LE COLZA VAUT BIEN LE SOJA : POUR CORRIGER UN FOIN EN AZOTE

Remplacer le tourteau de soja par du colza améliorerait le profil nutritionnel des comtés en blanc . Reste à connaître l'incidence sur le goût et les arômes des fromages, un point crucial pour cette AOC. Les données sont en cours d'analyse. © JEAN-CHARLES SEXE
Remplacer le tourteau de soja par du colza améliorerait le profil nutritionnel des comtés en blanc . Reste à connaître l'incidence sur le goût et les arômes des fromages, un point crucial pour cette AOC. Les données sont en cours d'analyse. © JEAN-CHARLES SEXE (©)

Choisir le colza avec un foin-regain ne nuit pas aux performances laitières.

LE TOURTEAU DE COLZA VAUT-IL LE SOJA POUR CORRIGER une ration de foin-regain déficitaire en azote soluble plutôt qu'en énergie ? La question sera encore d'actualité cet hiver dans le massif jurassien. D'abord sur les hauteurs où les orages à répétition ont compromis la richesse en protéines brutes (9 %) et en azote soluble des premières coupes (foins à 59 de PDIN/72 de PDIE). Certes, cette question ne se posera pas avec autant d'acuité dans la plaine ni sur les premiers plateaux franc-comtois où la récolte des foins a été de bien meilleure qualité qu'en 2007 et 2008. Encore que… « Même si, cette année, les foins ne demanderont pas, sur le papier, beaucoup de correcteur azoté, je conseille volontiers d'assurer le coup avec 0,5 à 1 kg de tourteau par vache laitière selon la valeur des regains. Et cela pendant la transition alimentaire avant la rentrée à l'étable et un mois après », remarque Pierre-Emmanuel Belot, responsable technique au Contrôle laitier du Jura. Son argument : « À l'automne, la flore ruminale est très sensible car soumise à des à-coups importants (variation de la qualité de l'herbe pâturée, coups de froid…) que cet apport d'azote soluble, “carburant du rumen”, peut sécuriser. Mieux vaut gaspiller un peu de correcteur que mal démarrer les lactations et attendre janvier pour que le rumen fonctionne bien. » Encore faut-il pour cela pouvoir travailler avec un correcteur bon marché, comme le tourteau de colza, quasiment deux fois moins cher aujourd'hui que le soja. L'intérêt de trouver une alternative au soja se pose aussi en terme politique dans le massif du Jura pour la filière du comté.

PAS D'INCIDENCE SUR LES TAUX ET UN PLUS EN LAIT

L'AOC comté entend se préparer à un avenir où serait compromise la garantie d'un approvisionnement en soja non OGM… condition sine qua non de son cahier des charges. D'où l'alternative du colza cultivé en Bourgogne-Franche-Comté. Surtout qu'une usine installée à Chalon-sur-Saône (Saône-et- Loire) produit du tourteau de colza pressé à froid (avec 9 % de matière grasse).

Ces questions ont justifié la mise en place, sous l'égide du Comité interprofessionnel du comté, d'un essai mené par l'UMT de Poligny(1) avec le Contrôle laitier du Jura. D'une part, pour mesurer les incidences zootechniques d'une substitution soja-colza ; d'autre part, pour évaluer l'impact sur la qualité organoleptique et nutritionnelle des comtés. Cet essai s'est déroulé en situation réelle, celle d'un élevage de quarante laitières alimentées au foin-regain. Pendant seize semaines, de décembre 2007 à avril 2008, le troupeau a vu le correcteur azoté changer à quatre reprises. Cela sur des périodes de quatre semaines, la première période servant à la transition alimentaire et la quatrième voyant, outre le contrôle laitier, la fabrication sur quatre jours du lait en comté. On en retiendra que les formules 100 % colza ne pénalisent pas les performances zootechniques (voir ci-joint). L'incidence sur les taux est nulle. On observe même, sur le niveau de production, un léger plus des rations corrigées avec du colza.

Il pourrait tenir à l'utilisation d'un correcteur avec une fraction azotée plus soluble. Cela se traduit d'ailleurs dans les rations pratiquées par un rapport (PDIN-PDIE)/UFL de 2,3 en tout soja et de 4 et 3,7 dans les formules 100 % colza à 3 % ou 9 % de MG.

AMÉLIORATION DU PROFIL NUTRITIONNEL DES COMTÉS EN BLANC

Un point reste à éclaircir : la règle de 1,5 kg de colza pour remplacer 1 kg de soja 48 (et apporter la même quantité de PDI), établie par l'Institut de l'élevage avec des régimes maïs-ensilage et appliquée ici, ne doit-elle pas être revue avec des rations foin-regain ? « Il semblerait que le remplacement à hauteur de 1 pour 1 soit ici suffisant », observe Pierre- Emmanuel Belot. La question mériterait d'être tranchée à l'heure où le prix du tourteau de soja crève les plafonds. Mais aussi pour une filière du comté où les concentrés sont plafonnés à 1 800 kg/VL.

Vu du côté des éleveurs, c'est le régime 50 % soja-50 % colza qui a le mieux convenu aux laitières. Avec le colza gras (à 9 % de MG), ils ont observé des bouses plus molles et plus grasses, mais sans réels problèmes métaboliques pour autant. Reste à savoir ce qu'il en aurait été si ce régime, au niveau limite de 4 % de MG, avait duré plus de quatre semaines.

Côté qualité des fromages en blanc (avant affinage), la substitution du soja par du colza provoque une amélioration du profil nutritionnel. On observe une proportion plus importante d'acides gras insaturés, ce qui explique aussi que la texture soit ensuite jugée moins ferme et moins granuleuse.

JEAN-MICHEL VOCORET

(1) Unité mixte technologique regroupant l'Inra, Actilait et les Enils de Poligny et Mamirolle.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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