« LE LAIT PAR JOUR DE VIE SE GAGNE SUR L'ÉLEVAGE DES GÉNISSES »

Friands de concours Alain Popot et son fils aîné, Marc, privilégient la sélection sur les caractères morphologiques et fonctionnels.© J..P.
Friands de concours Alain Popot et son fils aîné, Marc, privilégient la sélection sur les caractères morphologiques et fonctionnels.© J..P. (©)

Récompensée pour sa performance sur le critère du lait par jour de vie, la SCEA Popot-Decourt accorde une attention particulière à la phase 0-6 mois pour rentabiliser le coût d'élevage des génisses.

AVEC 13,88 LITRES DE LAIT PAR JOUR DE VIE, le troupeau holstein de la SCEA Popot-Decourt s'est vu décerner le prix Vet'Elevage par les GTV de Nord-Picardie, lors du dernier concours interrégional holstein qui s'est déroulé à Arras (Pas-de-Calais). Il s'agit de la meilleure performance enregistrée ce jour-là parmi quarante exploitations en lice. À titre de comparaison, le résultat le plus bas était de 8,13 litres. Dès lors, une rapide comparaison des deux performances permet d'apprécier l'intérêt de ce critère technico-économique à sa juste mesure : 13,88 l/j - 8,13 l/j = 5,75 l/j x 50 vaches présentes x 365 j = 104 937 l produits par an. Au regard de ce résultat, on comprend bien l'intérêt de maximiser pour chaque animal la quantité de lait produite par jour de présence dans le troupeau, pour gagner des marges de manoeuvre, dans un contexte de bâtiments saturé et de libéralisation des quotas.

« NOUS MISONS SUR DES VÊLAGES PRÉCOCES, MIEUX RÉPARTIS SUR L'ANNÉE »

Sur la ferme, avec une stabulation à aire paillée d'une capacité de 50 places, la recherche d'un certain niveau d'intensification exprimée à travers ce résultat a permis de passer de 400 000 litres de lait produits en 2009 à 520 000 litres lors de l'exercice 2013-2014 sans investissement de bâtiment.

Analyser l'efficacité de la conduite d'élevage à travers le critère du lait par jour de vie permet de faire le lien entre le niveau de production laitière (10 810 kg/VL) et la notion de jours productifs qui consiste à viser des vêlages précoces et à assurer la longévité des vaches en production, en vue d'amortir le coût d'élevage des génisses. « C'est un critère que je ne connaissais pas, reconnaît Alain Popot. Mais il traduit effectivement notre volonté d'évoluer vers des vêlages à 2 ans, mieux répartis sur l'année pour optimiser les places de cornadis. » Cet objectif passe d'abord par une bonne maîtrise de la croissance des génisses afin d'être prêt à les inséminer à 15 mois, pour un poids minimal de 400 kg, quelle que soit la période. Plus question donc de décaler la mise à la reproduction pour des vêlages groupés. Répondre aux objectifs de croissance des élèves commence dès la naissance par le drenchage systématique des veaux avec 2 litres de colostrum quelle que soit l'heure du vêlage, puis 2 litres au biberon à la traite suivante. « Le colostrum des vacheshautes productrices est de plus en plus dilué et spontanément, le veau ne boit pas assez pour garantir un apport suffisant d'anticorps nécessaires à la prévention des maladies respiratoires et digestives, souligne Rémi Martin, vétérinaire du troupeau. Le drenchage apparaît donc comme la meilleure solution pour s'assurer que la quantité de colostrum est respectée. » Les éleveurs congèlent toujours du colostrum de laitières en troisième lactation pour le distribuer aux veaux issus de génisses ou de vaches malades après le vêlage. Prochaine étape : « Acheter un pèse-colostrum pour s'assurer de sa qualité. »

Cette phase d'allaitement au lait maternel dure quatre jours dans des niches individuelles placées à l'extérieur des bâtiments. Puis, les futures laitières ont deux repas par jour à base de lait reconstitué. Démarre ensuite une phase d'élevage en case collective, sous le même bâtiment que les adultes, avec un repas par jour pour un sevrage programmé à dix semaines. « Les petites génisses sont bloquées au cornadis et la buvée est distribuée au seau, explique l'éleveur. L'expérience du Milk Bar s'est avérée insatisfaisante à nos yeux, car certaines sont plus gourmandes et profitent donc davantage. De plus, nous avons constaté que ce mode de distribution néglige le contact homme-animal et donne des génisses plus farouches. »

« UNE RATION KEENAN POUR TOUS ET DE LA PAILLE À VOLONTÉ »

Un détail qui n'en est pas un pour des éleveurs présentant régulièrement des animaux en concours. En complément de l'aliment lacté, dès la naissance et jusqu'à 6 mois, les génisses ont à disposition une ration sèche unique, distribuée avec une mélangeuse Keenan et composée de 12 % de paille, 12 % d'aliment liquide (mélasse à 10 % de MAT), 15 % de correcteur azoté (75 % soja + 25 % colza à 48 % de MAT), 25 % de pulpes sèches, 33 % de VL 18 et 25 g de minéraux. Les génisses ont également de l'eau et de la paille à volonté renouvelées chaque jour.

