
PLUS DE DEUX CENT TRENTE ANALYSES RÉALISÉES EN VERT par l'EDE du Puy-de-Dôme permettent d'apprécier la qualité des ensilages d'herbe récoltés cette année. Globalement, les tendances pour le millésime 2012 sont basses, tant au niveau des valeurs énergétiques que protéiques, constate Philippe Andraud, animateur de l'équipe technique de l'EDE. Avec le printemps très humide que nous avons connu, l'herbe est montée rapidement et la récolte a parfois été retardée. Les conséquences de ces chantiers réalisés à des stades avancés sont l'obtention d'un fourrage plus riche en fibres et en cellulose, mais avec des valeurs UF (unité fourragère) et MAT (matière azotée totale) plus faibles. » En moyenne, les ensilages récoltés dans le département affichent une valeur de 30,5 % de MS pour 0,83 UFL, 13,4 % de MAT, 84 gde PDIN et 67 g de PDIE. Ces résultats masquent cependant des écarts importants liés au stade de récolte.
QUELLES VALEURS ALIMENTAIRES
Les valeurs alimentaires optimales, regroupées dans le tiers supérieur, correspondent à des ensilages qui ont pu être réalisés début mai, au stade du début de montaison. « Si l'on considère le repère des sommes de températures enregistrées à partir du 1er février, cette période correspond au stade optimum pour la réalisation des chantiers d'ensilage, soit 700°C. » Dans ce cas, les fourrages stockés affichent en moyenne 0,91 UFL, 14,8 %de MAT, 90 g de PDIN et 70 gde PDIE. « La valeur de ces ensilages autorise des objectifs de production laitière soutenue. En revanche, les récoltes réalisées après le 15 mai en plaine et le 25 mai en montagne ont des valeurs alimentaires déficitaires, qui vont poser un problème de complémentation énergétique. »Ces ensilages du tiers inférieur ont, en effet, des teneurs plus proches d'un très bon foin : 11,9 % de MAT, 0,76 UFL, 77 gde PDIN et 60 g de PDIE. Avec ces fourrages tardifs riches en cellulose (31 %), il faut augmenter le bilan énergétique de la ration en incorporant des céréales, mais sans mettre les vaches laitières en situation d'acidose. La difficulté est encore plus marquée dans les systèmes herbager du Massif central, qui associent l'ensilage (8 kg de matière sèche) et le foin (6 kg de MS, dont un tiers de première coupe et deux tiers de regain)dont la qualité, cette année, est aussi moyenne à médiocre.
LES CONSEILS PRATIQUES
- Quelle complémentation énergétique
En ration tout-herbe, pour prévenir les problèmes métaboliques (subacidose), il est couramment admis que la part de concentrés (énergétique et azoté) ne doit pas dépasser 35 % de l'ingestion totale de matière sèche. Pour une vache qui ingère 22 kg de MS, cela correspond à 7,7 kg de MS de concentrés. « Même avec une limite haute de 8 kg de concentrés par jour, l'objectif recherché d'une densité énergétique de la ration entre 0,92 et 0,95 UF/kg de MS pour atteindre un niveau de production de 7 000 à8 000 kg de lait/vache ne pourra pas être atteint avec un ensilage à 0,76 UFL. » Aller chercher de la productivité laitière en montant plus haut en céréales est risqué d'un point de vue métabolique. Pour réduire les problèmes de subacidose, Philippe Andraud recommande de varier les sources d'énergie et de limiter l'apport d'amidon rapide issu des céréales à 25 % des rations tout-herbe :« En complément de 2 à 3 kg de céréales autoproduites, l'idéal est d'apporter des pulpes sèches, du maïs grain à amidon lent ou encore du corn gluten si les prix sont attractifs ».Dans ce domaine, les pratiques de rationnement et les séquences de distribution propres à chaque exploitation sont déterminantes de la maîtrise des risques métaboliques. Le fractionnement des apports de concentrés permis par le Dac est moins risqué. Dans le cas contraire, un repas de foin doit être distribué à l'auge après la traite pour constituer un tapis rumal efficace.
- Quelle complémentation azotée
Avec des valeurs moyennes de 28 % de cellulose et de 30,5 %de MS, la qualité des ensilages 2012 est favorable à une bonne ingestion. Par contre, ils sont limités en protéines. La teneur moyenne en MAT est en effet de 13,5 %, alors que les objectifs visés en la matière sont entre 14 % pour des niveaux de production de 6 000 à 7 000 kg de lait, jusqu'à 17 % pour des niveaux de production supérieurs à 9 000 kg de lait.« L'apport d'un VL 18 ne suffira pas à relever le niveau protéique, il faudra donc une complémentation azotée adaptée pour maximiser la digestibilité de la fibre dans le rumen. Le mélange, composé de deux tiers de colza et un tiers de soja, est un bon compromis entre la valeur protéique totale et la part d'azote soluble assimilable dans le rumen. Le tournesol est intéressant compte tenu de son prix, mais il est surtout adapté aux rations qui contiennent du maïs car, pauvre en UF, il présente le risque de déconcentration énergétique de la ration. » L'objectif, en termes de concentration protéique est de 105 à 108 g de PDI-UF. Une ration type, bâtie avec 8 kg de MS d'un ensilage d'herbe 2012 récolté tardivement, 3 kg de foin et 5 kg de regain, nécessite une correction azotée correspondant à 2 kg de tourteaux de colza. « Avec une complémentation de 6 kg de céréales, cette ration est équilibrée pour 30 l de lait en début de lactation. Ceci correspond à un objectif annuel de 6 500 kg de lait/vache et ne permet pas de répondre à des niveaux de production de 8 000 kg. Viser des performances plus élevées en augmentant la part de concentrés ne se fera pas sans problème de digestion. » Les valeurs d'ensilage observées par l'EDE du Puy-de-Dôme sont principalement issues de prairies permanentes. Leur déficit protéique met en exergue l'intérêt des prairies temporaires riches en légumineuses. « D'une façon générale, il faut aller vers la recherche de diversité lors de l'implantation des prairies temporaires pour renforcer la souplesse d'exploitation. Cependant, l'objectif économique dans nos systèmes de montagne est de valoriser les prairies naturelles.»
JÉRÔME PEZON
« Les valeurs alimentaires des ensilages d'herbe récoltée tardivement ne permettent pas de répondre aux objectifs d'une productivité laitière soutenue. ». PHILIPPE ANDRAUD, animateur de l'équipe technique de l'EDE
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