Face au boom du biogaz, dont le nombre d'unités atteint 7 000 en 2011, les laiteries allemandes s'attendent à une hausse limitée de la production laitière après 2015. « Elle ne dépassera pas 4 à 5 %, prédit Helmut Stuck, directeur des approvisionnements de la coopérative Hochwald. Les élevages laitiers vont manquer de surfaces pour produire plus. » Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 700 000 ha de maïs-ensilage sont implantés pour alimenter ces installations. Soit 38 % des surfaces de cette culture, qui ont progressé de 57 % entre 2003 et 2010. Parallèlement, 227 000 ha de prairies permanentes ont été retournés dans la période 2003-2009 (5 % de la surface). La concurrence entre biogaz et élevage laitier est d'autant plus forte que ces unités sont principalement implantées dans des zones laitières. C'est le cas en Bavière où l'on en compte le plus : 2 000 en 2010 (plus 50 % en quatre ans). Ce land est aussi le plus laitier du pays puisqu'il produit 22 % de la collecte nationale. On assiste alors à une véritable pression foncière.
La rémunération peut dépasser 25 c/kWh
« Dans certains länder, les fermages peuvent dépasser 1 000 €/ha, déclare Anne Mottet, chef de projet à l'Institut de l'élevage. Au nord, des éleveurs témoignent d'un doublement du prix. » La pression est telle que des producteurs de biogaz se disent prêts à payer jusqu'à 30 % plus cher leur fermage.
En 2004, la mise en place d'une prime pour encourager la production d'électricité à partir de cultures énergétiques explique cette situation. D'un montant de 6 c/kWh à l'origine, ce bonus a en plus été revu à la hausse en 2009 pour atteindre 8 c/kWh. « Au total, avec la prime pour la valorisation des effluents d'élevages (minimum 35 %), la chaleur, le bonus technologique… certaines installations peuvent percevoir plus de 25 c/kWh. »
À ce niveau de prix, le biogaz n'est plus considéré comme un simple complément de revenu pour les éleveurs laitiers. Le centre de recherche agricole allemand VTI a calculé le seuil à partir duquel il n'est économiquement plus intéressant de produire du lait. Pour une exploitation de 100 vaches à 8 500 kg de lait et dont la ration est composée de 55 % de maïs, il s'élève à 320 E/1 000 l. Pour une autre de plus petite taille (60 vaches à 7 650 kg lait et 40 % de maïs), le seuil atteint 370 E. Ce qui signifie qu'en 2010, malgré une conjoncture laitière plutôt favorable, le prix du lait moyen payé en Allemagne (310 E/1 000 l) n'était pas suffisant comparé à la rentabilité du biogaz. « La concurrence est aussi très forte pour l'engraissement. Pour un atelier de 380 jeunes bovins nourris avec du maïs-ensilage, le prix de la carcasse ne devrait pas être inférieur à 3,60 E/kg. Une valorisation difficile à atteindre. L'an dernier, les JB classés R3 étaient rémunérés de 3,20 à 3,30 E/kg. »
En 2012, la révision de la loi EEG, qui encadre le développement des énergies renouvelables, pourrait changer la donne. Certains demandent l'abandon de ce bonus. D'autres prônent le développement de cultures dérobées pour limiter les surfaces en maïs.
NICOLAS LOUIS
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