COLZA GRAS-LUZERNE, LE DUO GAGNANT POUR SE PASSER DU SOJA

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Associée au tourteau de colza gras, la luzerne concentrée constitue une réelle alternative pour s'affranchir du soja.

LA SECONDE EXPÉRIMENTATION sur le sujet, menée par le pôle laitier de Bourgogne, le confirme : la combinaison des deux sources de protéines, colza gras et luzerne concentrée (52 ou 26), favorise la production laitière, améliore le profil en acides gras du lait et sa fromageabilité (rapport TB/TP). Ramenée au litrage produit, la substitution est économiquement intéressante (voir graphe ci-contre). Depuis deux ans, les essais alimentaires conduits sur le troupeau laitier du lycée agricole de Fontaines (Saône-et-Loire), en partenariat avec l'Institut de l'élevage(1), montrent qu'il est possible de s'affranchir des tourteaux de soja en valorisant les protéines végétales produites en France et dans la région. En effet, après avoir testé positivement le remplacement du tourteau de soja 49 standard par un mélange de tourteau de colza gras (Expellor, fabriqué en Saône-et-Loire) et de concentré de jus de luzerne 52 (Extraluz, fabriqué dans la Marne), les chambres d'agriculture et les contrôles laitiers de Bourgogne ont expérimenté l'association d'un tourteau de colza gras avec un concentré moins technique mais plus local : la luzerne 26, produite par la coopérative de déshydratation de Baigneux-les-Juifs, dans la Côte-d'Or(2). « Le fait de ne déshydrater que les feuilles de la légumineuse permet de relever la richesse en protéines de la luzerne déshydratée, souligne Denis Chapuis, de la chambre d'agriculture de la Saône-et-Loire et animateur du pôle laitier de Bourgogne. Il contribue aussi à réduire le taux de cellulose (136 g/kg de MS de cellulose brute contre 295 g pour une luzerne 17-18), ce qui améliore la concentration du produit. » Réalisée l'hiver dernier sur deux lots de dix-huit montbéliardes en ration maïs-herbe, cette nouvelle expérimentation a confirmé les observations réalisées l'hiver précédent avec le concentré de luzerne 52 (Extraluz). À nouveau, l'association de tourteau de colza gras et de luzerne 26 s'est traduite par une augmentation de la production laitière sans impact sur le TP, mais avec une baisse du TB par dilution. Plus efficace, la ration offre un profil en acides gras plus favorable pour la santé humaine : diminution des acides gras saturés (71,1 % contre 77,6 %), augmentation des acides gras insaturés (24,5 % contre 19,2 %), amélioration du rapport oméga 6/ oméga 3 (4,9 au lieu de 6,4), mais hausse du pourcentage d'acides gras transnaturels, avec un taux toutefois modéré (3,1 % contre 1,7 %).

UNE BONNE EFFICACITÉ ALIMENTAIRE

La ration de base des laitières avait été ajustée sur une base économique de 28 à 29 kg de lait avec une concentration de 0,90 UFL et 95 PDI par kg de MS. « Pour la luzerne 26, précise Denis Chapuis, nous avions conservé les valeurs transmises par la coopérative de déshydratation (26 g MAT/kg de MS, 174 g PDIN et 136 g PDIE), bien que celles-ci aient été inférieures aux résultats de nos analyses (au mieux 24,64 g de MAT sur le sec, 156 g de PDIN). Malgré tout, les performances laitières ont répondu, signe que l'incorporation de la luzerne favorise un bon fonctionnement du rumen et contribue à une bonne valorisation de la ration. »

Les deux expérimentations avaient été conduites à la demande des filières fromagères AOC bourguignonnes (époisses, chaource) soucieuses de trouver un approvisionnement tracé en soja garanti non- OGM, capable de répondre aux contraintes du cahier des charges de ces AOC. « Avec une source locale alternative, aussi bien pour le colza que pour la luzerne, l'autonomie en protéines des exploitations de la filière AOC Époisses est renforcée et la recherche d'une alimentation non-OGM facilitée, se félicite Georges Risoud, du Syndicat de défense de l'époisses. Outre la forte volatilité de ses prix, le soja importé présente un bilan énergétique négatif. »

Toutefois, la disponibilité en colza gras et en luzerne concentrée 26 constitue un frein à l'utilisation de ces produits. Avec 12 000 t de granulés de luzerne produits par an, la coopérative de déshydratation de Baigneux-les-Juifs est l'une des plus petites de France. Les trois quarts de la production sont autoconsommés et repris par les producteurs-éleveurs. 25 % seulement de la production sont commercialisés, ce qui limite les quantités disponibles à la vente. « L'apport de tourteau de colza industriel est possible, note Denis Chapuis. Il faudra juste en incorporer un peu moins. Le tourteau de colza gras, associé à la luzerne 26 ou à la luzerne 52, constitue une réelle alternative au soja. L'utilisation de ces matières premières nobles doit être raisonnée selon l'évolution des prix du marché. »

ANNE BRÉHIER

(1) Voir résultats du premier essai (colza gras Extraluz) dans L'Éleveur laitier de décembre 2009. (2) À partir d'un procédé de séparation mécanique de la tige et de la feuille de luzerne après séchage (et non par extraction foliaire comme pour la luzerne 52 Extraluz

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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