FOIN-REGAIN : NE PAS ATTENDRE DE MIRACLE DES VL BON MARCHÉ

Si on choisit en ration foin-regain un aliment avec peu de céréales et beaucoup de coproduits énergétiques, il faut plutôt s'attendre à des contre-performances techniques.© J.-M.V.
Si on choisit en ration foin-regain un aliment avec peu de céréales et beaucoup de coproduits énergétiques, il faut plutôt s'attendre à des contre-performances techniques.© J.-M.V. (©)

Le type de matières premières énergétiques influence directement les performances zootechniques des animaux et la composition en acides gras. En revanche, l'origine des matières premières azotées a peu ou pas d'impact.

QUELS SONT LES IMPACTS DE LA COMPOSITION DES ALIMENTS DU COMMERCE sur celle du lait et sur les performances des animaux ? La question méritait bien une étude(1) pour les élevages franc-comtois. En effet, travaillant l'hiver en ration foin-regain, ils peuvent être, selon les conditions de récolte aléatoires de leurs fourrages, de « gros » consommateurs de concentrés... dans la limite imposée par le cahier des charges de l'AOP comté (1 800 kg de concentrés/vache/an). Ils se voient aussi souvent proposer des formules d'aliments complexes ou, a contrario, des « VL » très économiques.Conseil-Elevage 25-90 s'est attelé à la tâche. En lice, 81 élevages dont la composition des aliments, relevée sur les étiquettes ou déclarée par les fournisseurs, a été mise en relation avec la production laitière et les taux exprimés par le troupeau. Ont été étudiés aussi le lien avec le profil en acides gras (saturés et insaturés, courts ou longs) et la composition protéique du lait (caséines) prédits par le spectre Mir. La moyenne des troupeaux suivis au cours de l'hiver 2012 a été la suivante : 34 vaches produisant 7 259 kg de lait, à 38,4 de TB et 32,9 de TP, avec 1 438 kg de concentrés par vache et par an.

Plus concrètement, pour apprécier l'impact du type de matières premières énergétiques, trois groupes d'élevages ont été identifiés : deux utilisant quasi exclusivement des céréales (à 91 et 89 %), avec une part importante d'orge (60 %) dans un cas, du maïs (44 %) dans l'autre. Le troisième groupe se caractérisait par une part de céréales n'excédant pas 60 % des matières premières énergétiques, et par conséquent, avec 40 % de coproduits (drêches déshydratées, wheat gluten feed, pulpes, sons...).

AVEC LES COPRODUITS ÉNERGÉTIQUES, 2 KG DE LAIT ET 1 G DE TP EN MOINS

Premier enseignement : le type de source énergétique semble avoir un impact sur la quantité de lait et de matière protéique produite. « Pour une densité UFL annoncée identique dans les trois groupes, les élevages classés dans le groupe où la part de céréales est la plus faible produisent, en moyenne, 2 kgde lait par vache en moins, et 1 g de TP/kg de lait en moins », précise Nicolas Gaudillière, ingénieur chez Conseil Élevage 25-90, pilote de cette étude. Si on choisit ce type d'aliment avec peu de céréales et beaucoup de coproduits, dont le prix peut être plus attractif, il ne faut donc pas s'attendre à des miracles techniques, mais plus sûrement à des contre-performances. Parmi les autres types de concentrés avec une forte proportion de céréales, les différences de performances ne sont pas statistiquement significatives. Le choix d'une formule plutôt composée d'orge que de maïs ne semble donc pas avoir de conséquences importantes. La source de matières premières énergétiques a aussi une influence sur le profil en acides gras. Les formules contenant le plus de coproduits conduisent à la production d'un lait plus riche en acides gras mono-insaturés. « Ce constat est cohérent avec l'hypothèse que nous faisons sur la composition en matière grasse de ces concentrés riches en coproduits. Pour atteindre des valeurs énergétiques comparables aux concentrés essentiellement à base de céréales, il est vraisemblable qu'ils intègrent une part plus importante de matières grasses. Or, on sait que leur ajout dans l'alimentation des vaches laitières a pour effet d'augmenter la part des AG mono-insaturés du lait », note Nicolas Gaudillière.

LE TOURTEAU DE COLZA AUSSI PERFORMANT QUE CELUI DE SOJA

Si les concentrés avec 60 % de céréales et 40 % de coproduits pénalisent le TP, ils n'ont en revanche aucun impact sur la composition de la protéine. La part de caséine (82,5 % de la protéine en moyenne) est identique quel que soit le concentré utilisé. Concernant l'impact du type de matières premières azotées, on retiendra la faible influence sur les performances zootechniques entre les sources recensées. Quatre groupes d'élevage ont ici été ciblés en fonction de la source en protéine la plus importante dans la complémentation : tourteau de soja (formule avec 67 % de soja, 11 % de colza et 7 % de luzerne), tourteau de colza (49 % de colza, 35 % de soja et 6 % de luzerne), tourteau de tournesol (21 % de tournesol, 34 % de soja, 31 % de colza et 5 % de luzerne), luzerne (avec 45 % de luzerne, 23 % de soja et colza). Résultat : des différences très faibles et non significatives statistiquement. Ces diverses sources azotées n'induisent, par ailleurs, aucun effet notable sur le profil en acides gras et la composition de la protéine. C'était l'une des questions les plus importantes à résoudre : l'introduction de sources azotées alternatives au soja, telles que le colza, a-t-elle un impact sur la qualité de la protéine du lait ? « Nous pouvons être rassurés, elle n'a pas d'effets selon nos observations. »

Aux producteurs franc-comtois en AOC, Nicolas Gaudillière donne désormais ce conseil : « Compte tenu du prix des céréales, restez vigilant sur les matières énergétiques entrant dans la composition de vos aliments. Les céréales constituent une source fiable. Sur des rations foin-regain, pauvres en amidon, n'hésitez pas à investir un peu dans cette source d'énergie. On peut être déçu par des solutions meilleur marché. Il n'y a pas que le prix de l'aliment qui compte ! Si vous choisissez une formule du commerce, renseignez-vous sur sa composition. Par contre, pour ce qui est de la matière protéique, beaucoup d'essais confirment que le colza conduit à des performances zootechniques comparables, voire supérieures au soja. Il faut donc être opportuniste et choisir le correcteur azoté économiquement le plus intéressant. » Les conclusions de cette étude restent à confirmer avant d'être extrapolées aux rations à base d'ensilage de maïs. Mais on peut supposer qu'il existe des interactions entre la composition des concentrés et la nature des fourrages.

JEAN-MICHEL VOCORET

(1) Menée dans le cadre du mémoire de fin d'études de Clément Delpouve (Esa Angers), en collaboration avec l'Institut de l'élevage.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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