Maîtriser la fertilité et la fécondité en 5 étapes

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L'insémination doit avoir lieu entre 12 et 18 heures après le début des chaleurs. (©Terre-net Média)
L'insémination doit avoir lieu entre 12 et 18 heures après le début des chaleurs. (©Terre-net Média)

Le constat revient souvent dans les discussions d'éleveurs : la maîtrise de la reproduction est un problème majeur dans un grand nombre de troupeaux. Comment améliorer la fertilité des vaches hautes productrices qui sont déficitaires en progestérone ? Le Bureau technique de la promotion laitière donne les cinq étapes clés pour améliorer la reproduction des vaches laitières.

Une vache vêlera si les cinq étapes suivantes se déroulent correctement :

  1. Etre cyclée
  2. Exprimer des chaleurs observables
  3. Etre inséminée au bon moment
  4. Avoir un ovule fécondé
  5. Mener la gestation à terme

Cycle reproduction vache laitière
Cycle de reproduction théorique d'une vache laitière. (©Btpl)

Définitions préalables :

La fertilité caractérise l’aptitude d’une vache à être fécondée. Elle s’évalue par le taux de réussite à l’insémination.

La fécondité traduit le fait que les femelles mènent une gestation à terme dans un temps donné. Elle se mesure par l’intervalle vêlage-vêlage ou par l’intervalle vêlage-insémination fécondante.

Pour une bonne conduite de la reproduction, les indicateurs visés sont les suivants :

objetcifs de reproduction
Objectifs de reproduction. (©Btpl)

On estime que les problèmes d’infécondité s’expliquent :

  • pour 50 % des cas : par des déséquilibres alimentaires
  • pour 30 % des cas : par des problèmes de conduite d’élevage (observation des chaleurs, insémination,…)
  • pour 15 % des cas par des problèmes sanitaires (ex : fièvre Q, néosporose, métrites…, )
  • pour 5 % pour d’autres raisons.

Face à ces aspects physiologiques, les contraintes économiques sont importantes :

- objectif d’être le plus proche possible d’un veau par vache et par an
- un niveau de production des vaches en augmentation
- une taille de troupeau qui augmente également
- la volonté de gérer la répartition des vêlages dans l’année
- maîtriser des coûts d’alimentation.

Attention donc à se fixer des objectifs réalistes en termes de performances de reproduction.

Un outil de suivi à jour est également nécessaire pour réagir à toute dérive des performances par rapport aux objectifs fixés.

1. Mise à la reproduction

L’insémination se prépare dès le tarissement précédent

Conduite des vaches taries

C’est le tout premier point de la chaîne qui pourra entraîner quelques mois plus tard des problèmes de fécondité. Attention donc à l’alimentation et à l’hygiène entourant ces animaux.

  • Logement séparé du reste du troupeau, et tenu propre : pour limiter les risques d’infection.
  • Ration adaptée, avec deux périodes : début de tarissement puis préparation au vêlage.
  • Minéral spécifique + vitamines et oligoéléments en quantité et qualité nécessaires favorisant la délivrance et la tonicité du muscle utérin.
  • Eviter les aliments tels que : 

                      - Luzerne, trèfle, crucifères, mélasse : apport excessif de calcium

                      - Herbe jeune ou d’automne : composition trop variable

                      - Sel bicarbonate de soude : déséquilibre de la balance anions-cations

La mesure du Ph urinaire est un bon indicateur de l’équilibre alimentaire d’une vache en fin de lactation. Il doit être autour de 5.

Pour prévenir les fièvres de lait et les non délivrances, l’apport de 100 gr de chlorure d’ammonium et de 100 gr de sulfate de magnésium trois semaines avant le vêlage est bénéfique.

Conditions de vêlage

  • Vêlage dans un box propre, nettoyé et si possible désinfecté après chaque vêlage.
  • Hygiène de l’éleveur pendant le vêlage : tablier propre, mains lavées, seau d’eau avec désinfectant et savon pour intervenir auprès de la vache.
  • Vêlage « en douceur » : toute blessure ou déchirure est au mieux source d’infection, au pire cause de réforme. Une césarienne bien pratiquée vaut mieux qu’un vêlage pénible.
  • Si vêlage difficile (jumeaux, gros veau, siège…), injecter immédiatement après vêlage un médicament stimulant les fibres utérines et favorisant la délivrance (type Sergotonine®)

Après  vêlage…

  • Faire lever la vache au plus vite, pour favoriser la remise en place de l’utérus et prévenir les torsions de matrice.
  • Prévenir la fièvre de lait : surveiller et traiter éventuellement les vaches à risque : vaches à partir du 3ème vêlage.
  • Surveiller que la vache délivre bien dans les 24 heures qui suivent le vêlage. Sinon, tenter de la délivrer, et lui mettre des oblets.

