Réunis en assemblée générale le 3 juillet, les membres du SNIA (Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale) se sont félicités de la croissance des ventes d’aliments en 2024, après plusieurs années de recul. Toutes filières confondues, 19,4 millions de tonnes (Mt) d’aliments composés sont sorties des 287 usines réparties sur le territoire, soit une hausse de 1,7 %, principalement tirée par les volailles (+ 3,4 %, à 8 Mt) et les bovins (+ 2,3 %, à 5,4 Mt) dans une conjoncture économique qui incite les éleveurs à produire.
Mais, à une semaine des annonces par l’administration Trump de sa politique de tarifs douaniers vis-à-vis de l’Union européenne (UE), le SNIA fait part de ses inquiétudes concernant la hausse du prix des matières premières, qui constituent 85 % de son prix de vente : les mesures de rétorsion de l’UE sur les importations de tourteau de soja américain pourraient avoir un impact estimé à 2 milliards d’euros sur les filières d’alimentation animale.
La guerre des tarifs douaniers sur le soja
Le SNIA, tout comme la FNPL (Fédération nationale de producteurs de lait), demande donc à la Commission d’exclure les matières premières agricoles des mesures de rétorsion : « La France historiquement acheteuse de soja brésilien est très peu dépendante du soja US. Mais ce n’est pas le cas d’autres pays européens qui, dans ce contexte, pourraient se tourner vers le soja sud-américain, avec pour conséquence un renchérissement général du prix du tourteau et des aliments composés », explique Ludovic Michel, président du Groupe Michel et vice-président du SNIA.
À ces inquiétudes, comme nous l’indiquions déjà dans L'Eleveur laitier du mois de mai, s’ajoutent les conséquences de la réglementation européenne liée à l’interdiction d’importation de soja déforestant.
À ce jour la Commission n’a toujours pas précisé les modalités d’application et de contrôle d’une réglementation prévue pour 2026. En France, le SNIA, qui a pourtant élaboré un dispositif de traçabilité des ressources, appelle à un report. D’autres pays réclament son retrait pur et simple. « Si la réglementation est appliquée en l’état, cela entraînera non seulement une hausse des coûts, mais aussi un manque de disponibilité », alerte Ludovic Michel. Pour rappel, un surcoût entre 4 et 50 €/t est évoqué selon les modalités de mise en œuvre.
Application de droits antidumping sur les acides aminés chinois
Pourtant, il ne s’est jamais consommé aussi peu de tourteaux de soja en France (3 Mt) et la part des matières premières d’origine France dans le panier des fabricants d’aliments français atteint 72,6 %. En effet, pour répondre aux objectifs de réduction de leur empreinte carbone, les industriels de l’alimentation animale ont travaillé d’autres sources d’approvisionnement en protéines, comme les tourteaux de colza et de tournesol. Ils ont aussi bénéficié de l’amélioration de la teneur en protéine du blé et misé sur les acides aminés en substitution du soja. Dans ce domaine, la reprise par le groupe Avril et un fonds d’investissement d’EuroLysine, seul producteur de lysine présent dans l’UE en situation de dépôt de bilan, était une orientation stratégique pour la souveraineté de la ferme France. Depuis le 4 juin, des droits de douane de 48 % sont appliqués pour protéger cette filière en réponse à un dumping chinois devenu insupportable. « Même si, à court terme, cela implique une hausse du prix, c’est une victoire à long terme qui permettra de ne plus être dépendant d’un seul et unique fournisseur », explique Christophe Le Bras, directeur général du groupe Avril.
« La rentabilité des investissements mis en œuvre par la filière pour répondre aux attentes sociétales, notamment en matière de réduction de gaz à effet de serre, n’est pas évidente », rappelle Philippe Manry, directeur nutrition animale chez Sanders et second vice-président du SNIA. En 2024, les fabricants d’aliments ont pu compenser par les volumes un faible niveau de marge lié à une hausse de leurs coûts de production : marge brute/chiffre d’affaires = 16 % ; résultat net/CA = 0,4 %. Et de conclure : « Pour se moderniser et poursuivre les investissements nécessaires à nos actions, cela passera par l’installation de producteurs nombreux sur le tout le territoire. »
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