore faut-il que la législation s'adapte. Que dire de l'option N-1 annoncée par la MSA et Le Foll ? Il faut dégager moins de 4 200 € de revenu pour y prétendre, soit 350 €/mois. C'est carrément du « foutage de gueule ». C'est comme essayer de mettre une rustine sur un pneu éclaté alors qu'il aurait suffi de le regonfler lorsqu'il en était encore temps.

Il a fallu la pression des bonnets roses (producteurs de porcs sans étiquette) pour obliger les cinq groupements bretons indépendants à fusionner afin de concentrer l'offre et mieux négocier. Prenons exemple et restructurons nos OPA. Et si les contrôles laitiers fusionnaient avec les GDS ? Leurs missions sont très proches. N'y aurait-il pas là matière à économies ? Administrateurs, manifester, c'est bien, mais poussez aussi une gueulante lors du prochain CA et secouez un peu le cocotier. La restructuration, ce n'est pas que pour nos fermes.