
Devant l'incapacité de l'interprofession à réguler le marché, les producteurs réfléchissent à réactiver la voie politique pour obtenir gain de cause.
La Suisse qui, depuis 2009, vit dans l'après-quotas est régulièrement citée par les ténors de l'Office du lait comme l'exemple à ne pas suivre. Cela pour illustrer le danger à mettre le doigt dans des organisations de producteurs (OP) par laiteries et démontrer que seule une OP transversale permettra aux producteurs de vraiment peser face à l'industrie. Ils ont raison, au moins sur le second point. D'ailleurs, la FNPL ne dit pas autre chose en présentant les OP par laiteries comme une étape. La finalité de son projet d'Ocep est bien une organisation interentreprises par bassins de production. Certes, la multiplication des OP a réduit à néant les espoirs des Suisses de jouer d'égal à égal avec l'industrie au sein de l'interprofession créée en 2009 pour réguler le marché. Mais ce qu'on oublie, c'est que cette situation est la conséquence du choix de certains, évidemment encouragés par les laiteries, de jouer cavalier seul. Pas facile de résister à la tentation de tripler sa référence quand on a été « bridé » pendant des années, et que l'on vous persuade qu'en grossissant, vous serez compétitif et aurez plus de chances de résister que votre voisin… Le projet initial de la Fédération des producteurs suisses de lait (FPSL), défendu par les syndicats minoritaires, prônait la création d'un pool national regroupant les producteurs. Cela via cinq fédérations transversales régionales, l'équivalent de nos bassins.
La motion Aebi réactivée ?
Au-delà, ce qu'il faut retenir de la Suisse est surtout que, sans intervention du politique, l'équilibre du marché est une chimère. C'est la raison pour laquelle FPSL réfléchit à réactiver la voie politique via la motion Aebi. Cette dernière validée par le Conseil national (chambre des députés), mais mise en sourdine par le Conseil des États (équivalent de notre Sénat), ambitionne de laisser aux seuls producteurs la gestion de l'offre. Cela, en les autorisant à pénaliser ceux qui dans leurs rangs produisent sans se soucier du marché.
Car le fait est là, quand bien même une interprofession bardée de pouvoirs, comme ici, prend des décisions à l'unanimité, il y aura toujours en son sein des OP téléguidées par des laiteries jouant un double jeu, ou des OP craignant des représailles de leur collecteur, qui ne se plieront pas aux règles. Et impossible de les contraindre, sans un pouvoir qui relève d'un acte politique.
Imaginez la difficulté quand en plus, le gouvernement est ouvertement libéral. Exemple récent. Pour en finir avec la montagne de beurre, l'interprofession avait décidé d'un prélèvement de 4 c sur les quantités produites en plus de la dernière référence connue en 2008-2009… une façon de responsabiliser à minima ceux qui ont le plus contribué aux 10 000 t de stock de beurre. Résultat : le Conseil fédéral, qui s'était engagé à donner la force obligatoire à l'interprofession si la décision était unanime, s'est dédit. Il a botté en touche, jouant sur le recours contre cette contribution déposée par quatre OP de Suisse orientale ne pesant que 6 % du lait national.
JEAN-MICHEL VOCORET
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