« L'ACCIDENT DE TRAVAIL, PERSONNE NE VEUT Y PENSER ET POURTANT…»

© M.P.
© M.P. (©)

Vincent Bertrand vit avec des prothèses aux jambes depuis que l'ensileuse qu'il conduisait a touché une ligne à haute tension.

L'EARL de Vigneul borde l'entrée de Bouvellemont, dans les Ardennes : 65 laitières pour 535 000 l de quotas, 150 ha et 3 UTH. Cette belle structure se relève doucement d'un traumatisme. « Ce 20 mai 2009, je remplaçais le chauffeur de la Cuma des Crêtes. Concentré sur l'avant de l'ensileuse, j'ai aperçu des flammes dans le pick-up ; j'ai pensé à une pierre et je suis descendu pour voir. Venant à mon secours, mon collègue a fait la même erreur : sortir de la cabine. Tous deux électrisés. J'y ai laissé mes jambes, lui la vie. » Trois ans après, Vincent Bertrand analyse froidement les circonstances qui ont mené à l'accident : le terrain en pente, une parcelle inconnue, les fils électriques à l'endroit de la fourrière, la goulotte relevée au maximum pour optimiser le remplissage d'une grosse benne…

PRÉVENIR

« Les risques du métier sont tabous », se désole l'éleveur, toujours présent pour appuyer les mises en garde de la MSA. Mission difficile : 60 personnes à peine sur quatre réunions organisées dans le département. Le document unique de prévention des risques, il admet l'avoir rempli après l'accident. Il se dit qu'il faut frapper les esprits des jeunes, dès leur formation. Quitte à choquer en montrant ses prothèses, en racontant le coma, la chambre stérile, la double amputation, les longs mois de rééducation à Troyes.

REVENIR

Dès septembre, il marchait trois kilomètres par jour pour dompter ses jambes d'acier. Il gérait la ferme à distance, le portable en surchauffe. Vincent Bertrand salue l'élan de solidarité dont il a bénéficié, le soutien familial indéfectible. Il retrouve l'odeur de foin et de moisson dans les narines ! Quel carburant pour le moral ! Il repasse son permis, reprend les commandes du tracteur, du télescopique… Ce métier choisi, pas question d'y renoncer. Malgré un taux d'invalidité de 100 %. Après 950 jours d'arrêt de travail, les médecins l'ont déclaré apte. Jeune papa divorcé assumant la garde alternée de ses trois enfants, Vincent ne conçoit pas de ne rien faire. Il connaît désormais ses limites. Il est prêt à se donner à fond.

RECONSTRUIRE

Pour pallier son absence, il a fait appel au service de remplacement. Mais avant de trouver le bon professionnel, la qualité du lait s'est dégradée, fragilisant l'exploitation. Un audit a été fait à l'automne dans le cadre d'une procédure « Réagir ». Le retour à la rentabilité est à portée d'un coup de pouce de l'Agefiph(1) par une aide à l'embauche du deuxième salarié, ou de la CNP(2) pour alléger le poids de gros emprunts, notamment liés au robot de traite. C'est là que le bât blesse : si l'assurance a bien pris en charge les annuités pendant l'arrêt de travail, reprendre l'activité va réenclencher le processus. Mais, épaulé par sa compagne, Vincent est déterminé à se battre.

MIREILLE PINAULT

Agefiph : Association pour la gestion, la formation et l'insertion des personnes handicapées.CNP : Caisse nationale de prévoyance.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,23 €/kg net +0,09
Vaches, charolaises, R= France 7,06 €/kg net +0,07
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo

Le marché Spot est en plein doute

Lait Spot

La dégradation de la conjoncture menace le prix du lait

Prix du lait

Tapez un ou plusieurs mots-clés...