Et si ma vache ne délivre pas ?

Deux solutions sont alors possibles :

1/ laisser faire et traiter la vache pour prévenir une infection qui se produira bien souvent de toute façon et au moins localement (métrite) avec les complications qui l’accompagnent.

2/ tenter une délivrance manuelle, qui, si elle se passe bien, permettra souvent d’éviter l’infection et permettra un retour plus rapide à la reproduction ultérieure. Attention aux conditions d’hygiène : (gants, seau d’eau, savon, queue attachée) sous peine de faire pire que mieux).

Après délivrance (totale ou partielle), introduire 5 à 6 oblets dans l’utérus en procédant toujours avec le plus d’hygiène possible.

Surveiller la température pendant quelques jours : si elle dépasse les 39°C, appeler le vétérinaire.

3/ Si la délivrance manuelle complète est impossible :

    - utiliser des oblets, ou des traitements facilitant la délivrance.
    - surveiller la température.

2. L'alimentation en début de lactation

Densifier la ration

Les qualités de la ration jusqu’au pic de lactation :

  • Distribuer la base de ration des vaches laitières 3 semaines à 15 jours avant vêlage, en quantité rationnée (1/3 à ¼ de la ration) avec du foin.
  • Distribuer une ration dont la densité énergétique et azotée est adaptée au pic de lactation prévue.
  • Respecter les rythmes d’augmentation des concentrés si la ration n’est pas complète : pas plus de 0,5 kg supplémentaire par jour.
  • Vérifier que les quantités ingérées correspondent effectivement aux quantités prévues…
  • Respecter les équilibres Pdi/Ufl, Pdia/Pdi et Pdin/Pdie pour éviter à la fois les déficits et les excès d’azote solubles responsables de mortalités embryonnaires.
  • Vérifier la complémentation en minéraux, vitamines et oligo-éléments ; attention en particulier à employer la formule P Ca adaptée à la ration.

3. Détecter les chaleurs

Noter toute les chaleurs visibles, même s’il est trop tôt pour inséminer, la surveillance sera ensuite facilitée.

Attention aux vaches atypiques : certaines vaches peuvent avoir des cycles réguliers sur 24 ou 25 j par exemple. Noter le nombre de jours du cycle de chaque vache ; en effet, la majorité (75 %) des vaches « tournent » sur 21 jours mais la règle n’est pas générale ; par contre une vache ayant un cycle de 24 jours, respectera souvent ce chiffre.

Surveiller de près les vaches bonnes à inséminer : entre 50 et 90 jours après vêlage : observations au calme en début le matin et le soir, également en début d’après-midi.

Observer :

  • les vulves,
  • les vaches énervées,
  • les chevauchements.

Utiliser des dispositifs d’aide à la détection en cas de doute (podomètres, harnais kamars, transpondeurs, etc.)

Des mesures faites au Québec montrent que la fréquence des observations a un effet direct sur le pourcentage de vaches détectées.

Influence de la fréquence des observations sur la détection des chaleurs. - Guy Lacerte Symposium bovins laitiers 2003.

Fréquence des observations

% de vaches détectées en chaleur

3 : matin, midi, soir

   86 %

2 : matin, soir

   81 %

1 : matin

   50 %

1 : soir

   42 %

1 : midi

   24 %

4. Fertilité

Inséminer au bon moment

Ne pas inséminer une forte productrice qui est en phase d’amaigrissement où dont le TP est inférieur à 30 g/l : les chances de succès sont minces.

Inséminer entre 12 et 18 heures après le début des chaleurs :

       - Vache vue en chaleur le soir : insémination le lendemain en fin de matinée.

       - Vache vue en chaleur le matin : insémination en fin de journée.

Déroulment des chaleurs d'une vache laitière
Déroulement des chaleurs d'une vache laitière. (©Btpl)
 

Et si ma vache ne revient pas en chaleur ?

- Etre sûr qu’elle est bien en phase de reprise de poids.

- Vérifier que l’utérus soit indemne de toute maladie.

