SI UNE PRAIRIE EST DÉGRADÉE, il faut en comprendre les causes car il est possible d'améliorer la situation par un mode d'exploitation adapté, sans passer par le resemis. Conseiller au GNIS (Groupement national interprofessionnel des semences et plants), Bruno Osson distingue sept causes de dégradation : le surpâturage d'automne, le sous-pâturage (pâturage d'une herbe trop haute), une fertilisation mal raisonnée, l'absence de déprimage, le piétinement en mauvaises conditions climatiques, les accidents naturels (inondation, sécheresse ou gel exceptionnel, rats taupiers) et les négligences (rouler sur l'herbe gelée, mauvais émiettement du fumier...). « Pour apprécier la qualité des prairies, il faut arpenter ses parcelles au printemps, même les plus éloignées, sans se contenter de rester à l'entrée. À l'occasion de ce diagnostic, il y a trois éléments à observer : le recouvrement, la morphologie du couvert et les espèces présentes. »
JÉRÔME PEZON, AVEC LA COLLABORATION DE BRUNO OSSON, CONSEILLER AU GNIS.
LES DÉRAPAGES D'AUTOMNE ET L'ABSENCE DE DÉPRIMAGE PÉNALISENT L'ENGAZONNEMENT
- La morphologie traduit la forme que prennent les graminées : en gazon (idéal) ou cespiteux (en touffes). La pousse en touffes réduit considérablement l'appétence et la productivité. Elle est favorisée par le piétinement, le sous-pâturage d'automne, l'absence de déprimage et certaines espèces naturellement prédisposées (houlque laineuse, dactyle). Il convient alors de broyer dans l'urgence, puis de faire pâturer tôt pour un retour progressif à un couvert gazonnant. Dans les cas extrêmes, l'amélioration passe par une destruction totale.
- En favorisant le tallage, le déprimage reste un moyen gratuit et efficace d'amélioration. Cet engazonnement est aussi un moyen de lutter contre les dicotylédones indésirables par le simple fait d'occuper l'espace disponible.
- Dès que l'herbe a redémarré, un indicateur reste à observer : le marquage des bouses. Un marquage prononcé peut être lié à un défaut de fertilité ou à un surpâturage d'automne, les bouses ayant alors protégé l'herbe de ce surpâturage.
- Il est intéressant de comparer les espèces présentes sur les zones d'anciens bousats avec le reste de la surface, car le potentiel floristique de la parcelle s'y exprime. Si les espèces y sont médiocres, il sera préférable de ressemer.
- S'il y a de bonnes graminées (RGA, dactyle...) à l'emplacement des anciens bousats, cela signifie qu'avec une fertilisation adaptée, on peut tendre vers cette situation sur toute la parcelle.
LES ESPACES VIDES LAISSENT LA PLACE AUX ADVENTICES
- Les vides sont gênants dès qu'ils dépassent la taille d'une assiette. Ils ont plusieurs origines : un hiver rigoureux sans neige a détruit les espèces gélives, les ravageurs (taupes, mulots) ou un piétinement excessif tard à l'automne. Au printemps, ils sont colonisés par des espèces pionnières, poussant à basse température (mouron ou pâturin annuel) qui ne présentent aucun intérêt fourrager et nuisent au tallage des bonnes graminées.
- Au-delà de 10 assiettes observées sur 10 ml, le renouvellement de la prairie ou le sursemis s'impose.
INDICATEUR D'AMÉLIORATION OU DE RÉNOVATION
- Le diagnostic floristique consiste à prélever de façon aléatoire une dizaine d'échantillons par hectare de végétation à l'aide d'une bêche. Si une centaine d'espèces sont potentiellement présentes, dans les faits, leur nombre est souvent réduit entre quinze et trente. C'est la présence et l'abondance des espèces d'intérêt fourrager qui déterminent le niveau d'intervention à mettre en oeuvre.
L'ACTIVITÉ BIOLOGIQUE NOURRIT LA PLANTE
- Apprécier la vie du sol lors du diagnostic est une étape fondamentale. C'est elle qui va faire que la matière organique se minéralise et nourrit la plante. Les vers de terre, le trèfle blanc et la mousse sont des indicateurs à observer. La présence de la mousse, qui vit sur une matière organique à dégradation lente, traduit un manque d'activité biologique qui peut être lié à un problème d'exposition, à l'acidité ou au tassement. C'est là qu'on retrouve l'intérêt du hersage, de l'élagage des haies, de la mesure du pH et du chaulage pour relancer les bonnes espèces.
- Le trèfle blanc, au même titre que les vers de terre, est un indicateur du bon fonctionnement de la vie du sol et d'une prairie riche en P et K, sans excès d'azote ni piétinement. Au printemps, 2 g de vers de terre dans un fer de bêche correspondent à une bonne population. Sur une même parcelle, on peut toutefois retrouver de la mousse et du trèfle. L'important est de réussir à apprécier la tendance de couvert.
LES ESPÈCES RÉVÉLATRICES
- Quatre cas de figure sont possibles :
- le sol est fertilisé en azote uniquement et les facteurs limitants sont les bases P et K, on aura alors beaucoup d'espèces nitrophiles (ortie, mouron, houlque) ;
- le sol est naturellement pourvu en base ou amendé avec des fumiers ou du compost et l'azote sera un facteur limitant, on aura beaucoup de légumineuses ;
- le sol est pauvre et non amendé, on trouvera alors de nombreuses espèces indicatrices de sol pauvre (flouve, crételle, fromental, marguerite) ;
- si le sol est bien pourvu en tout, on aura naturellement des graminées de premier ordre (ray-grass anglais, fétuque, dactyle et fléole). Il faut donc que le sol soit fertile et qu'il le soit en profondeur.
- Une fertilité de surface favorise les espèces à enracinement superficiel (pâturin, houlque) sensibles à la sécheresse et à l'arrachement. D'où l'importance des vers de terre qui brassent les éléments fertilisants dans les différentes couches du sol.
ELLE COMPROMET LA RÉUSSITE DU SURSEMIS
- Indicatrice de sols matraqués, tassés et de faible activité biologique, l'agrostis stolonifère est peu productive et a une valeur nutritive réduite. Les rythmes lents associés à une forte fertilisation azotée favorisent le développement de ses stolons et la colonisation de la prairie. Elle possède des propriétés allélopathiques qui bloquent la germination des autres plantes. Lorsque sa présence dépasse 10 %, l'amélioration de la prairie par sursemis devient très aléatoire.
- La lutte contre l'agrostis passe par un désherbage chimique en sortie d'hiver ou par un hersage dynamique en été au moment où la plante fait ses stolons.
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