Les bienfaits de la méthanisation en mode individuel

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Autonomie. Le Gaec Le Sablonne a réussi une diversification rentable et peu chronophage avec une unité de méthanisation simple, qui valorise les fumiers mous de la stabulation des vaches laitières. Un second projet est en cours.

Magalie et Grégory Declerck sont des éleveurs méthaniseurs heureux, avec une unité de production modeste de 50 kW. « Le projet de méthanisation me trottait dans la tête depuis de nombreuses années. Le déclic s’est produit quand deux associés du Gaec sont partis. Il fallait trouver de la trésorerie pour solder les comptes associés sans avoir à supporter du travail supplémentaire », explique Grégory. Car avec 150 ha de SAU, 150 vaches et des génisses, les deux époux ne chôment pas. Hors de question pour autant d’envisager un projet collectif, compliqué à monter. « Je voulais travailler avec mon propre gisement, rester à l’échelle de l’exploitation et ne pas courir partout pour trouver des substrats. » Avec un bâtiment pour les vaches laitières de 200 places de logettes sur paille, agrandi en 2012, le Gaec Le Sablonne dispose d’un effluent fumier mou (4 kg/jour de paille par logette).

« J’estime le temps d’astreinte à une demi-heure par jour »

C’est en Mayenne, en 2016, que les éleveurs ont découvert le principe de méthanisation qui leur convenait. L’entreprise CRD, spécialisée dans le traitement et la gestion des effluents (racleurs, pompes, séparateurs), a noué un partenariat avec l’entreprise belge CogeO, pour proposer des solutions de méthanisation aux élevages. Leur concept, appliqué ici, repose sur une gestion automatisée des effluents­. Les racleurs qui passent toutes les deux heures amènent le lisier dans un canal de reprise, qui alimente une préfosse équipée d’un broyeur capable de traiter les brins de paille. Un programme de liquéfaction ajoute la bonne proportion d’eau verte et blanche pour atteindre les 12 % de MS nécessaires à l’injection dans la cuve du méthaniseur. « Je n’ai pas grand-chose à faire si ce n’est surveiller qu’il n’y ait pas de fibres trop longues qui pourraient bloquer la pompe. J’estime le temps d’astreinte passé à la méthanisation à une demi-heure par jour, parfois moins. Je réfléchis aussi à l’utilisation d’un broyeur à paille ou à un système de type rotocut sur la presse pour limiter en amont la longueur des fibres », explique Grégory.

8 100 € de chiffre d’affaires mensuel

Il y a six injections par jour de 5 m3 d’effluents provenant exclusivement du bâtiment des vaches laitières. Aucune CIVE, ni ensilage maïs ne sont utilisés pour la méthanisation. Sont ajoutés seulement 100 à 120 kg par jour d’issues de céréales. Un gisement largement suffisant pour une installation de 50 kW en cogénération. L’injection dans le réseau électrique a débuté en avril 2018, deux ans après la mise en route du projet. L’investissement total a été de 500 000 €. Il génère une annuité de 40 000 € pour un chiffre d’affaires de 8 100 €/mois. Le projet a bénéficié du tarif de rachat de l’électricité revalorisé en 2016, de 22,5 c/kWh sur vingt ans, destiné aux unités de moins de 80 kW (prime à la valorisation des effluents comprise). Il n’y a pas d’utilisation de la chaleur autre que pour la cuve du méthaniseur. Elle n’est plus obligatoire dans le tarif de rachat et comme le Gaec n’a pas fait de demande de subventions, il est resté libre de ses choix. « D’ailleurs, l’Ademe nous avait fait savoir que notre projet était trop rentable », ironise Grégory.

De son côté, la banque a été enthousiaste et n’a pas hésité à financer ce projet. « Le plus pénible a été la lenteur de l’administration et d’Enedis. Le suivi administratif finit par être épuisant. Heureusement que nous avons été épaulés efficacement par l’entreprise CRD », expliquent les éleveurs.

Une nouvelle tranche de 80 kW est prévue

Le moteur Man est arrêté toutes les 400 heures pour une vidange. Une maintenance plus longue est programmée deux fois par an pour un coût de 1 275 €. « En sortie du méthaniseur, le digestat passe par un séparateur de phase à tamis vibrant. La partie solide est stockée sur l’ancienne fumière, la partie liquide rejoint la fosse à lisier existante. L’épandage de ces deux effluents est assuré par une ETA, qui dispose d’un épandeur avec table d’épandage et d’une tonne avec pendillards. L’économie en engrais azotés est importante, surtout sur prairies et avant maïs », notent les éleveurs.

Magalie, Grégory et leurs deux enfants, qui rejoindront prochainement l’exploitation, ne voient que du positif dans cette diversification et en premier lieu, un soutien pour la trésorerie de l’exploitation. Ils envisagent d’ailleurs d’investir dans une nouvelle tranche de 80 kW pour valoriser complètement tous les effluents de l’exploitation, notamment le fumier mou de l’atelier des génisses. « Avec le seul fumier des vaches, le temps de séjour dans le méthaniseur était de seulement 22 jours. C’est trop rapide. Le second méthaniseur permettra d’optimiser la production de méthane. Nous disposerons d’un peu plus d’issues de céréales et peut-être ajouterons-nous aussi un peu de maïs. »

Quels conseils donneraient-ils à un éleveur laitier qui hésite à se lancer dans un projet individuel ?

« Si la banque suit, il ne faut pas hésiter. Il est possible aujourd’hui de construire quelque chose de simple à un prix raisonnable. Mais attention à ne pas avoir la folie des grandeurs et adapter au plus près la puissance au gisement disponible sur l’exploitation. »

Dominique Grémy

© D.G. - Vue d’ensemble. L’installation avec, au premier plan, la fosse géomembrane préexistante qui recueille les eaux vertes et blanches. D.G.

© D.G. - Digestat. Le séparateur de phase a été placé au-dessus de la fumière qui existait dans le prolongement du bâtiment des vaches laitières.D.G.

© D.G. - Sans nuisances sonores.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,46 €/kg net =
Vaches, charolaises, R= France 7,23 €/kg net =
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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