L'UTILISATION DES PESTICIDES EST NOCIVE POUR LA SANTÉ. L'Inserm a montré que l'usage d'insecticides, notamment de type organochloré, augmente le risque de maladie de Parkinson. De même, de fortes suspicions pèsent sur le lien cancers-pesticides, même s'il n'est pas clairement établi. Une enquête de la MSA des Côtes normandes et du Centre anticancéreux François Baclesse, de Caen, auprès de 6 000 agriculteurs du Calvados constate qu'ils développent moins de cancers que la population, mais ce risque est plus élevé chez les hommes pour les cancers de la peau, des reins, des ganglions et de la prostate. La première précaution est de réduire le niveau d'exposition. Cela passe par des équipements de protection et une rationalisation de l'organisation phytosanitaire. « Il n'y a aucun lien entre la surface traitée et la dose reçue , précise Pierre Lebailly, du Centre Baclesse. Le niveau de contamination peut varier de 1 à 4 selon le type de pulvérisateur, les incidents, la phase d'intervention, etc. » Ainsi, 80 % des contaminations surviennent à la préparation. A contrario , les risques d'exposition au retour dans le champ, après traitement, sont méconnus. Les emballages mentionnent un délai d'attente de 24 ou 48 heures. « C'est un délai pragmatique non étayé par des mesures. Un suivi en vigne révèle une exposition identique deux et quinze jours après. » Il faut donc faire preuve de bon sens. « On peut penser que les produits de contact sont plus rémanents que les systémiques. Le mieux est de se baser sur leur efficacité agronomique. »
CLAIRE HUE, AVEC LA MSA DES CÔTES NORMANDES
MAINS GANTS EN NITRILE INCONTOURNABLES
1 Protéger les mains. Les contaminations ont lieu en grande majorité à la préparation et, selon une étude réalisée par le Centre anticancéreux François Baclesse (Calvados), les mains concentrent 78 % d'entre elles. Porter des gants en nitrile résistants aux solvants est donc la protection absolument indispensable. Un pictogramme illustratif des produits chimiques (photo détail, pictogramme central) confirme cette résistance. Ils doivent être prolongés de manchettes pour protéger les avant-bras. Les réserver exclusivement à la phase de préparation et de versement dans le pulvérisateur pour ne pas contaminer les usages suivants. Les gants à hydrocarbures, considérés comme plus pratiques par certains agriculteurs, conviennent aussi, à condition qu'ils soient en nitrile (vérifier la présence du pictogramme).
2 Avant de retirer les gants, les laver, si possible dans l'incorporateur, aussitôt après la manipulation des pesticides. Dans le cas contraire, la matière active reste et expose l'éleveur au prochain traitement. Le centre Baclesse a retrouvé vingt-cinq matières actives sur une paire utilisée pendant plusieurs années.
3 Retirer les gants sans se contaminer. Rincer les gants ne doit pas empêcher de prendre quelques précautions à leur retrait. On peut retirer le deuxième dans le premier ou les secouer pour les faire glisser. Une fois retirés, les tenir gant contre gant par l'intérieur des manchettes. Sans oublier de se laver les mains.
TABLIER PROTECTION EFFICACE
1 Protéger le corps. 80 % des contaminations se produisent à la préparation et au remplissage de la cuve. Il est donc indispensable de protéger le corps durant cette phase. Le tablier est aujourd'hui préféré à la combinaison. Celle-ci exige d'être changée après chaque usage et nécessite d'être recyclée, ce que ne fait pas la collecte Adivalor. Le tablier recouvrant le corps, avec ou sans manche, en polyane ou nitrile résistants aux solvants est efficace. S'adresser à son fournisseur ou aux entreprises d'équipements de protection individuelle (Securama, Axe Environnement, France sécurité).
2 Rincer le tablier après utilisation. Si le tablier n'est pas rincé après chaque préparation, il contaminera l'utilisateur la fois suivante.
VISAGE LUNETTES OBLIGATOIRES, MASQUE RECOMMANDÉ
- Il faut protéger les yeux des projections et des éclaboussures. Les lunettes aujourd'hui proposées sur le marché sont confortables.
- Le port du masque n'est pas systématique. Néanmoins, si vous avez l'habitude de le porter, continuez. L'une des clés pour se protéger efficacement est une organisation rigoureuse qui limite les imprévus et la tentation de la facilité. Le masque avec filtre au charbon actif A2P2 ou A2P3 est indispensable lorsque l'étiquette du produit signale qu'il est nocif par inhalation ou irritant pour les voies respiratoires. À porter systématiquement lors du nettoyage de l'intérieur de la cuve. Commencer la saison par de nouvelles cartouches et les changer si l'on sent les odeurs ou l'on éprouve des difficultés à respirer.
- Attention : porter un masque à poussières P2 ou P3 à la manipulation des semences.
- En l'absence de masque, l'écran facial peut remplacer les lunettes et protéger les yeux et le visage des projections (15 € à 30 €).
EMBALLAGE LÉGER, GRADUÉ, DE PRÉFÉRENCE SANS OPERCULE
- Les contenances de 5 litres maximum sont idéales. Légers, ces emballages limitent les risques de gestes maladroits et les déséquilibres pouvant être à l'origine d'éclaboussures. La graduation sur le bidon supprime l'étape du dosage sur une table de préparation. L'emballage sans opercule évite les problèmes d'ouverture et sa mauvaise gestion une fois retiré (recyclage, contamination de la surface sur laquelle il est posé).
