Nouveau. Concilier la productivité des prairies et le bénéfice de certaines plantes pour la santé est possible. Des mélanges de semences soigneusement choisies sont testés en Ille-et-Vilaine.
La réglementation sur les huiles essentielles se durcit, la pression s’accentue aussi sur l’usage des antibiotiques. Et pourtant, les animaux d’élevage doivent pouvoir être soignés. « Nous recherchons des alternatives, notamment pour les éleveurs bio, mais pas exclusivement, afin qu’ils aient les moyens de préserver la santé de leur troupeau, en anticipant les problèmes », explique Pauline Woehrlé, responsable de l’agriculture biologique et durable chez Eilyps (ex-contrôle laitier, Ille-et-Vilaine).
De recherches bibliographiques en contacts avec ceux qui, aux États-Unis ou ailleurs, se posaient les mêmes questions, Pauline Woehrlé a d’abord accumulé des connaissances. Ainsi, il existe une théorie selon laquelle les animaux ont la capacité de sélectionner les plantes qui les aident sur le plan de la santé, à titre préventif ou curatif. Et certaines plantes sont connues depuis des lustres pour leurs propriétés bénéfiques sur le système digestif, hépatique, ou encore immunitaire. D’autres peuvent aider à lutter contre les parasites. Ces caractéristiques sont utilisées en élevage dans de nombreux pays.
Des moutons moins sensibles aux parasites
De fil en aiguille, Pauline a rencontré un semencier anglais qui cherchait à concevoir des mélanges de semences de façon à obtenir des prairies améliorant la structure, et donc la fertilité, du sol avec des systèmes racinaires variés. Ces travaux ont débuté il y a dix ans. Les parcelles d’essai étaient pâturées par des moutons et il s’est aperçu que leurs besoins en vermifuges se trouvaient réduits. Les particularités de la flore semblaient donc avoir un effet bénéfique sur leur santé. Ses préoccupations rejoignaient celles d’Eilyps.
Faute de trouver des producteurs de semences français intéressés, c’est donc avec cette petite entreprise anglaise que Pauline a poursuivi. « Nous avons cherché à mettre au point des mélanges offrant un bon compromis entre la structure du sol, la productivité du fourrage dans uneoptique de production laitière, et le soutien à la santé. » Il fallait aussi que le mélange s’adapte aux conditions pédoclimatiques de l’Ouest français.
Plusieurs mélanges sont sortis de ces travaux pour les élevages bio ou conventionnels. Certains sont préconisés d’abord pour leurs qualités nutritives et leur productivité. D’autres répondent davantage à un objectif de santé. Le cycle de production est alors plus long.
Une prédominance des légumineuses
Ces mélanges comprennent quinze à dix-sept espèces différentes. On peut citer des classiques : ray-grass, trèfle et festulolium pour la productivité. On y trouve aussi des légumineuses tels le lotier ou le mélilot, riches en tanins condensés, connus pour leur action contre les parasites (voir ci-contre).
La composition complète reste un secret. Cette diversité offre aussi une meilleure résistance à la sécheresse estivale. Et elle permet une symbiose entre les différentes espèces. Le mélange est vérifié par le Groupement national interprofessionnel des semences et plants (Gnis) et Eilyps a désormais le statut de distributeur de semences. À l’avenir, il proposera des mélanges sur mesure, en fonction des souhaits des éleveurs. Les premiers semis ont été réalisés chez des éleveurs d’Ille-et-Vilaine, au printemps, sur une quinzaine d’hectares. Eilyps a proposé des formations aux éleveurs sur ce thème et le succès a été immédiat. Les commandes sont importantes pour l’automne.
Ces prairies sont destinées uniquement au pâturage. La présence de chicorée, par exemple, empêcherait un bon séchage. Elles devraient conserver leurs propriétés pendant quatre ans. Ensuite, l’intérêt pour la santé pourrait diminuer, mais la prairie restera intéressante à exploiter jusqu’à l’âge de 5 à 7 ans.
Les éleveurs s’inquiètent parfois de l’appétence de ce type de prairie. Elle ne pose aucun problème. Seul bémol, la chicorée peut parfois être un peu amère en fin de saison.
Par rapport à un classique RGA-TB, le prix de la semence est une fois et demie plus élevé. Mais la dose est de 33 kg/ha afin d’obtenir une forte densité. La préparation du sol et le semis se font comme pour les autres prairies. La logique de prévention des maladies et de stimulations des défenses naturelles suggère d’aller plus loin que la seule implantation de quelques prairies pharmacie. C’est tout un écosystème qu’il faut mettre à disposition des animaux. Les formations d’Eilyps détaillent cette philosophie de manière très concrète.
« L’aménagement des talus et des haies vise à protéger les animaux, mais pas seulement », précise Cécile Bouquet, consultante bio chez Eilyps. Des espèces comme le châtaignier, le saule, le framboisier, etc. peuvent avoir un effet bénéfique sur la santé. Les animaux sauront en profiter selon leurs besoins, s’ils les trouvent à leur disposition. En outre, ces espèces plongent leurs racines plus profondément que les graminées, par exemple, et contiennent donc des oligoéléments différents. Cela enrichit l’apport pour les animaux.
Dans le même esprit, il est utile de connaître les espèces toxiques pour les animaux. « Notre formation inclut un enseignement en botanique sur le terrain. Les éleveurs apprécient beaucoup », poursuit Cécile.
Affiner les conseils de conduite à partir des premières expériences
Les premières prairies implantées cette année vont être suivies par Eilyps. Car leur conduite et leur intégration dans le système fourrager ne sont pas encore bien calées. Les conseils de conduite s’appuient sur l’expérience des éleveurs anglais. Au Royaume-Uni, les éleveurs laitiers qui en ont mis en place ont couvert de 7 à 54 % de leur surface.
Certains éleveurs d’Ille-et-Vilaine ont prévu une parcelle qui entrera dans le cycle de pâturage comme les autres. D’autres vont faire passer les vaches sur la prairie pharmacie une fois par semaine. Il sera intéressant également de voir comment les animaux se comportent et si des évolutions sont observées sur les troupeaux en matière de production ou de santé.
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