Lors du premier jour, mercredi 3 octobre 2018, du Sommet de l’élevage, à Cournon, les représentants de la FNSEA ont fait le point sur les préoccupations des éleveurs. « Depuis des semaines, voire des mois, nous sommes face à un silence assourdissant du Gouvernement, et en particulier du ministre de l’Agriculture, face aux conséquences de la sécheresse. »
La sécheresse, c’est la grande source d’inquiétude de la plupart des éleveurs venus au Sommet. Avec une pousse d’herbe inférieure de 15 % par rapport à la normale cette saison, cet épisode de sécheresse n’est certes pas le le premier, ni le dernier, mais reste inédit car très tardif. Dans le Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne, les prairies sont littéralement cramée. Rien ne repousse, « et on sait déjà que l’herbe ne repoussera plus ni en octobre, ni en novembre », s’alarme Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA. Autrement dit, les éleveurs vont devoir tenir jusqu’au printemps avec des stocks fourragers limités et déjà partiellement consommés.
« On va vers 9 mois d’hiver ! Nous ne pourrons pas passer 9 mois d’hiver sans soutien financier de l’État », a insisté Patrick Bénézit.
Faute de soutien gouvernemental, le syndicat craint un « risque de décapitalisation » important dans les élevages. « On veut des mesures très concrètes. Un soutien financier pour que les éleveurs puissent acheter du fourrage, de la paille, des aliments. Si ce n’est pas le cas, il y aura une décapitalisation du cheptel dans la région », complète Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes.
La situation est d’autant plus difficile pour les éleveurs que le prix de la paille s’envole, à cause notamment, d’une demande forte des élevages des pays du Nord de l’Europe, plus durement touchés par la sécheresse, venant s’approvisionner en France.
La FNSEA veut une avance de 90 % des aides Pac
Concrètement, la FNSEA demande une rallonge de l’avance sur les aides Pac. Au Space le 11 septembre, Stéphane Travert avait annoncé que l’avance de trésorerie au titre des aides Pac serait versée à partir du 15 octobre, à hauteur de 70 % pour les paiements directs et 85 % pour l’ICHN. Le syndicat demande une avance équivalente à 90 % des aides Pac.
« Nous avons fait la demande au ministre depuis des semaines. Nous voulons, au Sommet, une réponse claire de sa part », ont insisté les représentants du syndicat, qui attendent aussi des réponses concernant « la mise en œuvre des cellules d’urgence et l’utilisation du fonds d’allègement des charges ». « Ce fonds existe. L’État va-t-il le mobiliser ? Nous n’avons toujours pas de réponse. »
« On a demandé des exonérations de TFNB, des moyens supplémentaires sur les prises en charge de cotisations sociales, nous n’avons pas de réponse », s’agacent-ils. 60 départements sont touchés par la sécheresse, dont 48 plus durement. « Dans ces départements, nous demandons une exonération systématiques de la taxe sur le foncier non bâti », a poursuivi Christiane Lambert.
« En venant ici, nous espérons qu’il aura la décence de répondre aux questions que nous lui avons posées depuis cet été.»
« Comparer l’élevage à l’Holocauste, qui aurait osé !? »
Pour ce premier jour du Sommet de l’élevage, la question était aussi de savoir si les visiteurs allaient pouvoir accéder au site sans encombre. La veille, des militants d'Earth Resistance, un mouvement antispéciste, avaient indiqué vouloir bloquer le salon. Il n’en a rien été. Mais cette pression antispéciste pèse de plus en plus sur le moral des éleveurs.
« Nous dénonçons la montée en puissance de cette violence inouïe. J’avais écrit à Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, il y a un mois et demi ! Les visuels d’invitation à l’action Nuit debout devant les abattoirs montraient des abattoirs en feu. Je n’ai eu aucune réponse du ministre », a expliqué Christiane Lambert.
« Nous dénonçons les propos déplacés de l’association Boucherie Abolition. Comparer l’élevage à l’Holocauste, qui aurait osé ? Les agriculteurs vivent très mal cette dérive sectaire, radicale, qui va conduire à des catastrophes. »
La FNSEA va faire la demande d’une mission d’enquête parlementaire sur les associations antispécistes, leur financement, leurs fondements et leurs finalités. « Face à l’inertie de l’État et du ministère de l’Intérieur, nous ne pouvons accepter qu’aucune mesure ne soit prise. Nous n’allons pas faire justice nous-même. Mais l’État doit prendre ses responsabilités en rétablissant l’ordre. »
Jeudi 4 octobre, Stéphane Travert est donc attendu de pied ferme par les éleveurs de la région et leurs représentants nationaux. Il doit rester toute la matinée dans les allées de la grande Halle d’Auvergne, avec son homologue à la cohésion des territoires Jacques Mézard, avant d’aller visiter un élevage de l’Ain, pour évoquer notamment le vote de la loi Alimentation et son titre 1 censé permettre aux agriculteurs d’obtenir des prix rémunérateurs. Mais là encore, les représentants de la FNSEA préviennent. « Il ne s’agit pas de fanfaronner ! Il y a des points que nous n’avons pas obtenu dans la loi et pour lesquels il faut encore travailler, et il y a surtout des ordonnances à publier pour une vraie application de la loi », a prévenu Patrick Bénézit.