
Si l'Europe du Nord a largement souscrit au plan européen, on peut douter de sa conversion aux vertus de la régulation. Aux Pays-Bas, on a compris que l'aide à la réduction de la production servira surtout à réformer, à bon compte, les vaches en trop par rapport à la nouvelle contrainte sur le phosphore. En Allemagne, les demandes sont, dans une écrasante majorité, le fait d'éleveurs qui ont pris la décision d'arrêter le lait, « des exploitations en bout de course ». Le plan y est perçu comme un accompagnement social de la crise. Dans le secteur de Cuxhaven (Allemagne du Nord) qui compte 90 % d'élevages laitiers, ce technicien d'un organisme de conseil constate que l'aide a été demandée par « des élevages qui voulaient arrêter ou avaient du mal à atteindre leur objectif de production, qui n'étaient plus rentables, avec des trésoreries dans le rouge depuis deux ans. Cette crise n'a fait que précipiter le mouvement ». Et d'ajouter : « 10 à 20 % des élevages pourraient cesser leur activité. Je suis 100 fermes laitières, mais dans cinq ou dix ans, je crains qu'il n'en reste que 40 ou 50 ».
Pas sûr que les déclarations d'intention tiennent
En Bavière, où les élevages familiaux dominent, le programme a eu moins de succès. Mais le prix du lait n'y est jamais descendu aussi bas que dans le nord du pays. Au-delà de ces déclarations d'intention, cet observateur avisé s'interroge : « Tiendront-elles si les prix remontent ? » En Irlande, rien ne garantit non plus que ces promesses de baisse soient tenues, d'autant plus que Dublin n'ajoute rien aux 0,14 €/kg de l'UE. Nourries à l'herbe, les vaches irlandaises sont taries l'hiver. L'aide à la réduction est donc vue comme une assurance en cas d'automne rigoureux : si l'herbe vient à manquer, il suffira de tarir plus tôt pour empocher le chèque de Bruxelles, au lieu de nourrir à perte en stabulation. L'option sera d'autant plus attractive que les prix restent bas. S'ils remontent et que l'automne est clément, bien peu de souscripteurs mettront leur promesse à exécution.
JEAN-MICHEL VOCORET,AVEC NOS CORRESPONDANTS EUROPÉENS
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