Oligoéléments : la complémentation s’impose

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CMV. Sur des sols peu fournis, les carences en oligoéléments du troupeau sont fréquentes, réclamant un diagnostic fin et une complémentation durant la lactation.

Pour mieux connaître l’état des carences régionales, la société Vétalis a créé un observatoire des oligoéléments à partir d’analyses plasmatiques réalisées par deux laboratoires indépendants entre 2007 et 2013 (Laboratoire départemental de Vendée et LDHVet).

Les résultats sont compilés dans la thèse vétérinaire de Damien Trumeau qui exerce aujourd’hui à Bécon-les-Granits (Maine-et-Loire).

L’étude révèle que les cas de toxicité (excès) sont très rares et que les carences concernent surtout l’élevage allaitant. Des manques de sélénium et d’iode sont néanmoins observés dans les élevages laitiers.

« Les vaches laitières en lactation sont moins soumises au risque de carences cliniques et subcliniques, car elles sont habituellement complémentées avec un CMV contenant des oligoéléments, souligne le docteur Frédéric Rollin, de la faculté de médecine vétérinaire de l’université de Liège. Le problème se situe souvent chez les taries : pour prévenir les fièvres de lait, certains font l’impasse sur la complémentation minérale. Les génisses aussi sont parfois ignorées. C’est pourquoi il y a souvent plus de problèmes avec les veaux de primipares (également parce que le colostrum est moins riche). Or, la complémentation de la mère au moins trois mois avant vêlage est essentielle à la vitalité du veau. De plus, en situation de carence, l’infection par un virus ou un parasite peut s’avérer plus virulente. »

Pour le vétérinaire, la complémentation est nécessaire partout en Europe, pour diverses raisons : des sols déficients, une faible diversité de ration liée à la monoculture de maïs et de ray-grass, des animaux très productifs à besoins élevés. Les carences peuvent aussi être induites par des facteurs secondaires : excès de fer et de manganèse dans les fourrages qui pénalisent l’assimilation des autres oligoéléments ; CMV mal équilibré ou contenant du fer (couleur rougeâtre) ou épandages réguliers d’engrais soufrés. « Une catastrophe sur les prairies ! Ils dopent le rendement, mais vident la plante de son sélénium organique. »

Des symptômes le plus souvent multifactoriels

Des signes cliniques doivent alerter sur d’éventuelles carences.

Les maladies de peau (gales, teignes, dermatite digitée…) se développent souvent sur un terrain affaibli par des carences en zinc, cuivre, iode.

Les troubles de la reproduction peuvent incriminer des carences en cuivre, zinc, iode, sélénium et cobalt. La mauvaise adaptation du nouveau-né à la vie extra-utérine, surtout observée en élevage allaitant, mais de plus en plus décrite en race holstein,doit amener à suspecter une carence en iode et sélénium : veaux mort-nés, faibles, en hypothermie, souffrant de rigidité articulaire, d’un syndrome de détresse respiratoire (respiration haletante), de macroglossie (grosse langue) ou étant d’ une sensibilité exacerbée aux maladies infectieuses.

L’iode et le sélénium participent en effet à la synthèse de l’hormone thyroïdienne T3, essentielle à la maturation du système nerveux, respiratoire ou reproducteur. Une forte mortalité embryonnaire, des avortements et des vêlages prématurés peuvent indiquer un manque d’iode. En post-partum, le manque de sélénium peut être suspecté face à la recrudescence de mammites cliniques et subcliniques, en raison d’une immunité plus faible. La rétention placentaire, les métrites ou les vaches incapables de se relever après la mise-bas peuvent impliquer le sélénium, l’iode et le cobalt. Ici, le lien entre oligoéléments et symptômes est au conditionnel, car tous ces troubles sont souvent multifactoriels. Par exemple, pour la vache couchée après vêlage, avant d’incriminer un déficit d’oligoéléments, il faut évacuer les autres causes : mammite, métrite, troubles musculo-nervo-squelettiques ou métaboliques.

Bolus ou semoulette, plutôt que seau à lécher

« Les apports d’oligoéléments ne vont pas tout régler si, par ailleurs, les équilibres alimentaires et l’hygiène ne sont pas respectés », prévient Frédéric Rollin. Les symptômes cliniques doivent éveiller les soupçons, surtout si la ration est fondée sur des fourrages carencés (ensilages de maïs, paille, foin trop fibreux), en cas d’ingestion de terre ou de contamination des fourrages par de la terre sur des sols riches en fer, ou d’épandages fréquents de lisier de porc sur pâtures (intoxication par le cuivre). Pour confirmer une suspicion, Frédéric Rollin recommande de faire des analyses sanguines sur des animaux sains du troupeau, « un minimum de 7 à 15 individus. On considérera qu’il y a un problème si au moins 30 % ont un statut inférieur aux seuils admis ».

Moins chère, mais moins précise, l’analyse de lait de tank est néanmoins représentative du statut en iode et sélénium. Puis une analyse fourragère complète permettra d’ajuster le choix du CMV. Le vétérinaire conseille le bolus, la semoulette, voire des sels iodés intégrés à l’ensilage. L’accès libre au CMV (seau à lécher, blocs, feeder) induit une consommation trop aléatoire : « C’est une erreur de croire que les vaches s’autorégulent. » Les cures ponctuelles d’oligoéléments ont un intérêt pour le cuivre et le sélénium, car ils sont stockés dans le foie avant d’être relargués. Mais une partie est perdue dans les déjections et la méthode est inefficace pour les autres oligoéléments. « Il faut privilégier les apports réguliers, avec un CMV au tarissement et un autreen lactation, pour un bon démarrage du veau et de la mise à la reproduction de la mère, mais aussi tout au long de la gestation, car un niveau de production élevé induit un stress métabolique important. »

Jérôme Pezon

© J.Pezon - Le veau nouveau-né qui manque de vitalité et qui ne veut pas téter est le cas typique d’un problème qui doit amener à suspecter une carence en iode et sélénium liée à une mauvaise complémentation de la mère.

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Vaches, charolaises, U= France 7,46 €/kg net =
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