Après l'échec du mouvement de blocage des abattoirs en novembre dernier (dont la levée soudaine a laissé perplexe sur le terrain), les éleveurs de bovins viande semblent désarmés. Comme l'étaient les producteurs laitiers en 2009. Dans de nombreuses exploitations, les investissements sont reportés faute de revenu suffisant. En Saône-et-Loire, premier département allaitant de France, Christian Bajard, éleveur à Saint- Symphorien-des-Bois (105 vêlages par an, 60 % de la production engraissée), témoigne de ce désarroi : « Depuis trois ans, constate ce producteur charolais installé sur 120 ha, mon revenu annuel disponible évolue entre 8 000 et 14 000 €. Sans ma femme qui travaille à l'extérieur, j'aurais du mal à dégager de la trésorerie. »
Et la situation s'aggrave avec l'augmentation des coûts des intrants. « Cette année, la seule hausse des coûts des matières premières nécessaires à la fabrication de mon aliment (tourteaux de colza, soja et triticale) va me coûter 10 000 à 12 000 € supplémentaires. Il faudra aussi compter avec l'envolée du prix du gasoil et des engrais. On a beau faire des économies, il arrive un moment où ça coince. » « Alors qu'une partie des éleveurs a emprunté en 2009 et 2010, un plan de sauvetage de l'élevage est indispensable pour redonner de la trésorerie aux éleveurs, estime le nouveau président de la section bovine de la FDSEA de Saône-et-Loire, département où s'est tenu le dernier congrès de la Fédération nationale bovine début février.
Enfin, il n'y a pas d'autres solutions que de monter le prix de nos produits à la consommation. »
Une demande légitime alors que le marché s'est amélioré fin 2010 sans que les éleveurs n'en tirent profit. « Les vaches R+ partent avec quelques centimes d'euros supplémentaires. Mais les cours des broutards ont baissé d'une vingtaine de centimes depuis finjanvier », observe Christian Bajard. Une situation d'autant plus frustrante que l'équilibre actuel de la filière, tant en France qu'en Europe, ne justifie pas des prix aussi bas à la production.
Intégrer la hausse des coûts à la production
Alors que la grande distribution se déclare réticente à mettre en place des mécanismes d'indexation des prix alimentaires sur les matières premières agricoles, les producteurs sont-ils condamnés à rester les seuls dans la filière à ne pas pouvoir répercuter leurs hausses de charges ? Sont-ils condamnés à faire le constat de l'impuissance du monde de l'élevage et de celle de l'État, dont le seul acte concret pour l'instant se résume à l'annonce du versement anticipé de la PMTVA ? Pour sa part, Christian Bajard s'accroche à l'idée de la contractualisation au sein de la filière, même si cette perspective semble compliquée à mettre en oeuvre. « C'est une occasion de marteler la nécessité d'intégrer la hausse des coûts à la production et de donner un peu de visibilité aux jeunes, après le démantèlement par Bruxelles des outils de régulation du marché. »
ANNE BRÉHIER
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