Pourquoi mettre sur la table le calcul de l'indicateur beurre-poudre(1) ?
Dominique Chargé : Nous demandons surtout une réflexion interprofessionnelle sur les débouchés du lait français. Le secteur laitier est désormais exposé aux variations de prix. Comment en protéger les produits français et en même temps participer à la croissance mondiale des produits industriels (PI), du cheddar ou de la mozzarella ? Si la France a su créer un marché des PGC innovant, son parc industriel a un retard d'investissement pour occuper celui des produits standard. S'ajoute un troisième défi pour les coops : accompagner la volonté de leurs adhérents de produire plus. Ces volumes additionnels ne doivent en aucun cas provoquer un effet domino et détériorer la valorisation des PGC. Dans ce but, le Cniel a reconnu le principe des volumes et prix différenciés, sous l'impulsion de la FNCL. Ce n'est pas suffisant. Les coopératives, comme les privés, ont besoin de lisibilité. C'est à cette condition qu'elles développeront, ou non, les PI et les commodities.
Modifier l'indicateur beurre-poudre aura une incidence sur le prix du lait. Que lui reprochez-vous ?
D. C. : Il ne reflète pas correctement le marché, surtout celui de la poudre. En 2010, sa facturation était de 200 à 300 €/t en dessous de l'indicateur Cniel. Le prix de la poudre est calculé à partir des prix de contrats. En période de fluctuations, il en résulte un décalage entre ce qu'encaissent les transformateurs et les cotations du moment. Le mode de calcul pour le beurre est plus équilibré. Il associe prix de facturation et de contrat. Nous souhaitons une évolution dans ce sens de la partie poudre. L'autre principale demande de la FNCL porte sur l'intégration du coût de l'investissement nécessaire au renouvellement du parc industriel. Une tour de séchage moyenne de 50 000 l/heure coûte 15 M€ contre 10 M€ il y a dix ans.
Cela revient à exiger des éleveurs de supporter des charges inhérentes à la stratégie des laiteries, via le prix du lait.
D. C. : Si les entreprises ne disposent pas de références interprofessionnelles fiables pour se lancer sur les marchés émergents, elles risquent d'écouler les volumes supplémentaires sur le marché des PGC. Cela aura inévitablement un impact sur le prix du lait. Je rappelle que les coopératives ont la responsabilité de pérenniser l'activité laitière dans leur région. Les grands groupes privés, eux, peuvent capter ces nouveaux marchés à partir de leurs acquisitions faites à l'international.
Pourquoi les coopératives ne réagissent- elles que maintenant ?
D. C. : L'année 2010-2011 montre que le parc français de tours de séchage est saturé. Il est incapable de réagir à une envolée de la demande. Jusqu'à présent, cela ne nous a pas trop gênés car il est conçu pour absorber les excédents. Une autre raison à cette saturation est l'évolution du marché des poudres vers des produits ingrédients. Cette segmentation oblige des temps de nettoyage plus importants. Schématiquement, là où une tour séchait 40 000 l en une heure il y a vingt ans, elle n'en sèche plus que la moitié aujourd'hui. Il ne serait donc pas aberrant d'investir dans des outils à grands volumes, d'au moins 50 000 l/h, pourquoi pas dans le cadre de projets collectifs, y compris avec les privés.
Quelle sera la décision des coopératives si le Cniel n'accepte pas la révision de l'indicateur beurre-poudre ?
D. C. : La demande de la FNCL est tirée par Sodiaal, 3A, Eurial, Glac, Prospérité Fermière et Laïta. Elles sont animées par le souci d'un projet de filière cohérent et rentable. Je serai persévérant dans la construction d'une voie interprofessionnelle.
PROPOS RECUEILLIS PAR CLAIRE HUE
(1) Solde entre le prix des beurre et poudre humaine et 70,95 €/1 000 l de charges. Il participe au calcul du prix du lait.
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