- Verser les gros bidons sur le côté. Vider les gros bidons à l'endroit provoque généralement une sortie du liquide par à-coups et expose le manipulateur à des projections. Mieux vaut donc les verser sur le côté. L'entrée d'air s'y fait plus régulièrement et évite les « glouglous ». Verser doucement.
- Des ouvertures d'opercule plus performantes. Les bouchons sont équipés de pointes aujourd'hui plus efficaces pour ouvrir les opercules. Pour éviter le glissement des gants sur le bouchon, certains producteurs préfèrent les gants à hydrocarbure qui offrent une meilleure adhérence. Si l'opercule se retire difficilement, il est tentant de se servir du couteau toujours présent dans la poche. En employer un uniquement dédié à cette mission et le rincer systématiquement. Dans le cas contraire, il contaminera les usages suivants.
DOSER À PROXIMITÉ DU LOCAL PHYTO
- Effectuer en dehors du local phytosanitaire le dosage des produits, mais à proximité pour limiter les déplacements avec les emballages. Préférer un doseur 5 l pour limiter, cette fois-ci, les manipulations. La préparation doit être effectuée en étant installé confortablement : un plan de travail stable et à bonne hauteur. Objectif : se préserver des éclaboussures et être précis dans ses gestes. Éviter un plan en bois, matière qui absorbe les matières actives. Prévoir un point d'eau à proximité dédié uniquement à l'activité phytosanitaire. Sinon, utilisé à un autre moment sans gants, il contaminera les mains.
- Déconseillé : faire la préparation sur la plate-forme du pulvérisateur, généralement présente en l'absence d'incorporateur. Les risques de gestes maladroits sont élevés.
- Astuce : Bruno Gazengel (notre photo), éleveur dans la Manche, a conçu un plan de travail, à la fois pour la préparation et l'égouttage des bidons. Une fois rincés, ceux-ci sont retournés. Une légère pente dirige l'eau d'égouttage vers un trou fait dans la tablette. Un tuyau l'envoie dans un bidon en contrebas qui est vidé dans l'incorporateur du pulvérisateur.
VERSER ET RINCER LES PRODUITS DANS UN INCORPORATEUR
- Un incorporateur à bonne hauteur. Les nouveaux pulvérisateurs sont équipés d'un incorporateur de produits phytosanitaires, ce qui supprime le versement directement dans la cuve. Veiller au moment de l'achat qu'il ne soit pas trop haut. Cela permet en particulier de poser les gros bidons sur son rebord et limite les risques de déséquilibre.
- Rinçage automatique. Privilégier les systèmes de rinçage automatique pour limiter cette fois-ci les risques d'éclaboussures. Le rinçage de certains incorporateurs est actionné par une manette qui peut être installée en dessous. Bien la repérer, surtout en début de saison de traitement.
- Douchette. Le rinçage peut être facilité par une douchette à l'extérieur du bidon. Si l'incorporateur n'en possède pas, le concessionnaire peut en installer une. Sinon, nettoyer l'incorporateur avec un jet d'eau.
- En l'absence d'incorporateur, être bien protégé par son tablier, son masque et ses lunettes lorsque le produit est versé dans la cuve à partir de la plate-forme. Autre solution : investir dans un kit incorporateur-rinçage de bidon-douchette que le concessionnaire ou le constructeur installera. Coût : au moins 500 euros.
EN CAS D'INCIDENT QUATRE MESURES À PRENDRE
- S'arrêter après la zone traitée. En cas d'incident, une buse bouchée par exemple, ne pas descendre du tracteur sur la zone traitée, mais au moins un mètre après pour ne pas rentrer en contact direct avec le pesticide.
- Se munir de gants en nitrile. Une boîte de gants jetables en nitrile doit être en permanence dans la cabine du tracteur. Les enfiler avant toute intervention sur la rampe ou le pulvérisateur.
- Enlever les gants jetables sans s'exposer. Le pesticide peut toucher la peau lors du retrait des gants à usage unique. Il faut donc pincer le premier gant au niveau de la paume pour supprimer l'effet ventouse, puis le retirer en formant une boule avec l'autre main qu'elle garde en son creux. Ensuite, insérer deux doigts sous le deuxième gant, du côté de la paume. Enfin, le retourner pour couvrir la boule.
- Des buses de remplacement. En cas de buse bouchée, ne pas s'obstiner à la déboucher. Mieux vaut prévoir des buses de remplacement en permanence dans sa cabine de tracteur. En amont, prévenir ce risque de bouchage en rinçant la cuve et le circuit de pulvérisation dans le champ avec le système de rinçage du pulvérisateur.
PROTECTION NE PAS BAISSER LA GARDE
- Vêtement de travail. Les traitements phytos achevés, ne pas rester avec sa cote de travail jusqu'à la fin de la journée. L'enlever dès la fin des traitements pour éviter que les éventuelles projections traversent le tissu et entrent en contact avec la peau. Utiliser une nouvelle cote la fois suivante.
- Prendre une douche. Aussitôt après la fin des traitements, prendre une douche, de préférence au sein de l'exploitation si elle en contient une. Objectif : cloisonner activité phytosanitaire et vie familiale.
- Laver le vêtement de travail séparément. L'idéal est d'installer une machine à laver dans un bâtiment de la ferme et de la réserver aux vêtements de travail. Sinon, veiller à ne pas les mélanger au linge de la maison.
- Attendre avant de visiter la parcelle. Il ne faut pas courir le risque d'être contaminé par les plantes traitées. Respecter au minimum le délai indiqué sur l'étiquette (24 ou 48 heures), même s'il n'est pas confirmé par des mesures (voir article).
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