D’annonces fracassantes en renoncements, ce que l’on nomme « la guerre commerciale » de la nouvelle Administration américaine, ou plus prosaïquement sa volonté de relever ses droits de douane, plonge la filière de l’alimentation animale dans l’incertitude. À l’heure où nous bouclons, le tourteau de soja reste la source de protéine la plus compétitive. Son prix est passé sous la barre des 350 € et tous les fondamentaux du marché sont au vert : une récolte record au Brésil ; la Chine en retrait sur les achats ; un euro fort à la suite du recul du dollar et une météo propice à la récolte en Argentine et aux semis aux États-Unis. « L’annonce des surfaces emblavées par l’USDA [ministère de l’Agriculture des États-Unis] apportera plus de précision. Mais dans tous les cas, l’offre est abondante, cela même si la Chine revient demain aux achats. Les éleveurs profitent justement de cette période de flottement pour compléter leurs approvisionnements, car la situation peut très vite se retourner sous l’effet des spéculations », souligne Karine Noutary, responsable de la société de négoce Avena.
Après l’annonce américaine du report des taxes de 20 % sur les produits européens au 9 juillet, la Commission européenne a aussi reporté d’éventuelles mesures de rétorsion. Les inquiétudes portent sur ce point : une taxation européenne du soja US qui entraînerait mécaniquement une hausse de prix pour les filières d’élevage. Car l’Europe, comme la Chine, est structurellement déficitaire en protéine. Elle importe 6 millions de tonnes (Mt) de soja états-unien, pesant de 30 à 40 % du marché.
« Les premières annonces de la Commission, plutôt rassurantes, faisaient état d’une taxation des graines de soja, pas des coproduits, dont le tourteau, mais aussi des issues de la distillerie du maïs », indique François Cholat, président du Snia (Syndicat national de l’alimentation animale). Historiquement, la France importe peu de graines des États-Unis, mais plutôt du tourteau brésilien.
L’ombre de la spéculation sur le tourteau sud-américain
Les craintes évoquées portent donc davantage sur des conséquences économiques indirectes, liées aux spéculations sur le tourteau sud-américain, ou à un report de la Chine sur cette origine, après avoir misé dans un premier temps sur le canola canadien. « Les négociations bilatérales entre l’UE et les USA laissent 90 jours de répit. À plus long terme, on ne peut rien dire concernant l’évolution du marché. Il y a néanmoins des motifs d’inquiétude, puisque les décisions politiques ont toujours un effet spéculatif sur le marché des commodités. »
D’autant qu’un autre élément vient se greffer à ce contexte : l’interdiction d’importer du soja déforestant. Après avoir reporté cette nouvelle réglementation à 2026, la Commission doit préciser en juin les conditions de son application. Selon le niveau de contrainte imposé, la mise en œuvre de ce plan de lutte contre la déforestation entraînera un surcoût compris entre 4 et 50 €/t. La filière française s’appuie sur un mix-produit diversifié, mais avec un volume de 3 Mt/an, l’importation de soja reste à ce jour indispensable.
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