Lors de la crise laitière de 2009, Bruno Le Maire avait demandé à la Commission une forte régulation des marchés avec une « contractualisation mieux que les quotas ». Il avait aussi plaidé pour modifier le droit de la concurrence et ainsi donner plus de pouvoir au Cniel et aux futures organisations de producteurs (OP) appelées à négocier face aux laiteries. Ainsi il fut décidé de faire un « mini-paquet lait » sans attendre la nouvelle Pac post-2013. Où en est-on après deux ans d'intenses travaux qui ont conduit aux propositions de la Commission en décembre 2010, celles du Parlement en juillet dernier et aux négociations en cours au Conseil des ministres ? Réponse, au mieux, début 2012. Mais ne rêvons pas : l'UE ne devrait décider que de changements mineurs pour adapter ce secteur à la fin des quotas en 2015 et le faire entrer dans un marché libéral.
Pas de révolution à attendre du mini-paquet lait
Aux dernières nouvelles, à Bruxelles, ce mini-paquet ne concernera la France que marginalement. Sauf sur un point, celui de la durée des contrats. S'appuyant sur le principe de subsidiarité, le Parlement propose que chaque État puisse fixer une durée minimale, comme c'est déjà le cas en France (cinq ans). La Commission et plusieurs pays sont contre. Pour ces derniers, la durée d'un contrat, les volumes de lait engagés et les prix doivent être soumis à négociation. Si la France perd, elle devra modifier son décret sur l'un des aspects importants de sa récente contractualisation. À l'instar de ce qui a été décidé par Paris, le Parlement européen voudrait rendre les contrats obligatoires dans toute l'Europe. La Commission et le Conseil sont contre. Ils souhaitent laisser ce libre-arbitre aux pays. À Bruxelles, on note au passage qu'il est contradictoire de vouloir rendre obligatoire les contrats pour réguler les marchés et permettre aux coops (collectant au moins 50 % du lait de l'UE) d'y déroger, comme prévu. Concernant le droit de la concurrence de l'UE, pas de révolution en revanche à attendre pour les Français. Il ne devrait évoluer qu'à la marge pour permettre à des OP assez fortes de se constituer.
Mais il ne changera en rien les limites que la Direction générale de la concurrence européenne a imposées au Cniel en juin 2008 (et déjà acté dans la LMA). Inutile donc de rêver qu'une interprofession française ou européenne, comme plébiscitée par l'EMB(1) et les JA, s'immisce dans la gestion des volumes ou des prix. Les OP, elles, seront juste encouragées sur le papier. Charge à elles de se prendre en main pour tenter de négocier des contrats équilibrés. «Malheureusement, en France, ces OP sont au coeur de luttes entre les syndicats et les coopératives n'en veulent pas », remarque-t-on à Bruxelles. Autant dire que la maîtrise globale du marché laitier, souhaitable pour maintenir un maximum d'exploitations sur le territoire, n'est pas pour demain… sauf inflexion radicale de la politique libérale de l'UE. Voulu par la France, ce mini-paquet lait ne lui servira donc qu'à obliger Paris à sortir un décret sur la constitution des OP. « En 2009, avec des prix du lait assez bas, les producteurs français se plaignaient de la volatilité des prix et voulaient une forte régulation des marchés… En 2011, avec un prix du lait très élevé, c'est le grand silence …. On se demande même si la France veut toujours un mini-paquet lait », observe avec flegme un haut fonctionnaire de l'UE.
H. DEBÉARN ET J.-M. VOCORET
(1) European Milk Board
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