- Etre sûr que l’observation des chaleurs soit bien faite.

 

Si aucune chaleur n’a jamais été observée depuis le vêlage ?

Il est possible de mettre en place un protocole pour déclencher une chaleur. Attention cependant ces protocoles ont des taux de réussite de l’ordre de 50 à 60 %.

Différentes solutions existent :

Protocoles à confirmer avec le vétérinaire traitant

Receptal

 

Déclanchement des chaleurs

Si une chaleur au moins a été observée depuis le vêlage

La vache a probablement un corps jaune persistant. Dans ce cas, une injection de prostaglandines a de fortes chances de provoquer des chaleurs 3 à 7 jours après l’injection.

  • En cas de chaleurs visibles et de secrétions claires : inséminer ou faire saillir.
  • En cas de chaleurs visibles et de secrétions chargées de pus : refaire une injection de prostaglandines 11 à 14 jours après la première injection et traiter l’infection.
  • En cas d’absence de chaleurs : pratiquer une deuxième injection de prostaglandines 11 à 14 jours après la première injection puis inséminer systématiquement le 3ème et le 4ème jour après cette 2ème injection.

progestérone vaches laitières

Et si ma vache revient régulièrement en chaleur ?

La vache doit être en phase de reprise de poids depuis six semaines au moins et ne doit pas être atteinte d’infection utérine.

Vérifier l’absence de maladie (Bvd, Fièvre Q, BHV4, Chlamydiose, Néosporose, infection utérine, etc.)

Une cause principale : le déficit en progestérone des vaches fortes productrices 

  • Les vaches fortes productrices produisent moins de progestérone
  • Les vaches fortes productrices détruisent davantage la progestérone au niveau du foie dont l'activité est accrue du fait de leur consommation alimentaire élevée.
  • Les vaches fortes productrices éliminent davantage de progestérone dans le lait car l'hormone se fixe aux matières grasses du lait.

A partir de la troisième insémination, des traitements sont possibles au moment de l’insémination pour stimuler la production de progestérone par le corps jaune. Analogue de GnRh (Receptal®, Reproreline®, Cystorelline® Fertagyl®…) à voir avec le vétérinaire.

5. Fécondité : Diagnostic précoce, confirmation de gestation

Une fois c’est bien, deux c’est mieux

Trois types de diagnostics de gestation sont possibles : test sur le lait, échographie, fouille, réalisés entre 30 et 60 jours de gestation présumée.

Vous venez de réaliser un diagnostic de gestation. Verdict : sur les quatre vaches inséminées il y a environ un mois, trois sont bien gestantes.

Pour la dernière, vide, il faudra agir rapidement et l’inséminer à nouveau. C’est l’objectif du diagnostic précoce de la gestation : repérer rapidement les vaches vides pour les ré-inséminer à nouveau.

Mais sur les trois vaches pleines, cela vaut-il la peine de refaire un diagnostic de confirmation  après un diagnostic précoce ?

Trois critères permettent de trancher

1) Le taux  de détection des  chaleurs

L’effort de surveillance des chaleurs est fait sur les vaches vides ; qu'en est-il des vaches présumées gestantes ? Si par exemple elles sont dans un autre lot où la surveillance est moindre, un test de confirmation est important.

2) Le taux  de mortalité embryonnaire

Le taux de mortalité embryonnaire peut varier de façon importante d’un troupeau à l’autre. On estime que 10 % à 15 % des vaches gestantes pourraient subir une perte embryonnaire entre 30 et 60 jours de gestation. Dans certains troupeaux, les pertes peuvent être encore plus importantes. Conclusion : plus le taux de mortalité embryonnaire au sein du troupeau est élevé, plus la confirmation de la gestation est importante.

3) Le taux de réussite à l’insémination

Plus ce taux est faible, plus la détection précoce des vaches gestantes ou à remettre à la reproduction est importante.

La confirmation, généralement effectuée entre 60 et 90 jours de gestation, permet de détecter plus rapidement les pertes embryonnaires.

Une perte embryonnaire en  début de gestation n’est pas toujours facile à voir. Et une vache vide pendant une période prolongée c’est une perte importante.

Les tests sur le lait sont une bonne solution, pour confirmer un diagnostic réalisé par échographie ou palpation.

Ces recommandations sont à discuter et à valider avec votre vétérinaire qui est le plus apte à fournir les traitements les plus adaptés à votre troupeau.

 

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