Maryline, particulièrement en charge des soins aux veaux, n'hésite jamais à leur enfourner une petite poignée de cet aliment très fibreux dans la bouche pour les habituer à en consommer. Au moment du sevrage, ils en consomment plus de 2 kg et jusqu'à 7 kg/j à 6 mois avec toujours de la paille à volonté. « La phase 0-6 mois est déterminante. Au cours de cette période, nous utilisons régulièrement le ruban pour contrôler la croissance et s'assurer qu'elle répond aux objectifs d'un sevrage à 120 kg, pour atteindre 200 kg à 6 mois, puis 400 kg à 15 mois au moment de l'insémination. »

Atteindre les objectifs de croissance consiste aussi à limiter le stress au sevrage, à respecter les transitions alimentaires et la gestion du parasitisme lors de la mise à l'herbe. Sur la ferme, les génisses de plus de 6 mois sortent en pâture pendant les mois de juin, juillet et août. Au cours de cette période, elles sont complétées avec du foin ou des pulpes sèches en fonction de la qualité et, bien sûr, de la disponibilité en herbe. Elles sont systématiquement traitées contre les strongles à la sortie, puis à la rentrée à l'étable. Démarre ensuite la seconde phase d'alimentation qui va durer jusqu'au vêlage avec d'abord un tiers de la ration des laitières + 3 kg de paille. Une quantité qui va augmenter progressivement avec le niveau d'ingestion.

« UN POIDS MOYEN DE 420 À 430 KG À 15 MOIS »

« La paille est intégrée directement dans la mélangeuse, précise Alain. C'est un moyen plus efficace que le râtelier pour leur faire consommer cette fibre nécessaire au bon développement du rumen. » Pour sécuriser la qualité, la paille destinée à l'alimentation est stockée à l'abri sous un hangar. Une stratégie alimentaire payante puisque la première insémination est réalisée en moyenne à 17,2 mois, pour un poids compris entre 420 et 430 kg et un taux de revêlage des primipares de 95 % contre une moyenne régionale de 72 %. « Mais cette stratégie a un coût qui rappelle que les performances obtenues sur le critère du lait par jour de vie doivent absolument être analysées à l'aune du coût de la ration », tempère Raphaël Lejeune (voir encadré page précédente). En outre, l'irruption de la fièvre Q dans le troupeau pénalise les résultats de reproduction et vient contrebalancer ces performances : avec 25 % de génisses à 3 inséminations et plus, l'âge moyen au premier vêlage est de 28,5 mois.

« DES PISTES DE PROGRÈS SUR L'ÉLEVAGE DES PETITES GÉNISSES »

Calculé à l'occasion d'un concours par le docteur Joly, le résultat Vet'Elevage intègre la performance du troupeau à hauteur de 75 % et celle de la vache présente à cette occasion pour 25 % : Céline (Norman Hig/Jesther), une vache en quatrième lactation à 10 694 kg de lait, 45,7 de TB et 31,5 de TP qui a produit 18 litres/jour de vie. Autre spécificité, le lait par jour de vie est pondéré en tenant compte des taux et des cellules : les volumes produits sont ramenés en lait standard (38/32) et une plus-value de 10 % pour chaque tranche de 10 000 cellules en dessous de 200 000 cellules : « Avec une moyenne de 91 000 cellules, le lait par jour de vie dans cet élevage a été majoré de 11 %, explique le praticien. La qualité du lait est un critère sanitaire qu'il me semble intéressant d'intégrer, car il traduit la maîtrise des conditions d'élevage et du rationnement. » Mais la première place obtenue à ce concours spécial n'est pas un aboutissement. Des points d'optimisation peuvent être gagnés, à travers une meilleure maîtrise de la mortalité des veaux âgés de 0 à 6 mois (15 %). Celle-ci traduit sur la ferme la difficulté d'élever des génisses dans le même bâtiment que les vaches, avec un volume et une circulation de l'air inadaptés à de jeunes animaux.

JÉRÔME PEZON

Au concours holstein de Terres en fête, l'autre fils, Antoine Popot, ici au côté de Claude Joly, a présenté Céline, une vache exceptionnelle en quatrième lactation qui a déjà produit 18 litres/jour de vie.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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Herbe

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