« NOUS TRAITONS LES CÉRÉALES À L'URÉE POUR DENSIFIER LA RATION »

Jean-Luc Beziaud, Xavier Cougnaud et Clément Dupas stockent leur aliment fermier à plat et à l'air libre dans une cellule.© J.P.
Jean-Luc Beziaud, Xavier Cougnaud et Clément Dupas stockent leur aliment fermier à plat et à l'air libre dans une cellule.© J.P. (©)

Au Gaec de la Mésange, les céréales sont traitées avec du Maxammon. Ce procédé permet de réduire le risque d'acidose et de conduire l'engraissement sans correcteur.

LE MAXAMMON EST UN COMPLÉMENT ALIMENTAIRE formulé pour traiter les céréales destinées à l'autoconsommation. Son principe actif repose sur un champignon, l'Aspergillus niger. Associé à de l'urée soufrée ou alimentaire, puis mélangé aux céréales grossièrement broyées ou aplaties, il induit une réaction naturelle qui aboutit à la production d'ammoniac et de bicarbonate d'ammonium. Ce procédé va rehausser le pH de la céréale à une valeur proche de 9, au lieu de 6,5 initialement. Moins acidogène, cette dernière peut alors être incorporée à la ration dans des proportions plus importantes. Dans le même temps, la production d'ammoniac entraîne une augmentation de 4 à 6 points de matière active totale (MAT) des matières premières ainsi traitées : le blé, l'orge, le maïs, mais aussi les grains de protéagineux. L'enjeu consiste bien sûr à valoriser les céréales de la ferme pour réduire les achats de correcteurs azotés. « Ce procédé vient d'Écosse, où les éleveurs pratiquent depuis longtemps le traitement des céréales aplaties à la récolte avec de l'urée pour assurer leur conservation, explique Thomas Pacalier, technicien chez Alltech, société distributrice du Maxammon en France. L'ajout de ce champignon permet de contrôler la microflore de la céréale pour garantir la stabilité de la réaction. »

« LE GRAIN SE CONSERVE PLUS DE UN AN APRÈS LA RÉCOLTE »

Depuis bientôt quatre ans, le Gaec de la Mésange utilise le Maxammon. « Nous traitons environ 120 tonnes de céréales chaque année au moment de la moisson, indique Jean-Luc Beziaud. C'est l'option la plus pratique pour ne pas perdre de temps, car le grain est ensuite stocké à l'air libre et se conserve pendant plus d'un an sans attirer ni les rats ni les oiseaux ni les insectes rebutés par l'ammoniac. » En plus du blé ou de l'orge, l'éleveur traite du maïs broyé à 25 % d'humidité à la récolte. En 2015, le blé ainsi traité affiche à l'analyse une teneur de 17 % de MAT pour un pH de 8,9 et le maïs, 11,5 % de MAT. Ces céréales sont avant tout incorporées en ateliers d'engraissement : 120 taurillons de race à viande par an et trois bandes d'une trentaine de vaches de réforme finies pendant trois mois sur l'exploitation. Ces dernières valorisent l'ancien bâtiment des vaches laitières à la suite de la construction d'une stabulation en 2008. Après une phase de transition riche en fibres, leur ration à l'engrais se compose de 14 kg bruts de maïs ensilage, 13 kg d'ensilage de luzerne, 6 kg de blé Maxammon et 80 g d'urée. La ration des jeunes bovins se compose de 9 kg de maïs ensilage, 7 kg d'ensilage de luzerne, 3 kg de blé, 2 kg de maïs grain Maxammon et 100 g d'urée.

C'est Jean-Louis Herin, nutritionniste au cabinet BDM, qui a orienté vers cette pratique de rationnement. « La hausse du pH a un effet tampon qui permet d'intégrer de 7 à 8 kg de céréales sans risque d'acidose, tandis que le gain de 5 à 6 points de MAT, associé à un ensilage d'herbe de qualité, permet de s'affranchir du correcteur azoté, explique le conseiller. L'ammoniac issu du traitement n'est certes pas une protéine, mais couplé avec l'énergie de la céréale, cela entraîne la production de protéines microbiennes de qualité dans le rumen en substitution de l'aliment de production. » Le coût du traitement hors chantier de broyage est de 36 €/tonne de céréales (Maxammon + urée soufrée), soit un prix de l'aliment de 176 €/tonne pour un blé à 140 €. Un kilo de blé à 18 % MAT autorise alors une économie de 300 g de soja.

« UNE INTENSIFICATION QUI A UN COÛT »

« Mettre en oeuvre un chantier de traitement pour distribuer 1 kg par jour et par animal présente peu d'intérêt, souligne le nutritionniste. L'économie devient intéressante dès que je peux incorporer 3 à 4 kg/j. C'est pourquoi je préconise le Maxammon plutôt pour les bovins viande ou en élevage laitier, comme complément énergétique de rations riches en herbe conservée ou méteils. » En taurillons de race salers, sur dix mois de présence à l'engraissement, le Gaec obtient ainsi un gain moyen quotidien (GMQ) de 1 530 g, sur la base d'un coût de la ration distribuée de 1,23 e par jour et par jeune bovin (avec un prix de cession du blé à 180 e). « Par contrat, je perçois 2,55 e par jour de présence. La différence constitue donc la marge brute de l'atelier, explique l'éleveur. Sachant que l'objectif est d'atteindre un GMQ de 1 300 g, chaque kilo gagné au-delà de ce seuil représente une plus-value supplémentaire pour l'exploitation. » Les vaches laitières reçoivent également 1,7 kg de blé traité au Maxammon. Il est intégré dans la ration de base, en complément de 37 kg bruts de maïs ensilage, 7,5 kg d'ensilage de luzerne et 2,2 kg de soja 48. Les vaches au-dessus de 23,5 kg de lait ont un concentré de production et du correcteur au robot de traite. « Intégrer cette céréale nous a permis de renforcer la densité énergétique de la ration en limitant le risque d'acidose, souligne Jean-Luc Beziaud. L'enjeu consistait à intensifier la production individuelle pour ne pas saturer le robot et optimiser son fonctionnement. » La production journalière est actuellement de 35 kg/VL/j et la moyenne annuelle du troupeau de 11 860 kg de lait à 34,1 de TP et 41,8 de TB. Mais cette intensification a un coût, car elle se fait sur la base d'une consommation de 2 529 kg de concentré par vache.

JÉRÔME PEZON

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
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Herbe

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